Du 21 au 28 mai 1871, les troupes versaillaises du gouvernement d’Adolphe Thiers écrasaient dans le sang la Commune de Paris, laquelle expérimentait depuis le 18 mars 1871 un modèle de société révolutionnaire, réponse populaire et sociale à la capitulation gouvernementale de la capitale dans la guerre franco-prussienne. Épris de justice sociale et de liberté, les communards avaient ébauché une société libre et désaliénée, qui témoigne encore aujourd’hui qu’il est possible de s’organiser, de vivre et de s’épanouir dans un monde sans État et sans capitalisme. La répression de la Commune de Paris, désormais tristement connue sous le nom de Semaine sanglante, se solda par la mort de près de 8000 communards et par l’emprisonnement, puis pour certains la déportation, de plus de 40000 autres.
Autre calendrier, autre géographie, l’État assassine toujours. Ainsi, le 2 mai 2014, dans l’État du Chiapas, dans le sud-est du Mexique, une organisation manipulée par le gouvernement chiapanèque et agissant à la manière paramilitaire a violemment attaqué les rebelles zapatistes de La Realidad. Dans cette zone du Chiapas, et à l’instar de quatre autres, les zapatistes construisent depuis maintenant plus de vingt ans leur autonomie, une société sans État expérimentant une démocratie radicale à partir d’assemblées communautaires et communales. Pour l’heure, ce projet d’autonomie a permis bien des réalisations – dans des domaines aussi variés et primordiaux que la santé, l’éducation, l’économie et les transports –, prouvant ainsi, plus de cent ans après la Commune de Paris, qu’un autre monde est possible et qu’une alternative radicale existe au capitalisme. Lors de l’attaque du 2 mai 2014, une dizaine de zapatistes ont été blessés et une clinique et une école autonomes ont été détruites. Mais, surtout, notre compañero Galeano a été sauvagement assassiné. Il était la cible de l’embuscade des paramilitaires, qui voulaient ainsi s’en prendre à celui qui joua un rôle important dans l’organisation de la Petite École zapatiste, initiative qui permit à plusieurs milliers de personnes solidaires de la rébellion, en provenance des quatre coins du monde, de venir apprendre ici, en terres zapatistes, une autre façon de vivre et de construire.
En ce jour d’hommage aux communards, il nous semble important de rappeler que les assassinats politiques ensanglantent encore le quotidien de ceux qui luttent pour la construction d’un autre monde, un monde en dehors et contre le capitalisme et l’État, qui n’en finissent plus d’opprimer les peuples. En ce 24 mai, jour de l’hommage qui est rendu à Galeano à La Realidad et à travers le monde, nous voulons aussi dire que l’esprit de la Commune souffle aujourd’hui au Chiapas !
Vive la commune de Paris !
Vive l’autonomie zapatiste !
Signataires :
Confédération nationale du travail (CNT), Comité de solidarité avec les peuples du Chiapas en lutte (CSPCL), Espoir Chiapas, Fédération anarchiste (FA), Grains de sable, SUD éducation, Trois passants, Tamazgha, Tamèrantong, Union syndicale Solidaires.