Premières gardes-à-vue pour participation à une manif sous l’état d’urgence

Suite à la manifestation interdite de soutien aux migrants de dimanche 22 novembre, la presse avait annoncé que 58 personnes avaient été identifiées par la préfecture de police et balancées au procureur. Mardi matin, un certain nombre de personnes ont reçu une lettre de convocation en audition libre.

Nouvelle assemblée en solidarité avec les migrants·es et les convoqués·es suite aux récentes gardes-à-vue, ce mercredi soir, à 19h au CICP, 21ter rue Voltaire, métro Rue des Boulets.
Au moins deux GAV au commissariat Riquet pour des personnes convoquées ont eu lieu Mercredi 25 novembre. Une personne déférée.

Un appel à ne pas se rendre à l’audition libre :

« Ce midi j’ai trouvé dans ma boîte aux lettres une feuille volante indiquant : »procès-verbal de convocation en vue d’une audition libre".

Il est précisé « que dans le cadre de l’enquête sus visée, (je suis) soupçonné d’avoir commis ou tenté de commettre l’infraction de violation d’une interdiction de manifestation prise en vertu de l’état d’urgence. »

Je suis convoqué cet après-midi au 27 boulevard bourdon, Paris 4e. Je ne vais pas m’y rendre ; et j’invite tous les gens concernés à en parler pour ne pas se retrouver seul face à cette situation et envisager une réponse collective (a priori 58 personnes identifiées selon la presse).

Salut à tous  

L’appel de l’AFA à se rendre devant le commissariat du 4e :

 »Suite à la mobilisation de dimanche, manifestation interdite qui s’est déroulée de Bastille à République, la presse nous indique que 58 personnes ont été identifiées par les caméras de la police.

Ce matin, plusieurs militantes et militants on été convoqués.

Nous proposons à celles et ceux qui le peuvent, de se rendre immédiatement devant le commissariat du 4 ème Arr (27, bd Bourdon 75004 Paris) pour soutenir un des convoqués.

Nous ne savons pas encore qui sont les autres ni, de fait, où ils sont convoqués.

Ne les laissons pas seul.e.s."

L’audition libre c’est quoi ?

L’« audition libre » (art. 61-1 du CPP)

Un statut intermédiaire entre celui de témoin et celui de gardé à vue a été créé en 2014. Une personne « à l’égard de laquelle il existe des raisons plausibles de soupçonner qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction » peut être entendue « librement », c’est-à-dire sans être placée en garde à vue . Cependant, cette audition n’est pas possible si la personne a été amenée « sous contrainte » devant l’officier de police judiciaire.

La convocation au commissariat

En principe, si les flics veulent entendre une personne qu’ils suspectent, ils doivent en préciser le motif. L’article 61-1 du CPP précise en effet que « si le déroulement de l’enquête le permet », la convocation doit indiquer « l’infraction » pour laquelle la personne est soupçonnée ainsi que « son droit d’être assistée par un avocat ainsi que les conditions d’accès à l’aide juridictionnelle, les modalités de désignation d’un avocat d’office et les lieux où elle peut obtenir des conseils juridiques avant cette audition ».
Dans les faits, une circulaire du 23 mai 2014 ajoute que si ces informations risquent d’inciter le suspect à prendre la fuite, à faire pression sur des témoins ou à détruire des preuves, il n’est pas obligatoire de les mentionner sur la convocation. Or l’enjeu, pour les flics, est de commencer à interroger une personne sans que celle-ci sache pourquoi, de manière à pouvoir la piéger plus facilement. Il y a donc toutes les chances pour que beaucoup de convocations se contentent de la formule habituelle, qui dit que la personne est convoquée « pour affaire (la) concernant ».
Dans ce cas encore, il n’y a pas de sanction pour n’avoir pas répondu à la convocation, mais les flics peuvent venir chercher la personne suspectée, et dans ce cas il ne pourra en principe pas s’agir d’une audition libre.

Le déroulement

Pour une audition libre, les flics doivent procéder à certaines formalités et en particulier doivent informer la personne :

  • de « la qualification, de la date et du lieu présumés de l’infraction qu’elle est soupçonnée d’avoir commise ou tenté de commettre » ;
  • de son droit de quitter les locaux de police à tout moment ;
  • du droit d’être assistée par un interprète ;
  • du droit de faire des déclarations, de répondre aux questions qui lui sont posées ou de se taire ;
  • si l’infraction pour laquelle elle est entendue est puni d’une peine d’emprisonnement, du droit d’être assistée au cours de son audition ou de sa confrontation par un avocat choisi par elle ou, à sa demande, désigné d’office par le bâtonnier de l’ordre des avocats ; elle peut accepter de se passer d’avocat ;
  • de la possibilité de bénéficier de conseils juridiques dans une « structure d’accès au droit ».

On voit qu’en principe la personne peut quitter le commissariat quand elle le veut puisque aucune mesure de contrainte ne pèse sur elle. Dans les faits, bien entendu, cette liberté n’est que théorique : si la personne a la velléité de partir, il suffit au flic de la placer formellement en garde à vue. L’audition libre n’est en fait qu’un moyen, pour les flics, d’alléger la paperasse que leur demande une garde à vue.
[...]
Dans les faits, quel que soit le régime sous lequel on est entendu (témoin, audition libre ou garde à vue), il est souvent préférable de ne pas répondre aux questions qui sont posées.
source : FACE A LA POLICE/ FACE A LA JUSTICE, 2e édition du guide d’autodéfense juridique, par CADECOL, prochainement en libre accès sur internet ou sortie en livre prévue en janvier 2015 chez Syllepse.

Mots-clefs : répression | migrants
Localisation : Paris

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