Nous avons beaucoup discuté de la forme que nous voulions donner à ce compte-rendu et aucune ne nous a convenu. Parce que reformuler, c’est déjà intervenir sur le fond. C’est pourquoi nous faisons le choix de livrer une parole « brute » qui ne gomme pas nos différents points de vue, parfois contradictoires. Inventer une pensée collective qui ne fait pas l’impasse sur nos conflictualités, c’est dire qu’il est possible – essentiel – de les surmonter, pour pouvoir se retrouver ensemble et lutter contre le passe sanitaire et toute la techno-surveillance qu’on nous impose. D’autres comptes-rendus provisoires suivront car il manque encore des prises de paroles, des compléments et des notes. Mais il nous paraît urgent de ne plus attendre pour diffuser en l’état les interventions que nous avons eues ce soir-là, où nous nous sommes retrouvé.es à plus de 120 participant.es. (Lire l’appel de cette réunion ici)
- Introduction par la Quadrature du net : Lutter contre le passe comme un des instruments de la techno-police. Extension permanente du domaine de la surveillance. Séparer, catégoriser les gens pour mieux les contrôler. Le passe s’inscrit dans la longue restriction des libertés fondamentales, dont celle de circuler, qui frappe essentiellement les sans-papiers. Là, c’est étendu à d’autres catégories de populations. Le passe n’a rien de sanitaire mais tout de sécuritaire.
- un syndicaliste SUD-commerce : de nombreux magasins ou chaînes de supermarchés font pression pour contraindre le personnel à la vaccination alors que ce n’est pas obligatoire. Son syndicat défend beaucoup de gens qui sont mis à pied abusivement. Son syndicat reste ouvert à toute réclamation et/ou revendication pour construire le rapport de force.
- une personne qui intervient dans les CRA : prison ferme pour refus de test covid en CRA !
Plusieurs projets de construction de nouveaux CRA. - un GJ de Pantin. En Guadeloupe : répression coloniale en cours mais déclenchement de la grève générale !
- une bibliothécaire : bibliothèques, établissements de loisir, passe à partir de 12 ans. L’accès inconditionnel est violé, les bibliothécaires sont transformé.es en contrôleur et contrôleuse de passe. 1er décembre : appel à tou.tes pour se mobiliser contre cette discrimination. Pas de passe à l’université par contre, c’est illogique. Plein de grèves en biblio mais peu de relais dans les médias. Menaces de sanctions contre les agent.es. Perte des publics les plus fragiles.
- une GJ de Belleville : il faut forcer les dirigeants des organisations syndicales à prendre leurs responsabilités, à sortir de leur bureau, à se positionner contre le passe ! C’est ce qu’iels ont fait au bureau de la CGT de Montreuil – Trop facile de dire, je ne descends pas dans la rue parce que trop de fachos y sont.
Au début du mouvement, au cœur de l’été, des milliers de personnes sont descendues dans la rue, ces personnes n’étaient évidemment pas toutes des fachos ! - une personne de l’hôpital Debré, APHP : 500 soignant.es suspendu.es. Comment reprend-on la rue samedi qui vient ? Avec de bons slogans pour que les suspendu.es de l’APHP et tou.tes les autres descendent dans la rue !
- une personne du Louvre témoigne du fait que la CGT et l’intersyndicale nationale condamnent toute manif car présence de l’extrême droite. Il le déplore. Il évoque la manif syndicale du 5 octobre qui comptait peu de monde, cette manif était triste à mourir... Argument malhonnête des dirigeants syndicaux. Si l’extrême droite occupe la rue, raison de plus pour l’occuper davantage. Non à l’absentéisme ! Beaucoup de gens dans la rue, qui n’y descendaient pas forcément avant. À nous d’aller discuter avec elles et eux, de porter et d’afficher des revendications exprimées dans la langue des opprimé.es et non pas dans celle des possédant.es et des fachos.
- une enseignante : refus des sorties scolaires soumises à l’obligation de présenter un passe : musées, ciné, théâtres, ce n’est pas son boulot de vérifier et c’est discriminant pour les parents... Deux sur quinze, dans son école, ont refusé l’usage du passe. Du coup, mise en place de projets avec des artistes qui viennent dans l’école. On peut, il faut résister !
- Restrictions des libertés, cela est en cours depuis longtemps, un niveau est néanmoins franchi avec le passe. En effet, le passe fait ressurgir le flic qui est dans notre cerveau, la société de contrôle de tou.tes contre tou.tes.
L’enjeu pour le pouvoir est de savoir jusqu’où nous allons accepter de surveiller, contrôler les autres, comme les bibliothécaires y sont contraint.es. - une infirmière scolaire en collège : je suis sommée de faire de la propagande pour le vaccin depuis la rentrée. Infirmières et médecins scolaires sont les seul.es à l’école soumis.es à l’obligation vaccinale.
- Dans les DOM-TOM, en Italie les gens font bloc, pourquoi pas nous ? Tout le monde semble rentrer dans la combine du passe, on n’arrive pas à lever la chape de plomb ! L’intervenant propose une grève de la consommation à Noël.
- un GJ de Villejuif : pourquoi la gauche se bouche-t-elle le nez et les yeux ? Les forces de gauche doivent se mobiliser !
- un autre intervenant : L’absence de la gauche laisse la place à l’extrême droite ! Ils ont une large responsabilité dans cet état de fait : la rue est de plus en plus occupée par les fachos. La gauche libérale veut casser les luttes sociales pour son agenda politique. Les forces de la vraie gauche doivent occuper le terrain.
- l’intervenant de la Quadrature du Net : ne nous y trompons pas : Philippot défend le monde induit par le passe, il faut bien le comprendre. Il a retourné sa veste par opportunisme lorsque le passe a été introduit. Les fachos ne sont pas contre le passe ! D’ailleurs les keufs épargnent les manifs de Philippot. Pas étonnant puisque les fachos sont pour la police, la techno surveillance, les prisons, les frontières ! Ils ne sortent dans la rue que parce que cette fois, l’objet de contrôle les contrôle elleux aussi, et plus seulement les étranger-es ou les pauvres. Il faut des manifs anti fascistes ! Il ajoute que la dernière grosse manif, contre la loi sécurité globale a permis, en partie, de gagner.
- un autre intervenant : présence de caméras partout à Paris, la reconnaissance faciale c’est pour demain, il suffit d’un logiciel pour la mettre en œuvre. Les gens ne veulent pas le voir. Il faudrait que tout le monde se réveille.
- une enseignante : c’est la peur qui nous tient en ce moment et qui nous empêche d’agir. Il faut dépasser cette peur qui nous paralyse. L’urgence : nous rassembler par-delà les clivages, sans l’extrême droite évidemment.
- Usage répressif de la technologie au niveau international. Il faut un socle idéologique minimum.
- un avocat du droit des étrangers : Le passe met en place des restrictions jamais vues. La question de l’égalité est en souffrance car mise en place de statuts différenciés. De plus : l’arbitraire policier est renforcé car il ne s’agit pas de lois, mais de décrets, de directives, etc. On habitue la population à vivre avec des statuts différenciés totalement arbitraires. Cela est très grave et c’est le but. Il faudrait aussi mener une campagne en liant les problématiques de la libre circulation des sans-papiers à celle du passe, qui restreint les libertés de circulation en soumettant les déplacements à la présentation d’un passe.
- une personne : l’épidémie bien réelle est utilisée comme une matraque sanitaire. Scandale des tests payants, moyen de pression contre les irréductibles qui sont soi-disant un danger pour tout le monde. Or c’est ce test payant qui est en fait un danger général bien réel, en effet les gens infectés, qui n’ont pas d’argent, ne se font pas tester et contaminent. Il faut dénoncer l’hypocrisie du gouvernement.
- une personne intervient et parle de Ré-info-Covid. Elle se fait alors couper la parole et il n’est pas trop possible de connaître la fin de son intervention.
- une intervenante : il faut sortir des réseaux sociaux, cette réunion et les échanges réels auxquels elle donne lieu, ici et maintenant, sont bien plus roboratifs que le distanciel.
- une proposition de faire la jonction entre les manifs et le monde du travail, là où il y a des résistances, en bibliothèques par exemple.
- une personne exprime le fait qu’elle va aux manifs de Philippot car elle ne supporte plus les gaz, les violences policières et les nasses mobiles. Pour autant elle n’est pas d’accord avec Philippot et ne se définit pas comme facho.
- une enseignante remarque que les personnes en situation irrégulière, des parents d’élèves en l’occurrence, n’ont pas la possibilité d’avoir un passe et se retrouvent totalement isolées. Dans leur école, elles et ils ont décidé avec la bibliothèque du quartier de sortir les livres sur le trottoir, pour des temps de prêts et de lectures communes, sans avoir à demander le passe. Faire du lien avec les gens et ne pas participer à la division. Occuper la rue !
- Exemple d’un village en France (Saint-Antonin-Noble-Val) où un rapport de forces aurait réussi : si un café reçoit un procès verbal car il ne contrôle pas le passe sanitaire, tous les cafés dans le réseau ferment. Les cafés dans le réseau affichent un macaron disant qu’ils respectent le secret médical, etc.
- Le passe sanitaire en Espagne a été jugé illégal. Il nous faudrait plus de précisions.
- une autre enseignante : quelques propos complotistes ou confusionnistes ce soir. À déplorer ? Oui bien sûr mais c’est toujours mieux de s’écouter et d’argumenter que de s’insulter ou de renoncer aux débats de fond. Tous les confusionnistes ne sont pas des fascistes. J’en sais quelque chose avec mes élèves de lycée qui sont, pour beaucoup d’entre elles et eux, confusionnistes et complotistes, mais on discute, je ne refuse pas de débattre.
- un intervenant fait le parallèle avec la lutte contre le compteur Linky, dont il estime qu’on pourrait-devrait s’inspirer. Il explique également en quoi le passe n’est pas sanitaire mais bel et bien sécuritaire, puisqu’il est admis qu’aucun vaccin ne protège vraiment de la contamination, ni le ou la vacciné·e ni son entourage. D’où la nécessité des gestes-barrière qui restent en vigueur, bien que la majorité de la population soit maintenant vaccinée. Il donne pour preuve un foyer de contamination ‘cluster’, dans lequel tou·tes les contaminé·es étaient vacciné·es et tou·tes les non-vacciné·es ont été épargné·es. Quelqu’une à l’autre bout de la salle avait connaissance d’un cas semblable.
- à partir du moment où on comprend que c’est un passe sécuritaire et pas un passe sanitaire, cela impose un changement des acteurs à cibler. Cela montre qu’on a compris.
- un intervenant affirme catégoriquement que nous ne défilerons jamais avec, encore moins derrière, des mots d’ordre fascistes, racistes, anti-immigration ou homophobes. Mouvement d’approbation dans la salle, tant ça semble les bases sur lesquelles il faut à la fois refuser de se taire et poursuivre cette mobilisation.
- une intervenante : ça couve, il faut maintenant que ça explose !
A NOUS DE REPRENDRE LA RUE !
En résumé :
1 / Réflexions :
- refus de la servitude volontaire ; articuler nos actions autour de la liberté de circulation en lien avec les mouvements des sans-papiers ; dénoncer la mise en place croissante de statuts différents qui nous opposent et nous divisent.
2 / Actions :
- participer aux actions contre les CRA ;
- participer aux manifs contre le passe sanitaire (voir l’Agenda Militant Indépendant : https://www.agendamilitant.org/) ;
- pétition nationale contre le passe / Appel à la désobéissance civile / Dénoncer les tests payants / blocages ciblés ;
- coordinations locales autour des résistances / Relayer les infos : la grève en Guadeloupe…
- Organiser des AG régulières contre le passe...
NB : un collectif s’est constitué pour reproduire ces réunions régulièrement (comme ce fut le cas courant décembre), contact mail : nonsecuritaire (AT) gmail.com