Assemblée générale tous les dimanche à 18h, ouverte à tou-tes ceux, celles qui veulent participer à la défense du lieu. Toutes les activités du Centre social sont maintenues !
17 avril 2017
Salut à tou.te.s.
Du fait de la fatigue et des diverses choses qui nous occupent par ailleurs, nous arrêtons temporairement le piquet anti-expulsion de l’Attiéké les matins à 6h.
Nous remercions chaleureusement toutes les personnes venues en renfort depuis le 1er avril (spéciale dédicace au camarade de paris-luttes.info pour son suivi, à l’union locale de Solidaires pour son percolateur à café, et aux chanteuses et chanteurs de l’aube).
Attention, ce n’est que partie remise.
Nous maintenons une veille a minima et relancerons le piquet dès que possible. Restez vigilant.e.s.
Nous transmettrons ces jours-ci un numéro de téléphone où vous pourrez envoyer votre contact pour savoir quand le piquet reprendra et être prévenu.e en cas d’urgence.Salutations dionysiennes.
Le collectif du centre social Attiéké (toujours habité et auto-organisé)
15e jour, samedi 15 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon.
Interview avec M.K
T’es un habitant, ou tu viens juste en soutien ?
J’étais soutien depuis 2013, mais là je galère, je suis à moitié à la rue, donc du coup, je suis les deux en même temps : habitant et soutien. Avant, quand on a ouvert ce lieu en 2013, je n’y ai pas habité. J’étais dans le même groupe et on a toujours combattu comme soutien, mais maintenant moi-même j’ai eu des problèmes de logement donc du coup… je suis maintenant habitant, et soutien.
Ça fait pas très longtemps du coup que tu habites ici ?
Je n’y habite même pas encore
Tu m’as dit que tu faisais partie du même groupe avant l’ouverture ? C’était quoi, ce groupe ?
Il y avait plein de groupes, il y avait Paris 8, il y avait la CGA, il y avait plein d’équipes. On vivait dans un squat en 2013 dont on a été expulsés, qui s’appelait « Guantanamo », 50 rue Gabriel Péri. On s’est fait expulser, mais bien avant qu’on soit dans la rue, il y avait des gens de la CGA, de Plaie Commune [1], qui sont venus nous expliquer comment le lieu allait être expulsé, à partir de ce moment on a commencé à faire des luttes ensemble. Au bout de quelques mois, on se retrouve à la rue, on est restés six mois devant la mairie, on a continué ensemble et on a ouvert ici. C’est la même lutte qui continue.
Et le lieu dans lequel tu vivais, le Guantanamo, c’était quoi exactement ? Quel type de personnes y vivaient, ça fonctionnait comment ?
C’était un squat, il y avait trois étages, plein de gens de différents pays. On vivait tranquillement, mais le lieu n’était pas bien, il n’y avait pas d’eau, pas de toilettes. Entre les habitants, on se comprenait, il n’y avait pas de problèmes, même si le lieu était difficile à vivre.
Et ensuite, tu as participé à l’ouverture de l’Attiéké, mais tu as trouvé une autre solution de logement ?
Oui, j’ai trouvé une autre solution parce qu’il y a des soutiens qui sont venus, j’ai eu des amis parmi eux qui m’ont hébergé très longtemps, et ensuite c’est un ami du même pays que moi qui m’a hébergé pendant un an. C’est moi même qui ait décidé ensuite, même si je pouvais rester plus longtemps, parce que je pouvais plus regarder mon ami en face, que j’allais me débrouiller tout seul, que j’allais voler de mes propres ailes. Mieux vaut que je dorme dans la rue, et que je sois fier de moi-même, que je sois chez quelqu’un sans pouvoir contribuer au loyer ou aux autres dépenses. C’est pour ça que j’ai décidé de m’en aller.
Et pendant cette période, depuis l’ouverture jusqu’à maintenant, tu as participé aux activités de l’Attiéké, tu es venu en soutien par moments, aux manifs ?
Oui, j’ai presque participé à tout, mais pendant un moment je n’étais pas là, quinze jours après l’ouverture je suis allé au bled pendant six mois parce que j’étais malade, un peu faible. Quand je suis revenu, je voulais vivre ici, mais il y a des soutiens qui ont dit « non, tu peux pas, il faut rester avec nous ». Mais j’étais fatigué que les gens m’aident tout le temps,
J’ai pas bien compris, tu voulais vivre où ?
Ici, à l’Attiéké…
Mais les soutiens ils te disaient que non, ils ….
Que non, je suis pas habitant, je suis soutien, donc on peut… on est devenus bons amis, ils voulaient pas que je devienne comme un habitant…
Ils préféraient t’aider à trouver d’autres solutions ?
Voilà !
Tu peux me dire ce que ça représente pour toi l’Attiéké ? Ce que tu penses de l’Attiéké, ce que l’existence de ce lieu signifie pour toi ?
Pour moi, personnellement, ça représente… tout. Quand dans un pays t’as pas de famille, rien, pas de papiers pour travailler, pour payer un logement, t’es en galère totale, si t’as un lieu pour être digne – quand t’es à la rue, c’est difficile de travailler – au moins tu peux aller travailler, tu peux aller faire tout ce que tu veux, même si c’est difficile. Quand on vit ensemble, tout le monde sait qu’il y a des problèmes entre les habitants, ça fait partie de la vie aussi, quand on est nombreux dans un lieu. A part ça, ça représente tout pour moi, c’est un grand espoir pour nous.
Pour finir, est ce que tu peux me dire si ici ou ailleurs, tu as participé à d’autres types de luttes, si tu t’es engagé politiquement, d’une manière ou d’une autre ? Politiquement, ou dans des luttes sociales ?
Socialement oui, politiquement, je connais rien de la politique, je n’aime pas la politique, j’ai l’habitude de dire que la politique, c’est la science du mensonge. Je n’aime pas la politique, mais je sais quand même que quand j’étais dans la merde, il y a des gens qui sont venus me soutenir, donc du coup quand je me promène, et que je vois des gens qui sont dans la même situation que moi, même avec des différences, si je peux intervenir, si je peux faire quelque chose… Je me suis rapproché des mal-logés, des gens qui sont à la rue et qui savent pas comment faire, j’essaie de parler avec eux. J’essaie de faire un lien entre les gens avec qui j’ai habité et lutté, et plein de gens qui sont à la rue, dans des squats, et qui savent pas comment s’en sortir. Il faut aider les gens qui se retrouvent dehors, il faut pas rester assis et attendre d’avoir les mêmes problèmes. Il faut agir pour contrecarrer les gens qui en expulsent d’autres tout le temps.
Dans ma vie, depuis ma naissance, je sais que s’il n’y a pas la lutte, il n’y a pas la vie. S’il y a la lutte, il y a l’espoir, il y a tout. Dès que je commence à lutter, je sais que je suis victorieux.
14e jour, vendredi 14 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon.
Interview avec A.
Qu’est ce que c’est pour toi l’Attiéké ?
C’est un lieu d’habitation, c’est un lieu d’activité, c’est un truc bien quoi
Le lieu il te touche plus parce que t’es un habitant, parce que tu participes aux activités ?
Il me touche plus parce qu’il y a des choses qui sont bien, il y a que des trucs positifs, que des activités utiles. Ils aident les gens, il y a des cours de français, des permanences logement, des permanences pour les sans-papiers, des permanences pour les gens qui dorment ici. Je vois que des trucs bien, qui servent vraiment à quelque chose, à la vie
Et toi, ça te sert ?
Oui, j’apprends des choses, il y a plein de trucs qui me donnent de l’énergie, c’est mieux qu’être dans des cafés, c’est mieux qu’être tout seul…
Et tu participes à des activités en particulier ?
De temps en temps… quand je suis libre, quand on a quelque chose à faire on le fait
Tu as déjà habité ici ?
Ouais, mais plus maintenant. Mais pour l’instant il n’y a rien de stable. C’est dur d’avoir quelque chose de stable. On galère, il y pas d’argent pour qu’on paye le loyer, pas de boulot.
Tu participes à des projets pour la suite ? Qu’est ce que tu voudrais ?
Je voudrais une vie normale, c’est tout. Comme tout le monde, de quoi vivre normalement
Et qu’est ce qui te motive, toi ? Qu’est ce qui t’intéresse ?
C’est des collègues, des camarades, des gens qui bougent comme moi, des gens qui luttent. Ça donne envie de participer. C’est des choses bien, chercher un lieu pour dormir, un lieu pour travailler.
13e jour, jeudi 13 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon.
Interview avec S. Et T.
Est ce que vous pouvez brièvement, chacun, me décrire votre rapport à l’Attiéké ?
T. : Militant, membre du collectif Attiéké depuis longtemps
S. : La première chose qui peut venir à l’esprit, c’est de faire partie du truc. Une semaine à l’Attiéké est rythmée par des choses qui sont là depuis quelques années, qui progressent, des rendez-vous, des réunions, des activités. C’est faire partie de ce truc, voir comment il avance, parfois recule, les choses qu’on réussit à faire, toute l’expérience qu’on a en commun.
Est ce que tu pourrais préciser ce que t’appelles « ce truc » ?
S : Oui, à l’Attiéké il y a eu différents moments de vie du collectif, différents objectifs. Ça a toujours été l’objectif de défendre le bâtiment, par un peu tous les moyens qu’on a, juridiques, de lutte, de manif… Faire vivre des activités aussi, des permanences pour défendre des gens, où des gens se sont défendus eux même aussi. Le dimanche moi je participe pas mal aux activités avec les enfants…
Qu’est ce qui te plaît le plus dans tout ça ? Qui t’intéresse le plus, qui te paraît le plus réussi ?
S : Je peux pas vraiment répondre, pour moi l’Attiéké c’est un bloc. Je pourrais pas détacher un truc et te dire ça c’était mieux, c’était vraiment bien ou c’était plus utile. Le moment de l’AG tous les dimanche permettait de faire avancer les trucs ensemble. Quand je pense à l’Attiéké, même si je participe pas forcément à tout, je pense vraiment à tout ce qui s’y fait, au collectif, c’est à dire aux gens qui habitent l’Attiéké, à ceux qui n’y habitent pas mais qui se sont soudés notamment depuis que la fin du bâtiment approche. Il y a des choses qui avancent beaucoup, des liens qui se resserrent.
Et toi, T., qu’est ce qu’il représente pour toi ce lieu ?
T. : Un centre social ouvert sur le quartier, avec différentes activités, qu’on essaie tant bien que mal de faire vivre, par plein de moyens différents, et en essayant d’inciter les gens à toujours utiliser l’endroit pour qu’il existe, pour qu’il ait un ancrage dans cet espace qu’est Saint-Denis
Quel rapport vous établissez entre le projet de base – j’imagine qu’il y en avait un – et la réalisation ? Il y a des différences, des choses auxquelles vous n’aviez pas pensé au départ ?
T. : L’un des éléments qui est important, et qui a un peu soudé le groupe, c’était la réquisition de logements vides, l’idée qu’il était inadmissible qu’il y ait des gens à la rue, surtout dans une ville communiste – et le problème c’est que c’est toujours le cas – mais pendant trois ans et demi il y a eu plusieurs personnes qui ont pu bénéficier d’un toit alors qu’ailleurs ils n’auraient pas trouvé, si t’as pas de papiers t’accèdes pas au logement sauf en payant des marchands de sommeil comme ça se fait beaucoup ici.
Donc pour toi la question du logement elle est toujours centrale ?
T. : Oui, elle reste centrale, elle est pas atteinte en fait, il y a plein de personnes qui galèrent et qui vont continuer à galérer, nous on a tenté de faire bouger les lignes, notamment à travers la permanence logement. On a essayé de créer de la solidarité de base entre les gens, de dire qu’on est tous plus ou moins dans la même galère, qu’il y a une constante qui est le mal logement. Comment on fait pour sortir ensemble de cette impasse ?
S. : Le collectif a eu plusieurs vies, on reste dans la ligne du projet de départ, les permanences existent depuis le début, se sont jamais arrêtées, ça a un peu constitué l’Attiéké. Les AG aussi, depuis trois ans et demi tous les dimanche il y a une assemblée, on aurait pu penser que ça durerait moins longtemps, des habitants et des non habitants participaient, ça c’est un truc assez fort. En ce moment, on est arrivés à pas mal d’égalité au sein du collectif, en terme de prises de parole, de décisions, de confiance en soi, et ça fait vachement avancer les choses.
Tu veux dire que les habitants participent plus qu’avant ?
S. : Oui, et même les non habitants, mais on peut dire que maintenant les impulsions viennent un peu de tous les côtés, et c’est un truc qu’était pas forcément là au début de l’Attiéké
T. : Il a fallu qu’il y ait de la confiance qui se crée entre les gens, pour qu’il y ait collectif. Ça se concrétise maintenant, sur les ouvertures ou sur d’autres trucs, mais c’était pas gagné. L’Attiéké c’est pas qu’une bande de gauchistes, c’est un truc qui dépasse ça, un truc d’entraide qui se veut aussi politique.
S. : Après, c’est un espace d’auto-organisation directe dans le sens où les logements ont été réquisitionnés et les gens s’y sont organisés, ça c’est le truc réussi. Il y avait aussi le côté centre social, avec les permanences qui devaient être la porte d’entrée, la base, et on était plein à aussi envisager ça comme un endroit que se seraient réapproprié beaucoup de gens du quartier, pour proposer des activités, ouvrir le lieu un peu tous les jours. C’est un truc qui a pas marché, on a pas vraiment réussi à faire en sorte que des personnes du quartier aient ne serait ce qu’un rapport utilitaire à la salle, pas forcément d’engagement politique. Il y a eu quand même l’atelier vélo pour lequel beaucoup de gens sont venus, et les permanences, et le jardin aussi qui était tenu par des gens qui habitent à côté et qui était un projet autonome, mais il y a eu assez peu de projets de ce type – il y a eu le bla bla bar aussi dans le même genre.
Le jardin c’est quoi ?
S : C’est deux personnes qui pendant toute une saison ont aménagé le jardin, fait des constructions, c’était vachement joli, ils avaient fait une petite fête.
Tu expliquerais comment ce moindre investissement des voisins ?
S : Il y a quelque chose dans la manière qu’on a eu de communiquer… par exemple il y a un parc qui est génial juste à côté à 300 mètres, pourquoi on y a jamais fait une seule fête ou un seul repas pour faire connaître le lieu ? Pour dire aux gens qu’ils pouvaient y faire des activités, des réunions. Comment on présentait l’Attiéké aussi ? Il y a des mots simples qu’on a pas dits ou écrits, avant de parler de « centre social auto-organisé », on aurait pu dire « c’est un local près de chez vous, gratuit, où on peut proposer des activités »
T : Il y a quand même des gens qui nous ont appelés, qui voulaient utiliser notre salle. C’est du temps long en fait.
Et vous croyez pas que la précarité du statut du lieu joue contre vous ?
T. : Si, bien sûr, Quand tu pars du début, personne n’aurait imaginé trois ans et demi, tout le monde aurait pensé six mois, et en fait chaque fois on avait cette échéance là… ça monte, ça redescend, et l’énergie aussi, c’est un peu le problème, vu que t’es toujours dans un temps précaire, tu t’organises en fonction. Je pense que les gens auraient pas réfléchi de la même manière s’ils avaient su que ça allait durer trois ans et demi, c’est assez exceptionnel. Ça joue beaucoup sur la motivation des personnes, ne pas savoir où tu vas, et c’est ultra épuisant de pas réussir à se projeter à plus de quelques mois, quand il y a des procès qui s’annoncent, et que tout dépend de ça.
J’ai cru comprendre que vous aviez des projets de réouverture d’un nouveau lieu, est ce que ce dont on parle ça fait partie des pistes pour un nouveau projet, ou est ce que vous êtes plus sur des questions de nécessités matérielles ?
T. : Ce qui est sûr, c’est que les permanences vont continuer à suivre les personnes qu’elles ont suivi, mais quand le lieu sera fermé, il y aura un temps de pause, de réflexion, pour voir comment redémarrer et avec qui.
Vous n’avez pas de nouveau projet très défini, pour l’instant ?
S. : Oui et non. En assemblée, il y a quand même plusieurs personnes – y compris des nouvelles – et notamment des habitants, qui disent vouloir continuer ce projet de centre social, retrouver un grand bâtiment avec un rez-de-chaussée. Actuellement on a pas vraiment ce bâtiment, peut-être que si on l’avait on se poserait moins la question de la pause. En tous cas perso, je sens pas le truc s’arrêter, on passe tellement de temps ensemble, il y a tellement de discussions. Il y a plein de gens qui disent que maintenant à l’Attiéké on a de l’expérience
T. : Comme dans tous les collectifs, c’est pas facile, et c’est pour ça que l’Attiéké c’est un joyeux bordel, avec des trucs qui vont pas du tout, et des trucs qui fonctionnent. C’est un peu à l’image du potager, des fois il y a des tomates qui poussent et c’est très bien, et des fois il y a un vieux canapé moisi qui traîne là et dont personne veut s’occuper. C’est la vie du squat quoi, un peu précaire, en dents de scie.
12e jour, mercredi 12 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon. Le tramway passe et repasse inlassablement sous nos yeux, et les rares piétons commencent à s’accoutumer à notre présence.
Interview avec L.
Qu’est ce qui te motive à participer aux piquets de l’Attiéké ?
Plusieurs choses. La première c’est… l’expulsion elle aura lieu mais le piquet c’est quand même le moyen de montrer notre mécontentement, on n’est pas d’accord avec ça. La deuxième chose, c’est qu’en ce moment– on en a parlé en AG, c’est un des aspects du piquet – mais c’est un des aspects qui me touchent le plus, c’est qu’on est dans un climat où il y a de plus en plus d’abus policiers et du coup, on se dit qu’être là au moment de l’expulsion, si l’expulsion a lieu quand on fait un piquet à partir de six heures, c’est un moyen d’avoir un œil sur la police, on se dit que plus il y a de monde plus il est possible d’éviter des abus policiers
Et tu trouves pas ça trop fatiguant comme mode d’action, sur le long terme ?
Je suis fatiguée, c’est vrai que la semaine dernière j’ai fait quasiment tous les piquets, mais cette semaine on essaie de se relayer, je pense quand même que c’est important ! Oui on est fatigués, on demande du soutien aussi, mais on essaie toujours de se maintenir, de faire en sorte de rester éveillés, on essaie de mettre une bonne ambiance, parfois on propose des jeux, parfois on chante, on est autour d’un café, d’un thé, on se réchauffe, on rit, et puis le matin on sait qu’on va retrouver les autres, si par exemple on est telles personnes prévues pour tel jour on compte les unes sur les autres, c’est le groupe qui fait qu’on oublie un peu la fatigue… pour l’instant !
C’est quoi pour toi l’Attiéké ? Tu dis que tu participes aux assemblées générales ?
Oui. Pour moi l’Attiéké c’est un centre social, c’est des habitants, c’est un endroit où il y a plein de choses qui se créent, où il y a plein de relations humaines, il y a une vraie vie politique en dehors de toute influence, qu’elle soit municipale, départementale… C’est quelque chose qui se crée entre les habitants, les soutiens, les extérieurs, les membres du collectif, c’est les enfants le dimanche, c’est les ateliers de français le mardi, c’est la permanence logement le lundi, c’est l’atelier vélo, c’est… un peu d’humanité dans ce monde de fou.
Et tu connaissais des expériences similaires auparavant ?
Non, je fréquente quelques assoces, qui ont pour but de créer du lien social à Saint-Denis, mais ce que je déplore c’est toujours le.. En fait pour moi les associations, les collectifs, c’est toujours un contre pouvoir, quelque chose qui sert aussi à limiter le pouvoir des municipalités, ou autres, et justement, dès qu’ils peuvent avoir la main sur les assoces, ils le font, et du coup on est un peu bloqués sur ce qu’on peut faire, ce qu’on peut dire, alors qu’ici c’est vraiment libre parce qu’il y a pas de parti politique, pas de subventions. Ça a aussi ses limites, mais c’est quelque chose qui m’a beaucoup intéressé.
Malgré la défense, le lieu risque d’être expulsé un jour, donc comment tu envisages la suite ?
C’est parce que je suis nouvelle, j’ai pas trois ans et demi de fatigue accumulée, j’ai encore énormément d’énergie, mais moi j’espère vraiment retrouver un lieu et pouvoir recommencer, comme un phénix renaît de ses cendres. C’est l’avenir qui nous le dira.
11e jour, mardi 11 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon.
Interview avec K.
Qu’est ce que c’est pour toi l’Attiéké ?
L’Attiéké c’est un endroit où plein de gens habitent, qui accueille beaucoup d’habitants, une quarantaine… moi je suis un habitant de l’Attiéké, ça fait trois ans que j’habite ici, l’Attiéké m’a aidé pour beaucoup de choses parce que quand je suis venu en France je connaissais personne… L’Attiéké risque de se faire expulser, on sait pas encore quand, on est un peu paniqués, on sait pas si on peut trouver un autre endroit, comment on peut l’ouvrir… J’aimerais bien que le collectif reste ensemble, qu’il soutienne ceux qui habitaient l’Attiéké… grâce à leur soutien, si on est solidaires, même si l’Attiéké dure plus très longtemps, on peut chercher quelque chose pour les habitants
Toi tu dis que l’Attiéké ça t’a beaucoup aidé, et de quelle manière exactement ?
Moi ça m’a aidé pour plein de choses… la première, d’abord, l’endroit, parce que j’avais pas d’endroit où dormir, je dormais à la rue, grâce à l’Attiéké j’ai trouvé l’endroit où j’ai dormi trois ans donc ça m’a aidé ça…. La première fois que je suis venu en France, j’avais pas d’endroit, je connaissais personne et j’allais retourner en Italie. Quand ils nous ont mis dehors au Guantanamo [2], mes amis étaient là, ils ont commencé à lutter avec la mairie, on m’a appelé, on a posé les tentes et on a dormi ensemble à côté de la mairie, donc grâce à la lutte je les ai connus… les soutiens de l’Attiéké. Et là aujourd’hui j’ai obtenu une carte de séjour, parce que grâce à l’Attiéké j’ai rencontré une copine qui m’a bien aidé…
Si j’ai bien compris ce que tu as dis tout à l’heure, tu aimerais qu’après l’expulsion, le collectif continue à fonctionner pour rouvrir tous ensemble ?
Oui, j’aimerais bien, si le collectif restait soudé, j’aimerais bien qu’on reste ensemble, qu’on lutte ensemble comme on a commencé ensemble. Par exemple, même quand on y a pas trop intérêt, on continue à dormir à la maison, parce que nous on veut intégrer la France et si on a des enfants, on continue de lutter pour eux, et ça va faire changer beaucoup de choses en France
Est ce qu’il y a des choses que tu aimerais voir changer ?
Je sais pas, je voudrais surtout continuer la lutte. Franchement, je voudrais remercier tous ceux qui sont solidaires avec les immigrés en France, qu’ils continuent leur travail. Même si c’est pas aujourd’hui, tôt ou tard les immigrés sentiront quelque chose, les soutiens français ont fait un bon travail.
10e jour, lundi 10 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon.
Interview avec la première volontaire
Pourquoi viens-tu au piquet matinal de l’Attiéké ?
Je viens au piquet matinal de l’Attiéké parce que je pense que c’est important d’avoir une veille quotidienne avant l’expulsion et surtout pendant l’expulsion, parce que ça peut mal se passer, parce que c’est un gros dispositif policier qui est censé intervenir pour évacuer ces trois étages et au moins une quarantaine de personnes, et du coup c’est important qu’il y ait des gens pour faire tampon avec la police et la manière dont elle va interagir, et prévenir au maximum les personnes qui sont dedans au moment où ça se passe… voilà. Faire un peu de « cop watching » dans la mesure du possible.L’Attiéké, c’est quoi pour toi ?
C’est un lieu que je fréquente régulièrement depuis trois ans, j’habite pas très loin, c’est un lieu où je viens faire des permanences, où on vient s’organiser, c’est un lieu de sociabilité aussi, c’est un lieu où on a fait des soirées, pour moi c’était un lieu important d’organisation collective depuis trois ans.Et comment tu vois la suite ?
À titre personnel je pense que j’ai besoin de prendre un peu de recul sur ce qu’il s’est passé pendant trois ans, sur ce qu’on a pu réussir, tous les échecs qu’on a pu avoir, ce qui a pu être difficile aussi, parce qu’entre les décisions politiques et ce qu’on arrive à organiser il y a souvent un grand fossé. Pour moi l’immédiat ça va être d’essayer de faire en sorte que personne ne se retrouve en situation de galère, et en même temps au niveau du centre social, en tous cas en ce qui me concerne, je vais prendre un tout petit peu de recul, et je voudrais que collectivement on arrive à trouver des moments pour réfléchir un peu...
8e jour, samedi 08 avril 2017 : La manifestation d’aujourd’hui s’est bien déroulée, nous étions une bonne centaine à défiler dans Saint-Denis sous le soleil printanier, la joie et la détermination étaient là même si on aurait aimé qu’il y ait plus de monde. Aux cris de « L’Attiéké vivra, l’Attiéké vaincra », « Des logement, il y en a, et on les aura ! », ou encore « Occupations, réquisitions ! », nous avons rendu visite à la mairie, coupable de mépris envers ses administrés les plus pauvres, à la préfecture, rouage de la mécanique des expulsions locatives, et fait quelques pauses devant les lieux emblématiques du mal logement à Saint-Denis. A bientôt pour la prochaine ! Quand au piquet matinal, nous étions peu mais nous étions là : il faut savoir que les expulsions peuvent avoir lieu le samedi aussi...
7e jour, vendredi 07 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon. L’ambiance et sympathique, et l’aurore sur le boulevard Marcel Sembat ne manque pas de charme... Des camarades en profitent pour s’entraîner au chant, et le café s’améliore.
6e jour, jeudi 06 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, et les flics ne sont pas réapparus
5e jour, mercredi 05 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, mais aussi de la surveillance policière, on a pu remarquer 6 passages de flics aux regards insistants,
4e jour, mardi 04 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon.
3e jour, lundi 3 avril 2017 : Le piquet a bien eu lieu, il y avait du monde, pas de flics à l’horizon.
1er jour, samedi 1er avril 2017 : le piquet a eu lieu à partir de 6h, pas de souci particulier. Il y avait du monde. Quelques photos :
Le premier appel à piquet et les revendications du collectif :