Monsieur le préfet,
À l’occasion de la manifestation appelée le 8 mai dernier par le Front Social, et de la commémoration officielle du 8 mai 1945 sur les Champs-Élysées, vous avez, (une nouvelle fois depuis la promulgation de l’état d’urgence) pris un arrêté portant interdiction de séjour, c’est-à-dire de manifester, à l’encontre de 69 d’entre nous, militant.e.s syndicalistes, antifascistes, anticapitalistes, antiracistes, associatifs. Vous invoquez une nouvelle fois « le niveau élevé de la menace terroriste » pour abuser des dispositions scandaleuses contenues dans l’état d’urgence et les nouvelles dispositions anti-terroristes. Vous amalgamez sciemment la « lutte antiterroriste » avec un large spectre militant que vous qualifiez de « mouvance contestataire radicale. » Dans votre arrêté, vous prêtez arbitrairement à ces militant.e.s l’intention de se livrer à des violences ; « il y a tout lieu de penser que X répondra à l’appel de la mouvance radicale pour participer aux actions violentes annoncées ». La manifestation du Front Social n’annonçait aucune violence, et avait été déclarée et autorisée. Pour tenter d’argumenter vos interdictions, vous mentionnez que les personnes visées « militants actifs de l’ultra gauche ont participé à de nombreuses reprises aux manifestations, contre notamment les violences policières et le projet de réforme du code du travail ».
Comme le souligne Amnesty International dans un rapport publié vendredi 26 mai, le gouvernement français et votre administration en matière de répression, ont excellé en matière de « restrictions disproportionnées au droit de manifester ». 155 arrêtés d’interdiction de manifestation ou de rassemblements, 683 mesures individuelles d’interdiction de manifester ont été pris depuis le début de l’état d’urgence, entre novembre 2015 et mai 2017. De nombreuses manifestations se sont tenues dans des conditions intolérables : fouilles, nasses, sectionnements des cortèges, violences policières…
Nous n’entendons plus nous conformer à vos dispositifs liberticides, et exercerons dorénavant pleinement notre droit constitutionnel à manifester librement, sans accepter les fouilles, les nasses, humiliantes et dangereuses par nature. Nous manifesterons malgré les arrêtés d’interdictions que vous prendrez envers un.e ou plusieurs d’entre-nous.
Recevez Monsieur le préfet de Police de Paris nos salutations militantes.
Coordination Île-de-France contre la répression et les violences policières