Charlotte Piazza est morte à 24 ans après des maltraitances en prison et à l’hôpital psychiatrique. Childéric est mort à 29 ans en raison des mauvais traitements et de la contention physique imposée par l’hôpital psychiatrique.
À la mémoire de Charlotte, de Childéric et de toutes les autres victimes, réunissons-nous pour dénoncer l’enfermement et les violences psychiatriques, et pour prendre collectivement soin de nous, familles, proches de victimes ou survivant.e.s.
Charlotte Piazza a été tuée le 23 mai 2021. À 24 ans, Charlotte a été empoisonnée en unité fermée d’asile psychiatrique, après 3 ans d’enfermement et de maltraitances carcérales. C’est pendant son incarcération, à force d’acharnement de l’administration pénitentiaire et judiciaire, de violences et de mitards, qu’elle décompense une schizophrénie.
En prison, aucun soin ne lui est apporté bien au contraire. À sa sortie, aucun psychiatre ne prend sa souffrance au sérieux, si bien qu’après une crise, elle est condamnée par la préfecture de police à un enfermement psychiatrique sous contrainte. Pour lui autoriser sa sortie, l’asile lui impose une injection au Xeplion, un produit connu pour sa dangerosité et le supplice physique qu’il inflige. Ils lui injectent ce produit, sans lui donner d’anti-douleurs, sans nous expliquer les risques.
À la permission suivante Charlotte met fin à ses jours. Sa vie lui a été volée. Par 4 ans d’acharnement judiciaire, carcéral et psychiatrique.
Tous ces lieux meurtriers doivent fermer.
Childéric, lui, est mort à l’âge de 29 ans. Ce 10 août 2010, il a été assassiné dans l’enceinte d’un hôpital psychiatrique, alors qu’il se trouvait en unité fermée et qu’il était venu de son plein gré deux jours auparavant. Il n’a pas survécu à une nuit de mauvais traitements et de contentions physiques.
Il est mort attaché, s’étouffant dans son propre vomi - ne pouvant se libérer ni même se mettre sur le côté. Sa famille n’apprendra sa mort que deux jours plus tard. L’hôpital, par la voix de la police, leur dira qu’il serait arrivé agité et qu’iels auraient été dans l’obligation de le mettre en unité fermée, à l’isolement. De là, il se serait montré agressif envers les soignant.e.s, et il aurait nécessité d’être attaché pendant son sommeil. Jusqu’à en mourir.
Tout cela n’est que supposition, car il n’y a aujourd’hui que la version de l’hôpital, Childéric n’étant plus là pour donner la sienne. Revient l’éternelle question de sa mère : comment quelqu’un qui viendrait se faire interner de lui-même serait agressif/non coopératif envers/avec les soignant.e.s ? Il avait cette envie et cette volonté de réussir à vivre avec cette maladie, et surtout, de s’en sortir.
La dernière fois que Childéric a été vu, qu’on lui a parlé et que l’on a mangé avec lui, c’est le jour où il est parti à l’hôpital. Il était heureux et confiant.
L’hôpital psychiatrique et les unités d’enfermement l’ont tué à petit feu, lui et ses rêves, d’abord avec le traitement, lourd, qui lui a fait prendre beaucoup de poids et développé d’autres pathologies et puis finalement dans l’enceinte de l’hôpital où il a passé une bonne partie de sa jeune vie d’adulte, jusqu’à sa mort. C’est aussi la manière dont cette société blanche et bourgeoise perçoit les corps noirs et racisés qui l’a tué, lui cet homme noir et fort, qui devait certainement leur faire peur alors qu’il était d’une douceur et gentillesse...
Tous ces lieux d‘enfermement nécessitent de repenser leur manière de voir et d‘aborder les corps et la psychologie des personnes racisées...
L‘enfermement carcéral et l‘enfermement psychiatrique sont deux rouages mortifères d’un même système bourgeois raciste et sexiste. Derrière les murs, les maton-nes et les psychiatres tuent brutalement ou à petit feu nos proches, dont les voix sont censurées.
La prison condamne celleux d’entre nous qui ne sont pas blanc-hes, qui sont pauvres, qui dérangent l’ordre établi ou l’ordre de genre. Elle s’acharne, brutalise et humilie les personnes sans-papier, les travailleuses du sexe, les corps racisés, les précaires, les résistant.es, et leurs familles.
Les unités fermées sont des prisons qui ne disent pas leurs noms, et qui infligent à leurs « patient-es », traité-es comme autant de dangers pour la société bourgeoise, la prise de produits dangereux sans leur consentement. Plusieurs de ces produits, qui ont causé la mort de détenu-es, sont en réalité des poisons qui tuent en silence à l’ombre des murs de ces institutions.
L’enfermement psychiatrique isole, maltraite et empoisonne sous couvert de soigner des troubles créés par le même système disciplinaire, le même État criminel.
Les voix des personnes dénonçant ces violences sont silenciées. Les rares fois où les familles et les survivant-es trouvent les forces de se battre sur le plan judiciaire et dénoncent ces crimes, cela n’aboutit presque jamais.
L’État se retrouve juge et parti.
Le parcours judiciaire est une violence de plus pour les victimes et leurs proches.
L’enfermement carcéral et psychiatrique tue. Il maltraite nos proches par ses conditions inhumaines. Les violences psy, en prison comme en asile et en unités fermées d’hôpital psychiatrique, maltraitent, torturent et assassinent.
À la mémoire des victimes de ces violences et en l’honneur des survivant-es nous voulons nous réunir, dénoncer ces violences et crimes d’État, nous soutenir, prendre soin collectivement de nous, familles, proches de victimes ou survivant-es de ces violences. Nous voulons faire soin collectivement, autrement, en commun - témoigner, s’outiller, agir pour que cela cesse.
Le 13 avril, nous appelons à nous réunir pour dénoncer toutes ces violences, à la mémoire des victimes d’enfermement et de violences psy, et pour prendre soin de nous, des survivant.e.s et des proches.