Heureux bénéficiaires d’un compteur électrique dit « communicant » (de type Linky) branché à domicile ! Heureux possesseurs d’un traceur permanent en poche, plus connu sous le nom de téléphone portable ! Vous saviez déjà que ces dispositifs technologiques permettent aux autorités trop curieuses d’estimer, pour l’un, à quelles heures un logement est occupé (ou pas) et s’il héberge par exemple des hôtes supplémentaires. Pendant que l’autre leur offre gratos chaque déplacement par géolocalisation, en plus d’espionner les conversations de son détenteur. Mais pourquoi réserver le privilège du contrôle social aux seuls flics en uniforme, alors qu’un paquet d’autres larbins se pressent régulièrement au portillon pour en resserrer les mailles ?
Prenez Pôle Emploi par exemple, ces flics du travail toujours en quête de précieuses informations pour priver à qui mieux mieux les allocataires de leurs propres cotisations (ne serait-ce qu’en matant l’adresse IP de leur actualisation mensuelle). A l’occasion du vote de la Loi de finances pour 2021, c’est ainsi qu’un petit amendement a été glissé dans le chapitre Travail et emploi, au cours de la navette entre l’Assemblée et le Sénat. Un simple numéro anodin de départ, qui s’est finalement transformé en l’article 268 de cette loi promulguée le 29 décembre 2020, entre les rôts de Noël et du Nouvel An. Un truc de quelques lignes, dont la portée a éclaté il y a quinze jours, à l’occasion de la parution tardive de son décret d’application au Journal Officiel.
Ce décret signé le 30 juin dernier par la Première ministre et son sous-fifre du Travail, concerne en effet les « agents chargés de la prévention des fraudes » de Pôle Emploi, en leur offrant une nouvelle possibilité de contrôle, nommée droit de communication, auquel le « secret professionnel » des entreprises ne peut être opposé. Plus prosaïquement, les flics du travail vont désormais pouvoir se faire communiquer sous trente jours, à la demande et à titre gratuit, toutes « informations nécessaires au contrôle de la sincérité et de l’exactitude des déclarations souscrites, ainsi que de l’authenticité des pièces produites » par les allocataires… directement auprès des banques, mais également « des fournisseurs d’énergie et des opérateurs de téléphonie ».
Ils pourront ainsi non seulement retracer ces informations personnelles sur une période de 18 mois en arrière, mais aussi les conserver pour une durée de 3 années, et même au-delà en cas de besoin, soit « jusqu’à l’épuisement des voies et délais de recours contre les récupérations d’indu, sanctions administratives ou condamnations pénales consécutives aux contrôles réalisés sur la base de ces informations ».
Mais au fait, pourquoi les « opérateurs de téléphonie » et les « fournisseurs d’énergie », en plus des habituels chacals bancaires ? Avec le concours de ces derniers, on comprend bien que les chasseurs de Pôle Emploi vont désormais pouvoir aller fouiner comme d’autres keufs dans les comptes de chaque allocataire suspect, afin d’examiner à volonté leurs « modes de paiement ou de rémunération », ainsi que les « nombre ou fréquence des opérations réalisées ou des versements reçus. »