Sur la sécurite privé pour la marche du 19 mars 2017 : un recul sans précédent
Pour mémoire, il faut rappeller que cette Marche fût lancée initialement dans le cadre de « Journées Internationales contre les violences d’État », à la suite de l’appel de Poitiers de 2009, avec pour objectif de rendre visible les luttes des familles. Une première édition en mars 2010, impulsée par des Comités contre les violences policières, autour de « Vies Volées » le collectif des familles victimes de crimes policiers et des morts suspectes entre les mains de l’administration Pénitentiaire (matons). Un collectif impulsé par la sœur de Lamine Dieng.
Il existe pour nombre d’entre nous un désaccord profond avec la ligne portée par l’UNPA et le PIR, dans le cadre de l’organisation de l’édition 2017. Notamment sur la question du recours à une entreprise de sécurité privée pour encadrer la journée, cortèges et concerts. Lors de la réunion du 08/03/2017, Omar Slaouati a affirmé que c’est la famille de Théo Luhaka, suite à une discussion avec Amal Bentounsi, qui aurait exigé, comme condition sine qua non à sa participation à la Marche, la présence de vigiles dans le carré de tête de la Marche.
Comment peut-on s’autoriser à dépenser de l’argent constitué à partir des donations populaires, dans des faux frais de vigiles privés, pendant que des familles, en plus de la paupérisation de leur quotidien, manquent cruellement de soutiens financiers pour les frais de justice ? Et pourquoi est-ce qu’une entreprise de sécurité privée est-elle apparue comme la seule solution aux craintes exprimées par la famille de Théo ? Comment a-t-on exposé le problème à ces généreux donateurs ? Comment leur a-t-on parlé de la pseudo nécessité d’une entreprise de sécurité privée ? Comment leur a-t-on dit que la manifestation allait être privatisée ? A-t-on précisé à tous les manifestants venus de toute la France ou d’ailleurs qu’ils participeraient à cette manifestation vigilisées grâce à l’argent de la caisse de solidarité constituée pour les victimes des violences d’État.
De quel genre de schizophrénie politique le PIR est-il le nom pour que dans une marche qui dénonce le système sécuritaire, nous fassions appel à un service privé de sécurité ? Ce qui risque d’ailleurs très certainement de créer un précédent avec la préfecture, qui pourra dorénavant exiger de nous un tel investissement, comme ça a failli être le cas à Clermont-Ferrand, où le collectif Vérité et justice pour Wissam a refusé de faire appel à un service de sécurité privé.
Avoir Théo Luhaka en tête de cortège ne doit être ni le prétexte pour l’entourer de vigiles, ni se faire au détriment d’une cohérence que nous recherchons entre les paroles et les actes. Au demeurant, si cette exigence sécuritaire, que Théo aurait posé, n’était pas amenée à être révisée par lui-même, nous serions prêts à nous passer de lui, continuant de le soutenir pour la vérité et la justice, contre les violences dont il a été victime, sans pour autant lui céder dans nos désaccords d’organisation.
Nous mettons une autre cagnotte en ligne pour répondre aux militants qui refusent catégoriquement de financer un service de sécurité privée. Car comme il a été rappelé par Vies Volées lors de la réunion du 01/03/2016, l’administration pénitentiaire, elle aussi, fait déjà appel à la sécurité privée en plus des matons fonctionnaires.
Nous souhaitons marquer notre désaccord politique autour de cette décision, sur laquelle trop peu de familles ont été consultées. Que le PIR selon lui même soit en très bonne entente avec cette entreprise de sécurité, depuis 2015, ne change rien à l’affaire.
L’argent de cette deuxième cagnotte https://www.lepotcommun.fr/pot/ldoklilg servira aux frais de la marche, mais jamais au règlement des salaires des vigiles ; s’il reste de cet argent, il sera redistribué aux familles les plus précarisés et devant faire face aux frais de justice.
Nous proposons un rendez-vous aux familles des crimes policiers et des morts suspectes en détention le mardi 20 mars à 20h00 (avec Skype pour ceux et celles qui ne pourront pas se déplacer) afin de discuter de tout cela.
Nous réaffirmons notre attachement à continuer de construire nos luttes avec UNPA qui restera notre amie malgré nos désaccords, car la nécessité de créer une force commune au sein des familles et leur soutien est importante. Mais pas à n’importe quel prix et en adoptant une ligne politique claire. C’est dans ce sens que nous produisons ce texte car nombre de militants ont besoin d’une grille de lecture pour comprendre nos stratégies politiques respectives.
En ce qui nous concerne, nos revendications restent inchangées : nous souhaitons changer de système en profondeur en réclamant que cesse les violences policières avec ces techniques d’interpellations meurtrières et un désarmement total de la police pour en finir avec des « forces de l’ordre » au service d’un système raciste et fascisant qui nous opprime et nous brime au quotidien.
Dans l’attente de ce changement en profondeur, nous aurions besoin d’une juridiction populaire et réellement indépendante pour mener des enquêtes impartiales sur ceux qui sont morts entre les mains de la police et les morts plus que suspectes des prisonniers, et non une « police des polices » qui dépend du même employeur que celle qui est mise en cause. La récente loi qui facilite la « présomption de légitime de défense » des policiers doit être abrogée car elle représente un recul sans précédent faite par le Pouvoir Socialiste.
Rappel du lien vers la cagnotte en ligne : https://www.lepotcommun.fr/pot/ldoklilg
E-mail : viesvolees.france@gmail.com