Le mouvement des aârch s’est cristallisé autour de la création de comités populaires qui, en privilégiant la forme insurrectionnelle émeutière, un mode d’organisation autonome et la démocratie directe, ont tenté d’évincer tous les représentants de l’État des communes et villages où ils étaient implantés. Le printemps 2001 a été marqué par la multiplication d’actes d’intimidation à l’égard des représentants de l’ordre : incendies de casernes, batailles rangées contre les flics et les militaires, attaques quotidiennes de commissariat, chasse aux ministres et grèves. La principale revendication des comités était le départ sans délai (et sans remplacement) des forces de gendarmerie de Kabylie et de toutes les zones insurgées où les comités de quartier et de villages exerçaient leur pouvoir.
Vous trouverez ci-dessous un extrait issu d’une brochure réalisée à l’occasion de l’anniversaire du printemps de 2001, suivi de la brochure elle-même.
De l’État colonial à la bureaucratie d’État du FLN, c’est l’État qui reste le problème de sa population
"La présence de l’État est synonyme de néant en Algérie, comme dans tous les pays asservis où il règne en article d’exportation de la politique bourgeoise des pays impérialistes. Partout, à chaque moment, tout Algérien apprend à s’en passer : la hogra signe son action, et c’est dans l’antagonisme absolu que les interactions sociales et politiques avec l’État sont vécues dans leur intégralité. La hogra signe la séparation absolue des intérêts du peuple avec ceux de l’État ; l’arbitraire ne l’est pas forcément, c’est simplement la compréhension qu’on peut avoir, depuis une position d’opprimé, sur l’antagonisme sur lequel il repose.
L’incompréhension qu’a suscité 2001 au sein de la gauche française s’explique sans doute par l’incapacité de celle-ci à visualiser une lutte politique concrète fondée sur une critique générale et radicalement négative de l’État et de l’ambiance d’une société. Une lutte sans concession, qui trouve dans la destruction des nuisances et de l’État qui les coordonnent une base pour une politique révolutionnaire, reste particulièrement opaque pour un militant d’une démocratie marchande qui célèbrent la gestion low-cost de son existence par l’État, à grands coups de slogans sur la beauté du service public et la « solidarité » qu’il suggère, faute d’en connaître le principe (comme si une solidarité pouvait être monnayée et fondée sur une inconscience générale dans ses suites ou dans la représentation abstraite et morale de celles-ci). Rien n’est plus difficile à comprendre et, par conséquent, plus facile à critiquer ou à rationaliser à sa sauce, une situation insurrectionnelle où ses acteurs sont clairs avec eux-mêmes, et où aucun aspect du détestable ne prévaut sur un autre. Les Algériens vomissent leur vie toute entière : en 63, en 80, en 88, puis en 2001."