Salut Charlie !
J’ai appris récemment qu’un concert de Johnny Halliday allait être donné en ton honneur, le 10 janvier exactement, sur la place de la République. Tout d’abord, excellent choix, monsieur est fin connaisseur.
Johnny est la figure par excellence du grand séducteur français.
Il aurait très facilement sa place dans le panthéon du grand esprit français, parmi les irrévérencieux Coluche (chantre du respect de l’autre), WolinskY (l’homme qui parlait à l’oreille des femmes), Tonton Bernier (au fait, tu sais d’où vient le nom d’Hara Kiri ? Une belle histoire d’amour vietnamienne, paraît-il…), Jean-François Kahn (contre la pensée unique et grand véhicule de l’ouverture vers l’autre, garant de la pluralité des opinions... tant qu’elles sont patriotes, réacs, républicaines et sécuritaires), Philippe Val (le patron français éclairé par excellence, défenseur des arts), et tant d’autres. Ceux qui osent défier la pensée unique, les boute-en-train téméraires qu’on écoute au petit matin brun sur Rire & Chanson, entre Johnny justement et Pagny, ou sur RTL, en trempant la tartine de rillettes dans le bol de pinard tiède, un Slip français dédicacé par Montebourg remonté jusqu’aux oreilles.
Ah que, on les aime, on s’en fera l’écho tout au long de la journée. « Ben alors, t’as pas trouvé pas ça drôle ? bah quoi, l’humour français, quoi, la gaudriole ! on se fend la poire, on s’marre ! soit pas rabat-joie ! »
Cependant, il y a comme une ombre au tableau qui ne va pas cadrer pour ton grand raout. Pour que le spectacle soit parfait, il faudrait qu’il n’y ait plus toutes ses satanées tentes de réfugiés (leur domicile, eh ouais…), et surtout leurs occupants, trônant au beau milieu de la place rénovée, aujourd’hui joyau architectural qui permet à tout moment aux chars d’y défiler, même quand c’est pas le 14 juillet.
Alors, du coup, vient dans mon esprit torturé toute une série de questions (très rhétoriques, je dois l’admettre), comme :
- dans quel mesure serais-tu prêt à te compromettre avec le préfet Cadot pour que la fête soit réussie ?
- Vas-tu demander à ce qu’il pousse les réfugiés dans le métro (et les tentes dans la benne), comme il a su si bien le faire jusqu’à présent ?
- Es-tu prêt à t’associer à ça, toi, la grande-gueule-mais-qui-a-le-cœur-sur-la-main ?
- Ou préfères-tu l’autre solution « Cadot », qui consiste à ne « mettre à l’abri » qu’une partie des réfugiés (un peu comme si Libé, qui a ses fenêtres sur Répu, n’avait pris qu’une partie de tes journaleux dans ses locaux) pour les mettre dans des centres où de toute façon ils seront très mal traités ?
- Quel bon tour espiègle préféreras-tu pour que l’on puisse entendre les trémolos de voix de notre trésor national génialissimement ah-que-coucouesque ?
- Comment négocieras-tu tout cela avec ce successeur de Papon, qui, enivré d’état d’urgence, n’hésite pas à embastiller les opposants politiques en les assignant à résidence, et parfois pire (rrhô, la poilade) ? Nous te l’assurons, Cadot, qui n’en est pas un, est un vrai artiste, un humoriste dont tu devrais t’adjoindre les services. Un spécialiste de l’humour bête et méchant, de l’humour salasse. Peut-être même bien, devrais-tu l’intégrer à ton équipe.
Hein ? Comment que tu vas procéder ?
En regardant la préfecture s’inspirer des méthodes à l’œuvre dans ces régions où sont positionnés les bataillons français venus faire respecter l’État de droit (français, bien sûr) par pur désintéressement : Afghanistan, Côte-d’Ivoire, Niger, Tchad, Mali, Centrafrique aussi ? Ou dans ces régions où il est fait une ingérence modeste et pudique : Libye, Syrie, Somalie, parfois Soudan ?
(Tiens ? curieux, tous ces noms de pays... ça me dit vaguement quelque chose...)
Ça fleure déjà bon la bonne gaudriole bien de chez nous…