À Paris-Luttes, il y a un logo, une charte graphique, mais pour le reste, toute personne qui souhaite proposer affiches, stickers ou marque-pages est la bienvenue.
C’est en commençant à faire courir le mot qu’on est tombé la dernière fois sur Seb et Leïla. Seb, vous le connaissez sans le savoir, il a fait pas mal d’affiches qu’on retrouve sur les murs. Leïla, elle, est graphiste depuis trois ans. Pour l’occasion, iels ont créé le collectif Attention, un mélange d’énergie (« Attention ! ») et de délicatesse (« avec attention »). Tous deux sont très actifs dans le collectif Formes des luttes qui propose de nombreuses illustrations et affiches contre la réforme des retraites.
Ces affiches, on ne les comprend pas forcément au premier coup d’œil, il faut y revenir à plusieurs fois, on découvre petit à petit le sens, les mots cachés dans les collages.
Selon Leïla, « l’idée c’était de travailler à la main, de s’amuser avec de bons vieux ciseaux, de la craie grasse et de la colle. En réfléchissant à quoi ça pourrait ressembler graphiquement une affiche pour Paris-luttes, je me suis dit que l’adresse du site était un slogan en soi, ça dit tout du projet : Paris, les infos sur les luttes. Pas besoin d’en rajouter, donc c’est ça qui prendrait graphiquement de la place ».
Le principe est donc, par ajout de contours à la craie grasse, de faire émerger les trois mots (Paris, luttes et info) de photos découpées dans des magazines. Les détails et le sens des images originales se brouillent, mais si vous avez l’œil vous pourrez peut-être y retrouver George Orwell, Virgina Woolf, Michel Foucault à Vincennes ou même le chien de Giscard. À l’origine, il ne devait y avoir qu’une affiche, c’est finalement une série de 7 (dont seulement quatre ont été imprimées aujourd’hui) qui voit le jour.
Ils ont quand même un peu utilisé l’ordi pour la postproduction. Seb explique que « si on regarde de près on voit très bien ce qui est fait numériquement, on n’a pas essayé de masquer. C’est assumé de montrer ce qui est fait à la main, à la craie ou aux ciseaux, et ce qui est fait sur Photoshop. Je pense que justement ça nourrit la qualité de l’image, ça lui donne de la profondeur. L’art s’est autonomisé au XIXe siècle avec les impressionnistes en assumant le pinceau, sa trace, sa touche : on rend visible l’acte de peindre, ce que jusque là avec l’académisme, on masquait. Toutes les affiches publicitaires actuelles, dans une logique très proche de celle de l’académisme, dans une logique que j’appelle le réalisme capitaliste, c’est du photomontage où on essaie de donner l’illusion que c’est la réalité alors que tout est recomposé, on masque toutes les coutures, toute trace de l’outil, et je pense que c’est plus intéressant d’assumer ces coutures-là ».
Alors si vous voulez récupérer les affiches et leurs coutures (une pour votre salon et 30 pour les coller :)), rendez-vous à la prochaine teuf de Paris-Luttes et de La Coord antirépression à la Parole errante le 14 mars !