Lutte des prisonniers du CRA de Lyon-Saint-Exupéry

Depuis le 2 juillet, les prisonniers du centre de rétention de Lyon sont en lutte. Ils ont fait une grève de la faim pendant plusieurs jours, écrit une lettre aux autorités, ont rendu leurs cartes de retenu aux policiers, et subi une forte répression.

Les prisonniers du CRA de Lyon Saint Exupery sont en lutte

Depuis le 2 juillet, les prisonniers du centre de rétention de Lyon sont en lutte. Ils ont fait une grève de la faim pendant plusieurs jours, écrit une lettre aux autorités, ont rendu leurs cartes de retenus aux policiers, et subi une forte répression.Déjà en février, des personnes s’étaient évadées de ce même CRA et avaient été fortement réprimées

Nous relayons ici leur lettre collective et deux témoignages de prisonniers qui racontent la lutte. Nizar parle à l’émission l’Envolée le 5 juillet et a été déporté violemment le lendemain (la discussion a été retranscrite). Omar revient deux jours après dans une discussion téléphonique sur ce qui se passe à l’intérieur.

Depuis mardi 2 juillet les détenu·e·s du centre de rétention administratif (CRA) de Lyon Saint-Exupéry ont entamé une grève de la faim afin de dénoncer leur enfermement.

Voici un communiqué signé par les détenu·e·s du CRA au sein des deux unités, bloc jaune et bloc bleu qu’ils souhaitent relayer le plus possible ; ainsi qu’une lettre remise aux keufs de la police aux frontières (PAF) du CRA.

Au nom de tous les retenus
Centre de rétention administratif
Lyon Saint-Exupery

Fait à Lyon le 02/07/2019

Objet : Description et explication sur les conditions de rétention adminsitrative au CRA Saint-Exupéry

Madame, Monsieur,

Au nom de tous les retenus au CRA de Lyon Saint-Exupéry, je vous écris pour vous alerter de la situation actuelle dans le centre. On est sujet à des décisions et ordres arbitraires et inhumains de la part des policiers de la PAF, à savoir des violences physiques, des placements en isolement, l’interdiction de ramener une partie de la nourriture dans nos chambres (le dîner est servi à 19h et le petit déjeuner à 8h30 => 13h30 entre les 2 repas).

On subit également des violences psychologiques à savoir des insultes répétitives, l’extinction des lumières dans les couloirs pendant la nuit pour nous « punir ».. On a également été témoins de refus de soin pour certains retenus, de la saisie de leur matériel médical (béquilles).

Nous demandons et réclamons le changement de cette situation et la visite de responsables afin de constater nos dires… Nous avons commencé une grève de la faim générale le 02/07/2019 à 18h30.

Ceci est un appel au secours. Veuillez trouver au dos de la page le nom et les signatures de tous les retenus »

Voici un extrait de l’émission de radio L’Envolée du 5 juillet 2019 avec le témoignage de Nizar, prisonnier au CRA de Lyon Saint-Exupéry, déporté le lendemain même de l’émission.

Il y parle de la lutte collective des prisonnier-e-s du CRA, de la grève de la faim et de leur solidarité ; face aux techniques d’intimidation, aux tabassages et vols de la PAF, et à l’abandon de soins du médecin …

– Envolée : Du coup toi t’appelle du centre de rétention de Lyon ?

Oui, exactement, alors je me présente je m’appelle Nizar. Je suis en centre de rétention de Lyon Saint-Exupéry depuis deux semaines. Et en fait ici pour vous dire très simplement c’est la jungle.
C’est la jungle où les policiers de la PAF sont les fauves et où on est l’appât, où on est euh voilà… On est des animaux en fait !
On n’a pas de droits ici. Ils sont en train de faire n’importe quoi avec nous. Ils refusent des soins pour des gens, ils enlèvent du matériel médical pour certains. Ils refusent de simples choses.

Et aujourd’hui il y a eu un incident qui est très très grave. En fait parmi nous il ya une personne qui est malade d’accord ?
Elle s’appelle euh, elle m’a autorisée à donner son nom, elle s’appelle Mohamed Ali né le 1.06.1987. C’est une personne qui est venue ici juste après avoir fait une chute de 6 mètres sur un rocher, où il a eu plusieurs fractures et c’est une personne qui est épileptique donc elle est là avec ses béquilles, détruite et qui fait beaucoup de crises d’épilepsie et en fait on le laisse pas accéder aux soins.
Aujourd’hui ce qui s’est passé c’est qu’il voudrait accéder à son bagage qui est dans la consigne en fait, et c’est tout à fait son droit puisqu’il le faisait à 17h alors qu’on n’a plus le droit à partir de 18h30. Donc ce monsieur demande à accéder à son bagage et on lui refuse ça !
On lui refuse ça parce que, je ne sais pas pourquoi, parce qu’ils prennent des décisions arbitraires.

– Envolée : Attends, excuse-moi. C’est juste pour expliquer ce bagage en fait. En fait, juste pour euh dire : quand vous vous êtes en cellule, vous n’avez pas le droit de ramener toutes les affaires c’est ça ?

Exactement. On n’a pas le droit. Ouais on a comme une bagagerie à l’intérieur du poste de police

– Envolée : Une salle de coffre quoi.

Voilà. Donc on leur donne notre carte. On va là-bas sous la surveillance prendre ce qui est à nous et revenir.
Donc monsieur on lui a refusé d’accéder à son bagage et l’autre, le policier qui lui a refusé ça, ben il lui a mis un coup dans l’épaule, un bon coup dans l’épaule. Sachant qu’il est épileptique et qu’il a ses béquilles sur lui au moment des faits et il lui dit « écoute moi je suis un boxeur ».
Et là qu’est-ce qu’il se passe ? Et bien il fait une crise d’épilepsie et c’était vraiment très très grave et c’est la troisième de la journée qu’il fait.
Et comment vous dire en fait ils s’en foutent, ils s’en foutent de tout ça, passez moi le terme mais pour eux on n’existe pas, on n’est pas là et depuis quelques jours en fait parce qu’on a fait une grève de la faim.

On a envoyé la lettre, ce qu’on a fait, tout le monde a signé, a mis son nom et prénom pour indiquer que allo ?

– Envolée : Ouais excuse-moi, la lettre dont tu parles c’est la lettre qu’on a lu juste avant ton coup de fil ?

Exactement

– Envolée : Et est-ce que tu crois que avant de partir laà-dessus, est-ce que tu peux expliquer comment vous avez décidé ensemble de vous mettre en grève de la faim parce qu’en gros là y a nous y a des copains dans d’autres centres de rétention en Île-de-France qui écoutent et c’est important aussi tu vois que les infos elles s’échangent un peu.

Alors en fait ce qu’il s’est passé c’est qu’un monsieur est parti pour voir, enfin pour récupérer quelque chose dans son bagage. Quand il a ouvert son bagage, il a trouvé que les meilleures choses, les meilleurs objets qu’il possédait ont disparu !
Et ces bagages-là, personne n’a accès à ces bagages sauf les policiers et la personne concernée puisque chaque personne doit présenter sa carte et on prend son bagage où il y a son nom et prénom devant la surveillance d’un policier et on nous donne ça et on remet ça devant nous.
Si quelque chose manque c’est les policiers qui les ont prises, je sais que c’est très très grave ce que je viens de dire, et je pèse mes mots et j’en porte la responsabilité. Donc les policiers en fait ils sont en train de nous délester dans la bagagerie des meilleurs objets qu’ont possède, à savoir des montres, de beaux parfums, de belles pièces de… Enfin soit des gourmettes en or, des gourmettes en argent…

– Envolée : Ouais ils volent quoi !

Ils volent exactement ! LES POLICIERS DE LA PAF DE SAINT-EXUPERY VOLENT DANS NOS BAGAGES : voilà.

– Envolée : Là on parlait juste avant dans l’émission en fait de la, d’une des prisons les plus sécuritaire de France qui s’appelle Condé-Sur-Sarthe et où en fait comme dans toutes les prisons les matons il volent aussi pas mal de…

Voilà il se sucrent sur euh exactement ! Voilà ! Ça a commencé comme ça. Le monsieur comme forcément il va pas être content, il a réclamé qu’il revisionne avec eux les caméras, ils ont refusé et donc ça a commencé à se chauffer parce que la même journée ya eu une personne a qui on a volé quatre cartouches de cigarettes, une autre personne un parfum Armani qui coûte 200€ et quelques. Euh… D’autres personnes ont perdu des montres, beaucoup de choses en fait le même jour ! Donc c’était un petit peu la goutte d’eau qui fait déborder le vase.
Toutefois on n’a pas fait de bordel ! Pardon excusez moi le terme

– Envolée : T’as droit de dire « bordel » t’inquiète !

C’était pas une contestation très très vive.

– Envolée : Ouais vous avez juste demandé vos droits, de voir la vidéo euh de savoir ce qui se passe quoi parce que ça devient chelou quand même

Et bien quand ils ont vu que tout le monde avait les mêmes revendications parce que presque tout le monde avait perdu des affaires, ce qu’ils ont fait c’est que maladroitement ils ont essayé de rattraper le truc. Et ils ont dit « ah bah écoutez ce qu’il s’est passé c’est qu’on a retouvés vos affaires dans un autre bagage ».

– Envolée : Mais non ! Et toutes les affaires de plein de gens différents ?

Enfin non juste les bagage du monsieur de ce jour-là. Et ce qui est impossible parce à chaque, comment dire, casier, il y a un numéro et ça commerspond au numero du retenu et donc c’est IMPOSSIBLE qu’on lui ait donné deux casiers. Et d’ailleurs lui-même la dernière fois qu’il avait pris son bagage avait toutes ses affaires dans le même bagage. Et les poliiers n’ont pas le droit de remettre ça dans un autre bagage, de remettre ça dans un autre casier. Donc soit ils ont pris son bagage, il l’ont mis dans un autre casier, une partie de son bagage et ils l’ont mis dans un autre casier. Ce qui est interdit !

Soit ils les ont volées ! Et c’est ce qui est le plus probable et d’ailleurs ce qui s’est passé. Ils ont volé ça et à un moment donné ils se sont dit « oh c’est parti trop loin, là ils sont pas bêtes quand même et donc on va remettre ça ». Et maladroitement ils ont fait ça et nous on avait compris, en fait c’est juste la goutte d’eau qui fait déborder le vase !
On a décidé de faire une grève de la faim pour que les policiers soient plus, comment dire, attentifs à ce qu’on veut, à nos droits quoi ! Et donc on a demandé à voir un responsable, ça n’a pas été fait donc on a fait une grève de la faim pendant…

– Envolée : Ah ouais, on vous refusé euh… Là vous avez toujours pas vu votre responsable ?

Non, toujours pas vu de responsables.

– Envolée : Le responsable tu veux dire c’est le, le chef, le chef du CRA ?

Le chef du CRA exactement ou au moins un sous-chef du CRA enfin pas un

– Envolée : Ouais pas les flics lambda qui…

Exactement pas un policier qui exécute seulement les ordres qu’on lui donne donc euh…

– Envolée : Parce que c’est dans vos droits en plus !

Exactement, donc voilà, il ont pas donné euh, ils n’ontt pas accédé à ce droit. Euh donc la grève a durée 4 jours quasiment , le quatrième jour on a quand même mangé, c’était aujourd’hui euh…
Et aujourd’hui ce qu’il s’est passé c’est que suite à la crise d’épilepsie de … Qu’a fait monsieur Mohamed Ali et ben on a demandé à ce qu’il soit pris en charge.
D’ailleurs c’est pas sa place en centre de rétention. Une personne comme ça sa place, c’est une prise en charge soit dans un hôpital soit…

– Envolée : D’ailleurs c’est la place pour personne mais particulièrement pour lui on est d’accord.

Exactement mais voilà.

– Envolée : Mais toi et tous les autres potos ils ont rien à faire en centre de rétention. Vous devez rester vivre à ou vus avez envie de vivre et c’est tout.

Exactement mais voilà je dirai à plus forte raison pour une personne voilà. Et bien écoutez donc on m’a… Les policiers sont venus en bon nombre, ils ont créé des bagarres entre nous parce que en fait ils sont très au fait et très euh.. il connaissent très très bien les affinités qui peuvent exister entre certaines ethnies, et ils jouent sur ça vous voyez.

Donc ils créént un peu de bagarres, et à ce moment-là, moi personnellement j’étais en train de parler au téléphone pendant 1h30 donc j’ai même pas vu la crise devant ma vue, j’ai même pas vu la bagarre.
En sortant y a le policier qui vient et qui me choppe qui me dit « toi tu viens avec moi ». Voilà pour je ne sais pas quoi, faire de moi une leçon ou… Il voulait m’emmener dans le poste certainement pour me tabasser. C’est une chose qui a été déjà faite et il y a d’autres personnes qui ont déjà été tabassées par les policiers qui peuvent témoigner.
Et donc dans ce même jour ya M.Mehdi Galkaoui qui était en train de donner les premiers secours à monsieur Mohamed Ali qui a fait la crise.

Et à ce moment-là y a les policiers qui sont venus et ils lui ont dit de dégager, en fait il pouvait pas dégager parce que le monsieur qui a fait une crise a avalé sa langue, vous voyez ce que je veux dire ?

Il était en train d’être asphyxié, et il pouvait pas, c’était un truc d’urgence !

Ce qui s’est passé c’est que le monsieur qui était en train de lr sauver, un retenu, et bien on l’a, on lui a fait une euh … Je sais pas comment on dit ça, une clef de bras.

– Envolée : Une clef de bras oui

Exactement, une clef de bras. C’est vraiment, il a serré, il a asphyxié, étouffé et ils l’ont tiré euh sur la terre pour l’emmener voilà enfin ils ont tiré comme un animal euh… ils l’ont emmené chez eux. Je sais pas ce qu’ils en ont fait, ils l’ont maltraité sûrement.

– Envolée : Parceque là t’as pas de nouvelles du poto qui a aidé le…

Si si si il est sorti plus tard, mais voilà il est dans un état psychologique pas très très bien, il veut pas parler aux autres.
Et en fait moi ils m’ont dit, enfin je sais que c’est quelque chose de grave ce que je dis quand même si il y a des gens qui entendent mais voilà on m’a dit clairement, très très clairement « tu vas le payer cher ».
Parce qu’ils pensent que je suis le meneur ou je sais pas quoi de ce mouvement alors que en fait c’est juste que je suis.. Enfin je suis la personne qui parle mieux français. Donc je suis quelque part leur porte-parole des choses qu’ils disent en arabe ou en d’autres langues, moi je suis l’interprète, et en même temps je suis avec eux dans le mouvement.
Et donc ils me prennent pour le meneur, ou c’est le rôle qu’ils vont me donner ils me l’ont dit texto : « on va t’accuser d’incitation à l’émeute » et je vais vous dire mon nom et prénom comme ça je suis quelque part un peu protégé, je m’appelle Nizar Hamriti, je suis né le 25.10.1994 à Casablanca.

Donc ils m’ont dit : « Toi tu vas le payer cher.
Tu es le meneur, tu vas le payer cher ».

– Envolée : Ouais parce qu’en fait tout ce que tu racontes, c’est des trucs quon a entendu là récemment dans les, enfin au CRA de Mesnil-Amelot, ou au CRA de Rennes ou en fait les flic parviennent à dresser les gens les uns contre les autres, à organiser des bagarres et après en profiter pour foutre des gens à l’isolement, les taper, les transférer, désigner des meneurs et compagnie. En fait c’est le fonctionnement normal des CRA que tu décris quoi.

Exactement, en fait ce qu’ils font aussi les policiers c’est que en fait à un moment donné de la journée entre 10h et 14h, faut qu’on évacue les cellules et le couloir ou on habite. Quand on les évacue, et bien généralement l’après-midi il y a des bagarres qui se créent, pourquoi ?
Parce que comme je vous ai dit en fait, comme ils sont très au fait des affinités entre ethnies, et bien ils prennent des affaires d’une chambre et ils le mettent dans une autre chambre bien dissimulée avec laquelle peut-être il y a quelque…

– Envolée : Comme ils ont fait avec les affaires au coffre du coup ?

Voilà exactement, enfin sauf que pour le coffre c’était pour eux, ils se le mettaient dans les poches mais quand ils sont dans les couloirs pendant l’évacuation ils planquent ça pour que les autres découvrent ce qui a été volé dans la chambre d’autres ethnies, enfin ça peut etre des blacks, des arabes, des tunisiens, des marocains, des algériens, des albanais, pour que la bagarre se créé. Vous voyez ce que je veux dire ?
Donc maintenant nous on est au courant de ce qui se passe, de leur manipulation et tout et voilà..
On ne se fait plus avoir et ils nous ont dit clairement « y avait toujours des tensions ici mais c’est la première fois que ça arrive comme ça : vous allez voir, on va vous punir ».

– Envolée : Ouais ils sont pas content de ne pas réussir à vous diviser quoi !

Exactement. On connaît bien le dicton : « pour régner il faut diviser », ce qu’ils faisaient depuis longtemps euh maintenant ils ont plus ce pouvoir quelque part donc euh… Ca les emmerde au plus haut point et ils commencent à devenir très très agressifs envers nous, très très malpolis.

Moi je fumais une cigarette tout à l’heure en venant au réfectoire, il me dit le policier : « Tu approches avec ta cigarette, moi je te l’écrase ». Alors que dans cet endroit on a le droit de fumer. C’est pas dans le réfectoire, c’est dans une allée pour aller au réfectoire qui est à l’air libre et nous on fume.
Il me dit « Toi tu t’approches avec ta cigarette, je te l’écrase ».

Y a autre chose qui a été fait et j’ai remarqué, c’est qu’au fait ils ont tous un numéro de matricule, les policiers de la PAF, comme tout autre policier.
Là euh, cet après-midi ils ont enlevé tous les matricules de manière à ce qu’on enregistre pas le matricule de chacun pour pas pouvoir se plaindre de telle ou telle personne en particulier quoi.

– Envolée : C’est ce que font les flics quand ils se mettent à tapper les gens.

Y a beaucoup d’autres choses parce que voilà j’ai beaucoup d’idées hein, moi ça fait que deux semaines que je suis ici, mais j’ai été témoin de tellement de choses dégueulasses, inhumaines que voilà j’arrive même pas à canaliser tout ça et vous le dire.
Y a des idées qui me viennent au fur et à mesure euh par exemple des provocations psychologiques de la police et de la PAF : ils n’hésitent pas à te dire « nique ta mère, trace ta route », pardon pour le mot. Euh ils n’hésitent pas à te dire devant les autres policiers, et moi ça m’est arrivé aujourd’hui, « toi tu verras on va te mettre un raclée », « tu auras ton compte », « tu le payeras cher », mais il n’hésitent pas en fait à le faire !

Parce que je pense que du moment qu’on est sans papiers dans ce centre de rétention on n’a pas le droit ! C’est comme si le droit français ne s’exerçait plus sur nous ! C’est comme si on n’était pas des sujets à ce... Enfin voilà à ce droit là ! Comme si ça ne nous concernait plus et c’est la jungle.
C’est comme ça que j’ai commencé ma discussion, c’est vraiment la jungle ! Les policiers contre nous euh voilà

– Envolée : Oui et puis ils vous traitent comme des animaux quoi…

C’est vraiment des animaux et là je parle même pas du lieu en lui-même ! En fait là ce qu’ils sont en train de faire sur un côté des cellules, à un mètre des cellules, ils sont en train de bâtir enfin, ils sont pas en train de bâtir, ils l’ont déjà bâtit, un mur de fer euh massif…
Vous voyez le mur en béton ben sauf que c’est vraiment en fer.

– Envolée : Genre y a plus de lumière y a plus de soleil ya plus rien ?

Au fait ce qu’il y a c’est qu’il y a plus de lumière naturelle qui rentre. Y a un effet lentille euh convergente qui est fait.

– Envolée : Oh vous devez avoir trop chaud…

Exactement, ça tappe sur le, sur le mur de fer et ça le réfléchit sur une seule zone dans le, dans la chambre, ça fait un effet micro-onde.
Et après la nuit ce qu’il se passe, c’est comme le fer il est chaud avec l’échange thermique, la nuit il fait un peu plus froid, et bien ça chauffe ! Ça chauffe, ça chauffe énormément !
Et ça, ça dure toute la journée, alors à part les cellules et le couloir ou on subit ça, y a la cour. Sauf que la cour, y a aucune cour ombragée ! Y a pas d’ombre dans les cours ! Ça veut dire que grosso-modo dans le centre de rétention de Lyon, c’est soit une cour qui n’est pas ombragée dans le contexte de la canicule ou tu es dans un habitat qui fait office de four quoi !

– Envolée : Mais toi t’es arrivé dans le contexte de la canicule pile en plus.

Exactement, et pas que pour moi. Y a des gens qui sont vraiment malades ! À qui on refuse le soin ! On leur refuse le soin ! On est tous en train de se gratter euh, de se gratter la peau monsieur. Vous voyez c’est euh, c’est grave !
Le monsieur qui est cassé, qu’on a cassé la main, un monsieur a été cassé de la main par les policier de la PAF ! c’est très grave tout ça !

– Envolée : Et qu’est-ce qui s’est passé ouais ? Comment ça s’est passé ?

Alors bah attendez il est devant moi. Ah en fait ce qu’il s’est passé c’est que il s’appelle Miled Qualifa, né le 9.9.1999, en fait il était sous médicaments, il était souffrant, il était sous médicament. Il dormait.
Et comme je vous ai dit tout à l’heure à 10h on fait l’évacuation donc il dormait, euh on lui a dit sans ménagement « bon tu te réveilLES ! », lui il dormait, il était dans un état de somnolence, il les a même pas entendu et bah là directement, deuxième, troisième fois on lui demande et la quatrième fois c’est coup de matraque à la main et il a été cassé emmené à l’hôpital avec plÂtre et puis et puis tout…

– Envolée : Tu euh… C’est une manière de réveiller les gens quoi !

Oui exactement c’est une des manières de réveiller les gens oui !

– Envolée : Mais ils sont fous ! Ouais pardon je fais des blagues qui sont peut-être pas bonnes mais des fois c’est notre manière de, parce qu’on en entend tellement des histoires qu’on a envie de casser des murs. C’est pas du tout pour minimiser en tous cas.

Ouais non mais je vous comprends, même nous on essaye de faire un petit peu des blagues pour euh détendre un p’tit peu l’atmosphère parce que autrement euh, autrement c’est très très grave, c’est insupportable !

Là en ce moment on est tous en train de se gratter la peau ! Y a des sauterelles qui rentre monsieur dans nos chambres, y a des puces ! Y a des insectes que j’avais jamais vus de toute ma vie.

– Envolée : Bah ouvrez un zoo, je suis désolé je continue sur les blagues.

Ouais c’est ç en fait, on se disait entre nous que dans quelque temps y aura des créatures qui vont apparaître. L’évolution des espèces et bien au CRA de Lyon les biologistes vont [passage inaudible].
Euh voilà euh, je sais pas franchement je sais pas.

On a écrit, au fait, la lettre qu’on a envoyée, tout le monde l’a signée ça veut dire que forcément y a un problème si tout un dépôt fait une grève de la faim et que tout le monde signe sur un papier ou on atteste de ce qu’on a attesté ça veut dire que c’est très grave et je peux vous dire aussi qu’on l’a envoyé à beaucoup d’institutions et beaucoup de groupes officiels :
On l’a envoyé au Ministère de l’intérieur, on l’a envoyé au Ministère de la justice, on l’a également envoyé à Matignon – parce que c’est de leur ressort aussi quelque part – on l’a également envoyé au Bâtonnier de la Cour de là ou on voit le Juge des Liberté et des Détentions histoire que le juge quand il décide de remettre 30 jours à quelqu’un ben qu’il sache un peu où il l’envoie.

Euh voilà on a envoyé à beaucoup de personnes, à la Ligue des Droits de l’Homme, à la Cour Européenne des Droits de l’Homme également parce que ben y a pas de respect des droits de l’Homme.

– Envolée : Vous avez fait aussi la contrôleuse générale des lieux de privation de liberté ? Le défenseur des droits ?

Ouais exactement, on a même pris en photo les lettres recommandées qui contenaient les documents voilà comme quoi ça prouve qu’on a bien fait les lettres et …

– Envolée : Et après juste pour reprendre là dessus, nous quand même enfin ce qu’on disait c’est que ce que vous vivez c’est ce que vivent les gens dans tous les CRA de France et que du coup cette lettre elle devrait partir de tous les CRA enfin dans le sens.
En fait c’est pas la rénovation du CRA de Lyon qu’il faut, on est d’accord, enfin c’est bien la fermeture de tous les CRA. Y a pas de bonne manière d’enfermer les gens.

Exactement, mais pour arriver à un résultat global à un moment donné faut partir du spécifique euh…

– Envolée : non c’est sûr, c’est sûr…

Et comment dire aussi, ce qu’ils ont fait parce que ça c’est très très important.
En fait ce qu’on a fait nous, c’est qu’on a fait grève de faim, on a également pris toutes nos cartes parce qu’il y a deux côtés, côté bleu et côté jaune, on a donné de notre propre plein gré ces cartes et on les a remis au policiers histoire de dire que voilà, on n’est pas des noms et des prénoms et des dossiers que vous traitez pour envoyer rapidement au pays d’origine pour exécuter les mesures d’éloignement : ON EST D’ABORD DES ÊTRES HUMAINS ! Qui même en attendant cette mesure d’éloignement, devraient être soit libres – c’est ce que l’on veut dans l’idéal – soit au moins traités comme des êtres humains. Euh comment vous dire…

– Envolée : C’est cool hein franchement refuser les cartes…

On a refusé les cartes et ce qu’il s’est passé c’est que on a voulu récupérer les cartes après parce qu’avec les cartes on récupère certaines choses dans nos bagages et pour les visites.
Mais ce qu’ils ont fait c’est qu’en fait en demandant les cartes ils nous ont dit « vous mangez, on vous donne les cartes ; vous mangez pas, on vous donne pas les cartes ».

– Envolée : Ils ont voulu vous interdire de visite ?

Ouais en fait, ils ont fait un chantage. Ils ont fait un chantage. Si vous mangez, on vous donne les cartes, et donc vous aurez, vous pourrez avoir des visites, si vous mangez pas, vous n’aurez pas de visites ! Et vous n’aurez pas accès à votre bagage, et même ce qui est très très grave, on ne vous donne pas de linge, de nouveau linge en fait, linge propre.
Et quand j’ai parlé aux policiers un petit peu, le chef qui sort un petit peu dans la cour, et ben il m’a dit : « C’est les consignes du directeur du CRA ».

– Envolée : Qui refuse de vous voir ?

Voilà cette même personne qui refuse de nous voir donne des consignes comme quoi pour donner les cartes qui nous confèrent d’autres droits et ben faut faire.

– Envolée : Faut arrêté de protester euh…

Exactement, donc moi qu’est-ce que je dis à la dame ? Je lui dit madame, ma carte qui me confère d’autres droits, je dois décider de ne pas jouir d’un droit. C’est à dire le fait de manger ou pas.
Et c’est exactement ça, je lui dis : « Est-ce que c’est logique ? », elle me dit « Nan, c’est les directives, c’est le directeur du centre de rétention de Lyon qui fait ça ».

Autre chose, la lettre que vous avez vue, hein que vous avez lue, ils me l’ont volée. Donc moi je ne sais pas depuis quand la France confisque enfin le système euh administratif ou pénitencier confisque un papier quoi

– Envolée : Depuis assez longtemps je crois.. Ouais c’est pas un truc qui arrive cette année quoi, enfin malheureusement comme dans les prisons, dans les centres de rétention, la volonté de l’État c’est qu’il n’y ait rien qui sorte. Que les seuls trucs qui sortent, c’est des communiqués mais après les communiqués bon [passage inaudible]. Du coup c’et hyper fort ce que vous avez fait et c’est hyper cool là que tu aies pris le temps de témoigner comme ça à la radio.
Nous l’émission elle va bientôt toucher à sa fin, on voulait savoir si y avait quelque chose que tu souhaitais rajouter ?

Euh oui bah ya en fait euh jsais pas, ya monsieur Taibi Omar, et surtout monsieur Mohamed Ali, monsieur Mohamed Ali surtout, surtout qui a besoin de soins. Et il peut pas rester dans cet état-là, parce qu’il fait trois, quatre crises par jour et c’est franchement euh, c’est invivable. C’est plus possible, on est des poules, on n’est pas des êtres humains et cette personne-là je redis son nom, Mohamed Ali il est dans un grave état de santé qui nécessite d’être hospitalisé !

– Envolée : Et on rappelle que quand l’État enferme en fait il est responsable de la santé des gens qu’il enferme et que déjà il n’avait qu’à pas enfermer les gens quoi ! Et qu’à un moment faut arrêter de se foutre de la gueule du monde. Et du coup c’est hyper grave et c’est hyper important d’avoir dit son nom à l’antenne. On rappelle qu’en ce moment il est en vie et que c’est de la faute de l’État que son état de santé se dégrade.

Je voulais juste préciser que cette personne-là, quand même, tenez vous bien, il a été dé-choqué trois fois, il était mort trois fois, avant d’arriver dans le centre de rétention ! Suite à sa chute qu’il a fait son cœur s’est arrêté de battre pendant trois fois et il y a des papiers qui prouvent ça. On l’a amené en déchoquage trois fois, enfin, c’est-à-dire que son cœur s’est arrêté trois fois à cette personne avant qu’on l’amène en centre de rétention.
Et il commence à manifester des symptômes qui sont quand même graves. Très très graves ! Surtout avec les antécédents qu’il a.. Et ils font toujours rien, y a même le médecin du CRA qui l’interdit de donner ce certificat-là pour pouvoir le présenter dans le tribunal alors qu’il a d’autres papiers, avant durant sa liberté qui prouvent qu’il est épileptique. Et le comble, le comble dans tout ça c’est qu’il lui donne le traitement d’épilepsie mais il veut pas lui donner l’attestation prouvant qu’il est épileptique.

– Envolée : Comme quoi ils se foutent bien ouvertement de la gueule des gens, ils jouent avec la vie des gens. Du coup, c’est très important de relayer, y a le site de l’Envolee.net où on va relayer votre lettre et continuer de relayer les informations.

Et aussi pour préciser qu’à cette date c’est vraiment la taule qui est en train de faire le truc et que toi par exemple tu as donné ton nom tout à l’heure, euh vues toutes les menaces qu’ils ont fait on rappelle que tu es en parfaite intégrité morale et physique et que voilà ils n’ont pas intérêt à te toucher en tous cas on sait exactement

Exactement parce que tout à l’heure je voudrais juste le redire, tout à l’heure ils voulaient m’emmener, ils allaient me tabasser hein. D’ailleurs tout le monde a protesté, ils ont crié et tout parce qu’ils savaient vraiment ce qui allait se passer. Ils savaient ce qui allait se passer, il y a surtout une personne qui m’a soutenue c’est Taibi Omar, il a crié, protesté : « Vous l’emmenez pas, vous l’emmenez pas ! ». Et on l’a tapé lui aussi.

– Envolée :Bon en tous cas toutes ces personnes sont en parfaite intégrité morale et physique et si y a des trucs qui se passent on saura que ça viendra de la part des keufs. »

Témoignage d’Omar prisonnier au CRA de Lyon Saint-Exupéry. Il témoigne de l’abandon total des soins médicaux au sein du CRA.

« " Moi je m’appelle TAIBI Omar, je suis né le 13 mars 87. En fait j’ai envie de témoigner sur un homme qui s’appelle Mouhamed Ali : je crois que vous avez entendu parler de lui.
Il vient de tomber encore dans une crise d’épilepsie. Et maintenant il l’ont pris avec.
Ils ont pris déjà beaucoup de temps pour venir interpréter mais ils l’ont pris avec et après quelques temps l’ambulance elle est venue ici alors ça veut dire c’est grave.

Ils l’ont pris avec alors j’ai pas pour l’instant mais s’il y a plus d’infos je vais vous nformer. Merci beaucoup. Voilà.

- Est-ce que tu veux raconter un peu comment ça se passe, comment ça s’est passé pour lui, ou même pour d’autres personnes le soin à l’intérieur du CRA ?

Le soin ici c’est vraiment grave parce que le médecin il lui donne un traitement mais il refuse de lui donner l’ordonnance qui dit que ce monsieur-là il est malade parce qu’ils veulent garder les gens ici comme ça . Parce que lui c’est pas quelqu’un qui peut rester ici quoi.
Il est malade ! Il ne peut pas rester ici ! Ils n’ont pas le droit de le mettre ici ! On sait jamais quand il va tomber et où il va tomber. C’est ça le plus pire !

Et… Le médecin ici il refuse de donner le certificat, ils veulent lui donner quand même le traitement quoi ! Alors lui il a refusé le traitement depuis trois jours pour contester ; il joue même avec sa santé et sa vie mais y a rien qui change quoi !

C’est toujours la même chose, y a rien qui a changé ! Toujours la même chose ! Voilà !

- Et du coup ils ont réagi comment, les keufs, quand il a encore fait sa crise d’épilepsie ?

En fait la quatrième fois aujourd’hui, là il y a quelques minutes. C’est un peu grave quoi ! Ils ont au moins, au moins cinq minutes, j’étais là en train de tenir sa tête et ils ont pris le temps quoi ! Ils prennent du temps.
On dirait qu’ils s’en foutent !
En plus ils sont venus et ils ont fait sortir tout le monde et ils ont fermé toutes les portes comme ça ils sont tout seul avec lui. Mais j’étais là moi ! J’ai regardé ! J’ai regardé tout ce qui s’est passé là !

- Et ils faisaient quoi ?

Y avait un seul pompier et ils étaient là en train de regarder. Ils n’ont même pas tenu ses pieds. C’est moi qui ai dit « tiens » [passage inaudible].
Et le pompier il tient sa tête et voilà y a rien quoi, il s’est passé rien d’autre.

- D’accord

Voilà

- Je sais pas si t’as envie d’en parler mais pour les autres personnes qui sont à l’intérieur du CRA comment ça se passe pour les soins ?

Le soin c’est la même chose ! Y en a un ici ça fait combien de temps, hey combien de temps ? Y a un mec ici son bras il est cassé ça fait 42 jours. Il ne le bouge même pas ! Il a 18 ans, ils ne le bougent même pas l’hôpital !
Ils l’ont envoyé une fois à l’hôpital, après ils l’ont ramené, la même chose, il a un truc comme ça là. Vous voyez je veux dire on le met sur le le cou pour tenir la main.
Le mec ça fait 42 jours qu’il est comme ça !

Ça c’est pas normal !

  • Il a une écharpe ?

Ouais ouais voilà, celui qu’on met sur l’épaule pour tenir là main là. Comment on appelle ça ? Je sais pas !
Et ils refusent même de le soigner !

Chaque jour lui il parle avec eux ! Même moi j’étais là parce que lui il parle pas français. Rien. Même moi j’ai fait ça pour lui. Pour parler avec eux.
Ils m’ont dit « ouais le monsieur il est un peu agressif.. ». Il l’est mais mais c’et pas le... C’est comme ça !
Voilà. C’est pas normal. C’est vraiment pas normal !

Le médecin je lui ai parlé moi-même. Je lui ai dit « Le monsieur je le connais depuis plus que 10 ans. Je sais comment il tombe ! Je sais [passage inaudible]. Je sais que c’est un mec malade. Donne-lui l’ordonnance ». Il m’a dit : « C’est moi le médecin, c’est pas toi ! »
Et voilà !

Ils refusent même de parler avec moi.
Même la femme qui travaille ici au poste de forum réfugiés là ! Elle a été dans son bureau de médecin. Elle a parlé avec lui pour lui donner l’ordonnance, il refuse toujours.
Les policiers ils ont témoigné devant le juge ! Dans le tribunal. Ils ont témoigné que ce monsieur-là, il est malade ! Le médecin il refuse toujours de lui donner l’ordonnance là, le certificat.

Mais il lui donne le traitement ! Ça j’ai pas compris.

Tu veux dire que les keufs même dans le tribunal ils ont dit qu’il est malade ?

Ouais ils ont témoigné, ils ont dit devant le juge « ce monsieur-là, il est tombé déjà trois fois ». C’est pas quelque chose pour rigoler ça ! Y a quelqu’un qui tombe devant toi trois fois alors ça veut dire qu’il est malade.
Et aujourd’hui la quatrième fois, jusqu’à aujourd’hui qu’ils l’ont pris... Je sais pas : est-ce qu’il l’ont pris à l’hôpital ou on…
Et alors l’ambulance elle est venue !
Vous voyez, et voilà quoi…
C’est tellement grave..
Le médecin ils s’en fout ! Les keufs ils s’en foutent ! La bouffe il y reste un jour ! C’est périmé, qu’il lui reste un jour quoi !

C’est grave franchement moi j’ai le sentiment d’être un animal ici ! Pas un être humain.
C’est trop trop, franchement c’est trop !

Moi j’ai peur que l’un ou l’autre il va se suicider ici, c’est pas normal !

Je sais pas quoi dire parce qu’il y a trop là t’as vu…

- Ouais ok. Estce que tu veux rajouter un truc ?

J’appelle tout le monde à faire quelque chose ! Qu’il vienne ici, qu’il regarde comment il est ce centre-là !
J’appelle tout le monde à nous aidere. On est quand même de êtres humains ! On n’ est pas des des des animaux !
Venez ! Venez ici avec vos caméras et regardez vous-mêmes ! C’est pas normal !

[passage inaudible] je sors et il a dit « moi je suis pas gardien de portes ». regardez la réponse qu’il m’a donné !

- Qui est-ce qui a dit ça ? Parce qu’on n’a pas entendu ?

Un policier ! Un policier !
J’avais les mains pleines parce que le monsieur Ali Mouhamed il a deux béquilles, il peut pas marcher tout seul. Moi je prends un pied, deux pieds, ça veut dire les deux mains elles sont pleines.
J’ai dit au policier « S’il vous plaît vous pouvez nous ouvrir la porte parce que le monsieur là il a [passage inaudible] ».
Il dit « Oui moi je suis pas portier »
Quelle réponse il nous donne ? Comment ils nous parlent !

- Est-ce qu’ils ont remis leur matricule aujourd’hui ?

Non ils l’ont enlevé ! J’ai regardé même maintenant ! J’ai regardé exprès ils l’ont enlevé. Ils l’ont pas toujours.

- Donc ça fait… 4 jours qu’ils n’ont plus leur matricule ?

Non ça fait depuis le deuxième jours de grève de faim : ils ont enlevé les numéros comme ça on peut pas matriculer chacun.
Je ne sais pas euh.. Il n’y a pas de numéro.
Ça veut dire qu’ils préparent quelque chose ou j’sais pas. Pourquoi ils enlèvent leur numéro de matricule ? Ils n’ont pas le droit. C’est interdit.

  • Tout à fait !

Mais ils le font quand même. Et si vous rentrez de l’intérieur, vous venez ici vous voyez les policiers qui travaillent là bas, vous voyez les policiers avec le numéro.

Mais c’est eux… Quand tu rentres ici, personne n’a le numéro. J’ai regardé exprès maintenant. Il y a une femme : elle n’a pas, regardez l’autre, il n’a pas. Ils ont des des des t-shirt bleu où on ne peut pas mettre le truc des numéros dessus. Vous voyez ?

Ça ils le font exprès. Ça c’est pas normal !

  • Et comment ça se passe, là en ce moment, entre vous ?

Entre nous maintenant il y a de temps en temps une bagarre, y a de temps en temps là… Toujours toujours, y a toujours ici des histoires. Ici il y a toujours quelqu’un qui fait quelque chose. Y a toujours quelqu’un qui est énervé. Y a toujours quelqu’un qui crie.
On passe notre temps à se bagarrer on va dire ici.
Y a rien à faire ! Y a rien du tout ! Même pas ping-pong : y a rien à faire !
On est comme des animaux dans une cage et voilà ! On nous a enfermé dans unr cage et voilà ! Voilà votre chambre, voilà la cage et débrouillez vous ente vous !
Si quelqu’un il tombe malade ou je ne sais pas moi il se passe une bagarre ils regardent d’abord biiiien dans les caméras et après tout calmement.
Après le bagarre c’est fini on va dire.

Ça c’est pas normal, normalement eux leur travail c’est d’intervenir tout de suite s’il se passe quelque chose mais moi je ne vois pas ça ! En fait moi je vais vous dire la vérité : ils s’en foutent de nous !

[passage inaudible] Tant qu’ils peuvent nous envoyer dans nos pays et voilà quoi.
On nr peut rien dire. On n’a pas le droit de rien dire.

C’est tout : je ne sais pas quoi dire.

Franchement moi j’ai jamais vu ça." »

Témoignages trouvés sur Rebellyon, crametoncra, L’Envolée->http://lenvolee.net/temoignages-des-prisonniers-en-lutte-du-cra-de-lyon-saint-exupery/], et abaslescra.

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