L’expo a donc sauté et, dans la foulée, le métro avec, puisque cela ne pressait plus [1]. Y’en a pour qui ce report fut une chouette nouvelle, et y’en a qui ont carrément fait la gueule. Demandez aux mairichons du coin, Bournat (Gif), Lasteyrie (Zopal), Ros (Orsay) et Samsoen (Massy) [2]. En tout cas, en repoussant le projet de métro à 9 ans, le gouvernement Macron s’est tiré de draps houleux. En 2027, ce sera forcément à une prochaine mandature de porter le bébé.
Il faut le savoir, l’urbanisation du plateau s’articule en majeure partie autour de la question des transports. Faut avouer qu’en bagnole, c’est déjà bien le bordel pour aller là-haut et pour y circuler aux heures de pointe. Donc, pour les élus du coin ainsi que pour les structures universitaires et industrielles déjà implantées sur le plateau, ça justifie carrément un nouveau moyen de locomotion. Bon, c’est vrai qu’au niveau des chiffres, c’est pas très reluisant. Le projet de métro aérien devrait coûter pas loin de 5 milliards d’euros, avec moins de 100 000 voyageurs par jour à la clé – ce qui ne peut absolument pas assurer sa rentabilité. Il faudrait des millions d’usagers quotidiens pour que la ligne rentre dans ses frais. Ça avait d’ailleurs fortement inquiété la Cour des Comptes [3].
Alors pourquoi s’accrocher coûte que coûte à un projet si bancal financièrement ? Bah parce que, faut bien s’le dire, le métro, c’est le Cheval de Troie de ceux qui veulent accélérer les constructions de logements dans tous les sens sur le plateau. Ben oui, quand il sera là, ce métro, faudra bien le rentabiliser et donc ramener plein de gens là-haut. Du coup, pour les filous du BTP qui souhaitent un aménagement maxi best-of, cette nouvelle ligne de métro, c’est le top. On comprend mieux pourquoi ce projet est donc extrêmement mal accueilli par ceux qui souhaitent un aménagement modéré, voire pas d’aménagement du tout ! Ah oui au fait, cette ligne de métro aérienne porterait aussi un gros coup dur aux agriculteurs du plateau, rendant le métier presque impossible. Comment feront-ils pour passer d’un champ à l’autre avec leurs gros engins quand leurs terres seront parsemées de pylônes ? Du coup, pour résumer : la ligne 18 coûte cher, ne sera pas rentable, pas très fréquentée, destructrice pour l’agriculture locale… et en plus, comme elle serait aérienne, ça devrait pas être joli-joli dans le paysage.
Si on part du principe qu’il faut améliorer l’offre actuelle de transport pour les usagers actuels – et non potentiels – y’a quand même d’autres solutions : faire partir des téléphériques des gares RER par exemple. Apparemment ça coûterait 10 fois moins cher que le métro, et ce serait bien meilleur pour notre planète [4]. Et puis, y’a ce projet d’escalator [5], facile à mettre en œuvre, économe à tous les niveaux, tellement basique que c’est hors sujet pour les élu⋅e⋅s et les grandes entreprises. Bref, faut pas trop rêver. Avec tout le forcing des élus locaux et autres notables du coin, y’a une forte probabilité que le projet de métro finisse par aboutir… Mais d’ici là, y’a quand même des chances qu’il connaisse encore quelques soubresauts.
R. G