Voici la lettre que nous publions ds le document ci-joint
Lettre ouverte au Procureur de la République
Paris, place de la République, le 15 septembre 2016, Laurent T., agent hospitalier et père de famille, est frappé en plein visage par l’éclat d’une grenade de désencerclement, alors qu’il est montré par des vidéos référencées, qu’il n’y a aucun heurt, que c’est la fin d’une manifestation syndicale, que la place de la République se vide. L’éclat de cette grenade, classée comme arme de guerre, lui explose l’œil droit, Laurent s’effondre, c’est l’horreur.
Nous avons assisté aux trois jours de procès du 11 au 13 décembre 2022 de Laurent T, contre le CRS Alexandre M., celui qui a mutilé à vie ce père de famille.
Trois jours de procès où les vidéos ne mentent pas et révèlent ce qui s’est réellement déroulé, (lors d’une charge de CRS) à une quinzaine de mètres de quelques manifestants passifs, une grenade est lancée en l’air — nous apprendrons lors du procès qu’elle a été lancée en toute illégalité, par ce CRS récemment recruté — En effet celui-ci a non seulement dérobé une grenade de désencerclement dans un camion de ravitaillement alors qu’il n’en avait pas le droit, qu’il n’avait pas reçu la formation obligatoire pour garder et lancer ce type de grenade, mais on apprend également qu’il l’a lancée en l’air, alors qu’il a été longuement expliqué par les experts qu’il était strictement interdit de lancer une grenade en l’air du fait de sa dangerosité.
Quelle était l’intention de ce geste ? Blesser et causer des dégâts.
Le mal est fait, Laurent est borgne. Sa vie est totalement bouleversée, il est obligé de se reconstruire à ses frais, contraint de quitter son emploi, obligé, lui, de prendre trois jours sans salaire pour ce procès si longtemps attendu (quatre longues années), obligé d’assumer les frais de sa défense, alors qu’il est totalement innocent, si l’on considère que participer à une manifestation reste un droit.
Les preuves sont indiscutables, tout était rassemblé pour faire valoir la justice.
Pourtant, nous avons assisté à une vraie parodie de justice, où les témoins de la victime ont été empêchés de finir leur déposition, alors que nous avons eu droit à de très très longues heures de témoignages de policiers contredisant par leurs témoignages les avis des experts de l’IGPN ou se contredisant entre eux. Une longue préparation a sans doute été nécessaire pour déverser autant de mensonges !
L’avocat des policiers, spécialisé dans la défense des forces de l’ordre et dans le droit des armes (!), a réussi avec le soutien de la présidente du tribunal à faire valoir comme une vérité tout le contraire de la réalité. La justice a préféré s’appuyer sur des photos sensationnelles émanant de « Paris Match », récusées dans un premier temps par madame le juge, non référencées et n’ayant aucun lien avec le drame infligé à Laurent.
Pendant trois jours, nous avons souffert avec Monsieur Laurent T. de voir et d’entendre la justice face à la machine de guerre mise en place par la partie adverse.
Nous avons entendu les fautes patentes du CRS accusé : il a gardé une grenade de désencerclement, il n’en avait pas le droit, il n’avait pas non plus la formation pour la garder ni la lancer, il n’a pas non plus obéi à un ordre de dissolution (ordre arrivé quelques temps après le drame).
A nos demandes de micro pour entendre cet avocat de la défense, le mépris a été la réponse. Devant tous les mensonges difficilement audibles de son plaidoyer, nous avons quitté la salle.
Mais avant, nous vous avions entendu : vous n’avez pas suivi la demande de Laurent dans sa demande de révocation, mais vous avez conclu aux fautes graves du CRS incriminé : vous demandiez 2 à 3 ans de prison avec sursis et 5 ans d’interdiction de port d’armes. D’une certaine manière l’essentiel était entendu : l’accusé n’aurait pas l’occasion de mutiler d’autres manifestants avant sa retraite.
La plaidoirie de la défense axée sur la peur et sur la manipulation des faits a porté ses fruits contre des preuves irréfutables. Le CRS a été acquitté. Une sensation nous envahi, la nausée.
Nous éprouvons aujourd’hui écœurement et révolte.
Et nous avons attendu votre décision pendant 10 jours. A votre tour, vous avez participé à une deuxième déflagration dans la vie de Laurent, alors que vous aviez la possibilité de rétablir un peu de justice.
Vous avez préféré laisser en exercice un CRS irresponsable et manifestement dangereux. Une nouvelle fois les professionnels de la justice ont sciemment détourné les fondements de la justice.
Il nous semblait que la justice devait être une conquête de la civilisation sur la violence, de l’apaisement sur la vengeance, de la stabilité sur le chaos. Malheureusement il n’en est rien.
Vous aviez énoncé un jugement qui prenait en compte les faits et la réalité du crime, vous avez choisi de ne pas le faire respecter en ne faisant pas appel.
Par votre décision, Monsieur le procureur, de ne pas faire appel, maintenant les policiers savent que tout leur est permis…un pas de plus qui éloigne le citoyen de sa confiance en la justice.
Postscriptum :
Vous avez certainement connaissance, Monsieur le procureur, que nous assistons en France à une augmentation conséquente en nombre de morts, de mutilés et de blessés causés par la police. Parmi les victimes, se trouvent des manifestants, de simples passants ainsi que des journalistes et des observateurs.
D’ailleurs, lors de la manifestation du 19 janvier 2023 contre la réforme des retraites, décrite comme pacifiste, un photographe espagnol a été renversé par une charge des forces de l’ordre, frappé violemment alors qu’il était à terre, il a dû être amputé d’un testicule.
« On lui fit bien voir que selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir »
Jean de Lafontaine « les animaux malades de la peste ».1678
Deux citoyennes en colère
Le 25 janvier 2023