C’est la guerre... Position internationaliste contre la guerre en Ukraine

Guerre aux palais, paix aux chaumières : une position internationaliste contre la guerre en Ukraine, par le Collectif prolétarien pour la grève générale illimitée

Les chiens sont lâchés, la guerre est déclarée. La xénophobie et le nationalisme se déchaînent. « Sus à l’ennemi ! », cette clameur guerrière envahit tout. Là-bas l’ennemi c’est l’Ukrainien, ce prétendu nazi ; ici c’est le Russe, qu’on assimile à Poutine, et dont on prétend éradiquer la culture, effacer les traces, interdire les œuvres : à la dénazification répond la dérussification. La bêtise épaisse et haineuse envahit les médias, le chauvinisme est à l’honneur et chacun vante son camp et diabolise le camp d’en face. La grande Russie contre l’Otan, nous sommes sommés de choisir : comme si on pouvait guérir la peste par le choléra et comme si l’Otan ne faisait justement pas partie du problème et non de la solution ! Comme si la course aux armements, bien loin de prévenir la guerre, n’en renforçait pas encore la probabilité !

Car, en réalité, quel est le tableau qui s’offre à nous ?

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À l’Est, un régime russe affaibli, en retrait, qui, après la chute d’une URSS sortie vaincue et dépecée de la guerre froide, tente de se refaire une santé au détriment de ses voisins et en envoyant ses troupes ou ses supplétifs participer à des affrontements impérialistes dans des pays comme la Syrie, la Libye, le Mali ou la Centrafrique. Une puissance militaire à bout de souffle, qui n’a pas les moyens matériels pour maintenir une occupation à long terme dans un pays comme l’Ukraine, et dont les ressources sont de plus rongées par la corruption endémique qui frappe l’ensemble de l’économie de ce pays, comme de la plupart des pays issus du bloc soviétique, y compris l’Ukraine.

Car ceux qui ont fait la révolution de 1917, les paysans et les ouvriers russes et ukrainiens, se sont vus volés deux fois : une première fois par la dictature bolchévique qui leur a arraché leurs terres et leurs usines et les a privés de tout pouvoir politique et une seconde fois, après la chute du mur, par des oligarques issus de l’ancienne classe dirigeante soviétique qui, avec l’aide de rapaces européens ou américains, les ont dépouillés de leurs biens et de leurs salaires. Aux millions de morts du stalinisme sont venus s’ajouter les millions d’années de vies perdues de tous ceux qui ont subi de plein fouet la « thérapie de choc » des années 90. Au nom des lois de fer de l’histoire ou de l’économie, de la « nécessaire » industrialisation et des réformes « inéluctables », c’est à une dépossession continue et à une exploitation permanente qu’ont été soumis les travailleurs. C’est ainsi qu’en Russie l’ultra-libéralisme est le fils chéri du stalinisme et que Poutine est son produit.

En effet, celui qui est arrivé au pouvoir à la fin des années 90 et qui a prétendu redonner le pouvoir au peuple en l’arrachant aux oligarques et en redressant son pays, n’est en réalité que l’oligarque en chef de la grande Russie, n’ayant mis au pas les oligarques de l’ère Eltsine que pour mieux s’approprier leurs richesses et les partager avec ses hommes liges, et non pas pour les redistribuer. Le régime kleptocratique russe, incapable de faire revivre la puissance industrielle de son pays, cherche depuis lors à dissimuler ses échecs derrière une rhétorique nationaliste qui lui est commune avec tous les pays issus de l’ancien bloc de l’Est. En Russie c’est la nostalgie de l’URSS et du tsarisme qui est censée faire oublier les misères du présent, comme si l’on pouvait faire tourner en arrière la roue de l’histoire. La vérité est que l’URSS et l’empire des tsars sont morts à jamais : on ne fera pas revivre ce qui est détruit.

Car, en réalité, l’empire soviétique, prison des peuples et des classes, a été remplacé par une myriade de nationalismes, la mafia a remplacé le parti unique et les oligarques se partagent le gâteau partout, en Russie comme en Ukraine, au Kazakhstan comme en Géorgie. C’est ainsi qu’en Ukraine, comme en Russie, le nationalisme est le moyen qu’ont trouvé les oligarques pour conserver le pouvoir et pour perpétuer la corruption et le pillage de leur pays. Les soulèvements de 2013-2014, dirigés notamment contre la corruption et la misère, ont été détournés par des milices néo-fascistes qui, s’érigeant en protectrices de la nation, dominent depuis lors la politique extraparlementaire et contrôlent la rue, entretenant la guerre de tous contre tous tout en laissant le pouvoir des oligarques intact. Ici, ou en tout cas dans l’Ouest du pays, ce n’est pas le « rêve » soviétique qui sert à bercer les pauvres (l’Ukraine est le pays le plus pauvre de l’Europe) et à leur faire oublier leur exploitation, c’est le mirage européen et l’OTAN qui sont censés apporter paix et prospérité à un pays ravagé par le capitalisme.

Les illusions des populations issues de l’ancien bloc de l’Est sont évidemment savamment entretenues par les instances européennes et atlantistes. Car, à l’Ouest justement, le désarroi et le malheur de ces peuples ravagés par les guerres et les conflits nationalistes font les affaires de beaucoup de monde. Dans sa banale réalité l’Europe ultralibérale, l’Europe du Capital, celle du pillage de la Grèce ou des réformes « structurelles », ne fait plus rêver grand monde, du moins parmi ceux qui y vivent : à trop s’approcher du mirage il finit par s’évanouir. Seuls les fantasmes de ceux qui aspirent à y rentrer permettent de lui redonner quelque consistance.

De même l’OTAN, cette alliance militaire dominée par les États-Unis, laisse derrière elle une longue traînée de sang, de massacres et de guerres. C’est en effet cette même alliance, prétendument pacifique et défensive, qui, au nom de la lutte contre le péril communiste, a soutenu des dictatures sanguinaires en Grèce ou en Turquie, et qui a participé à la campagne de terreur contre l’Italie dans les années 70, sans parler de sa participation à la guerre en Yougoslavie. C’est l’OTAN qui est le principal vecteur de la course aux armements en Europe et dont l’expansion permanente en direction de l’Est après la chute du mur a alimenté le nationalisme russe et contribué à dresser les uns contre les autres les peuples issus de l’ancien bloc soviétique.

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La vérité c’est qu’à l’Est comme à l’Ouest cette guerre arrange tout le monde ou plutôt toute l’immonde cohue des exploiteurs, des marchands d’armes et des vendeurs de morts. Le soleil brille en effet sur les affaires, sur le nucléaire, sur la guerre. La course aux armements est relancée, les budgets militaires explosent et le nucléaire, y compris militaire, est de nouveau au goût du jour. Alors même que l’invasion russe de l’Ukraine nous a clairement démontré que la présence de centrales nucléaire sur le sol de pays en guerre constituait une menace pour la vie et la survie de millions de personnes, certains, comme en Allemagne, n’ont rien trouvé de mieux que de relancer le nucléaire et d’exposer ainsi toujours plus lourdement des peuples entiers à la menace de l’holocauste atomique. Hier comme aujourd’hui, l’ennemi, décidément, est dans nos propres pays.

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Pour guérir du poison autocratique et de la peste nationaliste, en finir avec la corruption, la soumission et la dépendance, avec les oligarques comme avec l’exploitation, le prolétariat mondial, à commencer par les prolétariats russe et ukrainien, doit réapprendre à lutter et sortir de sa passivité. Il n’est, plus que jamais, pas de sauveur suprême, ni dieu ni tsar ni Otan. Travailleurs, prolétaires, sauvons-nous nous-mêmes, n’attendons plus rien, ni de l’État, ni de l’armée, ni de personne !

Prolétaires de tous les pays, unissez-vous !
Nationalistes de tous les pays, suicidez-vous ! (on vous y aidera au besoin)

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