Le décret sur l’utilisation des drones équipés de caméras, notamment pour le maintien de l’ordre et la surveillance des frontières, a été publié jeudi 20 avril au Journal Officiel.
Le texte autorise l’utilisation de drones par les policiers, gendarmes, douaniers ou militaires, dans un grand nombre de cas et avec des termes assez flous : pour « la prévention des atteintes à la sécurité des personnes et des biens dans des lieux particulièrement exposés », pour « la sécurité des rassemblements » sur la voie publique, ainsi qu’en « appui » des agents « au sol » « en vue de leur permettre de maintenir ou de rétablir l’ordre public ». Bref, c’est la généralisation de l’usage des drones par la police.
Pour rappel, ce déploiement s’est fait en plusieurs étapes. En pleine crise sanitaire, le 27 mars 2020, le gouvernement avait lancé une grande commande d’environ 200 drones pour un déploiement rapide sur le territoire. En parallèle, des préfets comme Didier Lallement à Paris avaient utilisé des drones de surveillance en-dehors du cadre légal contre des manifestations.
Ce cadre légal avait été prévu par la loi « sécurité globale » fin 2020. La fameuse loi de Darmanin, qui prévoyait d’interdire de filmer les policiers et qui avait mis des centaines de milliers de personnes dans la rue. Le Conseil Constitutionnel avait retoqué l’autorisation des drones dans cette loi. Le Conseil d’État et la CNIL avaient aussi condamné l’usage de drones.
Mais ce revers n’avait pas arrêté le gouvernement, preuve qu’il se moque bien du Conseil Constitutionnel lorsqu’il ne va pas dans son sens. Un an plus tard, en décembre 2022, les macronistes faisaient passer la « loi sur la responsabilité pénale et la sécurité intérieure », une énième batterie de mesures sécuritaire. L’occasion de faire passer les mesures refusées par le Conseil Constitutionnel l’année précédente. Cette fois c’est la bonne. Après 3 revers, le décret sur les drones est passé.
Ce déploiement s’accompagne de mesures sur la reconnaissance faciale. Dans une indifférence générale, un « projet de loi JO 2024 » a été déposé en toute discrétion, pendant les fêtes de fin d’année 2022. Il prévoit une vidéosurveillance de masse appuyée par l’Intelligence Artificielle. L’article 7 autorise « à titre expérimental » l’utilisation en temps réel de systèmes d’intelligence artificielle pour analyser les images des drones et des caméras de surveillance. Une première en France et en Europe.
L’acharnement du gouvernement paie. Les flics pourront désormais les utiliser à loisir dans l’espace public, et les prochaines mobilisations seront sous un ciel occupé. Quadrillé par ces oiseaux robotisés au service de l’ordre policier.
Cette surveillance n’est pas imbattable. Lors des Gilets Jaunes, les flics chargés de télépiloter des drones « ont dû procéder à quelques replis stratégiques et atterrissages d’urgence pour échapper à la vindicte des goélands ». D’autres attaques ont été organisées par les corneilles, notamment durant les manifestations. Des aigles ont aussi mis hors-service des drones en montagne.
En novembre 2021 au Burkina Faso, un adolescent équipé d’un lance-pierre traditionnel avait abattu un drone français qui surveillait un rassemblement visant à empêcher le passage d’un convoi de l’armée française.