La grève est partie de Rueil-Malmaison pour exiger le renouvellement d’une collègue en contrat d’insertion que La Poste avait honteusement mis à la porte après l’avoir exploitée pendant des mois. Nous avons au final gagné la titularisation de 3 de nos collègues précaires.
La grève s’est étendue sur La Garenne-Colombes, Bois-Colombes, Courbevoie, Gennevilliers contre les suppressions d’emplois. C’est en agrégeant les forces de ces différents bureaux que la grève a acquis sa force. Des collègues d’autres bureaux se sont mis en grève minoritaire même si leur centre n’était pas directement touché par une restructuration. Leur implication dans la grève, l’expérience des conflits auxquels ils avaient participé auparavant ont joué un rôle fondamental dans la construction de la grève.
Le taux de grève ultra-majoritaire qu’a connu La Garenne-Colombes/Bois-Colombes pendant plusieurs mois a permis la réduction de moitié du nombre de suppressions d’emplois initialement prévu, ainsi que la non-intégration de la partie sécable au casier.
Les conditions de travail et de rémunération des rouleurs sont améliorées, à Courbevoie à La Garenne-Colombes/Bois-Colombes et au Centre de Tri et d’Entraide Départemental (CTED).
Des reports des restructurations de 8 à 12 mois ont été obtenus sur l’ensemble de ces centres. De report en report, les grèves menées ces dernières années dans notre département ont permis d’empêcher la mise en place de restructurations à un rythme effréné. Alors que la norme fixée par La Poste est de restructurer chaque centre tous les deux ans, l’écart entre deux réorganisations est en moyenne de 5 ans sur le 92. Et Rueil-Malmaison n’a pas subi de suppressions de tournées depuis plus de 15 ans !
Aujourd’hui, nous avons conscience qu’il ne suffit plus de résister. Ne serait-ce que pendant notre conflit, des grèves reconductibles se sont déclenchées dans plusieurs régions. La colère existe mais elle s’exprime de manière dispersée. La multiplication des grèves postales ces derniers mois prouve qu’il existe une disponibilité à l’action collective de la part d’une partie significative des postiers. Dans le cours de ce conflit, nous avons cherché à notre échelle à faire en sorte que cette colère latente puisse déboucher sur une action qui fédère plusieurs bureaux, plusieurs métiers et même plusieurs départements : grèves communes avec les guichetières de Rueil Jaurès, grève reconductible conjointe avec la PFC de Gennevilliers, interventions en direction des bureaux de distribution parisiens, du 91, du Cher, de Corse. C’est en additionnant les revendications, en agrégeant les forces que la voix des postiers peut se faire entendre.
Gel de salaires, suppressions d’emplois, précarité : ce que nous vivons dans notre entreprise entre en résonance avec ce que vivent beaucoup d’autres, et ce sont les mêmes qui nous font subir cette politique d’austérité à savoir le patronat et le gouvernement qui s’est mis à son service. C’est pourquoi nous nous sommes tournés vers les autres secteurs en lutte : autour de la question de la précarité, nous avons mené plusieurs actions communes avec les intermittents et précaires, et cette alliance imprévue nous a permis de sortir de l’isolement et nous a aidés à faire reculer la direction. Cortèges de lutte intersyndicaux et interprofessionnels avec les cheminots, blocage de centres postaux avec les intermittents, actions de popularisation de la grève par des usagers en colère… cela rompt avec le rituel des manifs purement symboliques et des logiques de repli du « chacun dans son cortège syndical ». A l’inverse de simples actions de témoignages, le point commun des différentes grèves postales qui se sont coordonnées ces dernières semaines, c’est que l’objectif des grévistes était de gagner, sur la question de l’emploi ou sur des projets qui dégradent radicalement les conditions de travail des agents. Et la direction ne s’y est pas trompée, elle a à chaque fois adopté la même attitude face aux grévistes : tenter de les écraser et laisser pourrir les conflits.
C’est bien parce que nous avons mené cette politique de convergence des postiers, de convergence des secteurs en bagarre que la direction a mis si longtemps à s’asseoir à la table des négociations et qu’elle a fait preuve d’un acharnement répressif sans précédent : procédures de licenciements, convocations au commissariat, gardes-à-vue, paies à zéro, ordonnances interdisant aux grévistes de se rendre dans les centres… La direction a un problème : l’équipe militante qu’elle avait face à elle avant ce conflit est toujours là, elle est même en passe de se renforcer. Nous serons présents dès cet été et à la rentrée dans les mobilisations contre la répression dans le 92 et ailleurs. Même si la direction n’est pas parvenue à nous éradiquer, comme elle se l’était initialement fixé, le combat pour empêcher licenciements et révocations est pour l’essentiel devant nous. L’esprit revanchard de La Poste a poussé la direction à nous imposer des conditions de reprise difficiles, certes meilleures que celles arrachées par les grévistes des autres départements, mais en recul par rapport à celles que La Poste avaient envisagé de concéder il y a quelques semaines. Nous avons prévu de continuer à alimenter la caisse de grève dans les mois qui viennent, à la fois pour pallier au coût de la grève, pour maintenir les salaires des collègues réprimés et en prévision des futurs conflits.
Il y aura un avant et un après cette grève. Il sera nécessaire de tirer les bilans du rôle des organisations syndicales à La Poste, de discuter de quelles priorités se donner pour faire face à la politique d’attaque systématique contre les droits des postiers de la part de la direction.
La reprise du travail aujourd’hui suite à la satisfaction de nos principales revendications ne veut pas dire l’arrêt de la lutte. Au contraire : le comité de grève élu en Assemblée Générale continuera à se réunir, afin de faire en sorte que les postiers du 92 prennent toute leur part dans la lutte contre la direction de La Poste.
Nous nous investirons pleinement dans le débat sur le rôle des syndicats comme outils que doivent se réapproprier les travailleurs, pour faire gagner les luttes. Cela passera inévitablement par un renforcement des syndicats.
Durant tout l’été, nous populariserons notre grève et nous chercherons à susciter le débat sur les leçons à en tirer. Nous maintiendrons les liens tissés avec les autres postiers et les autres secteurs en lutte, en particulier avec les intermittents, précaires et chômeurs, que nous saluons chaleureusement et à qui nous souhaitons de gagner face au gouvernement. Nous ferons tout ce qui est en notre pouvoir pour les y aider.
Courbevoie, le 18 juillet 2014