[Hambourg] Prisonnier politique ? Risque du « prisonnierisme »

Lettre d’un détenu parmi d’autres, enfermé à Hambourg depuis début juillet à la suite des journées anti-G20. Contribution au débat sur la solidarité.

Je suis actuellement incarcéré comme de nombreuses personnes dans une prison allemande suite au déroulement du G20 dans la ville de Hambourg. Je ne me considère pourtant ni victime d’un bug dans la matrice de la justice ou d’une conspiration, encore moins prisonnier politique ; la prison étant une réalité de ce monde normé qui frappe de nombreuses personnes abattues à la chaîne, quotidiennement par les instances juridiques. Je n’idéalise pas davantage mes camarades ici, moi et les militant(e)s incarcéré(e)s en général, comme une « avant-garde de subversifs en puissance » menaçant de renverser imminemment les rapports sociaux actuels.

A l’échelle carcérale/judiciaire, mon petit cas n’est qu’un fait parmi tant d’autres, auquel je dois m’adapter en l’affrontant, en y faisant face et en déconstruisant un peu cette « culpabilité » qu’ils voudraient me faire avaler. Je n’ai ni fierté ni honte à me retrouver privé de liberté. Mais en tant que concerné, il m’est donné l’occasion de déconstruire le mythe d’une certaine fétichisation de la prison dans les sphères militantes et ainsi la replacer dans un contexte, en associant ma situation à un cadre de répression et d’oppression institué bien plus global qui dirige nos vies.

Il existe bien une répression spécifique touchant les personnes porteuses d’idées, de projets tendant à remettre en question l’ordre social global mais ça ne peut faire figure d’exception quant à l’ordre normal de ce monde, puisque tant d’hommes et de femmes — en très grande majorité les profils sociaux les plus vulnérables (pauvres, non insérés) — sont attaqués et livrés chaque jour dans le plus grand calme à des juges et autres larbins de l’ordre. Ces cas s’inscrivent dans un ensemble, dans une tellement triste et banale continuité d’une répression quotidienne.
La revendication de la liberté des « détenus politiques » ne peut être une finalité : elle ne donne pas à entendre cette continuité dans la mesure où les slogans et les discours sont dénués de contenu critique plus large remettant en cause le système qui produit tout ça. C’est notamment ce que la répression cherche à obtenir : la différenciation avec les autres détenus. Nous n’avons pas la même responsabilité collective que, par exemple, des journalistes corporatistes qui exigeraient la libération d’un des leurs d’une prison dans un pays tiers.

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