Quelques nouvelles de la transformation du Bas-Montreuil

Dans le Bas-Montreuil, quatre squats sont expulsables à la fin de la trêve hivernale, c’est-à-dire le 1er avril 2023. Il nous a semblé important de faire exister les récits des personnes qui habitent ces lieux et qui voient leur espace de vie se faire menacer.
Ces récits se retrouvent à la fois sous la forme d’une brochure mais aussi sous la forme d’une carte !

  • Mise à jour de la brochure et de la carte

    Des nouvelles versions de la brochure et de la carte sont disponibles en bas de l’article !

Qui sommes nous

On est un collectif plus ou moins formel composé de personnes vivant en squat, hébergé.es chez des potes, partageant des grandes collocs... On se réunit depuis presque deux ans pour s’organiser autour des questions de mal logement à Montreuil. Pendant plus d’un an, on a organisé des assemblées devant chaque conseil municipal avec notamment l’envie de faire pression sur la Mairie pour qu’elle adopte un arrêté municipal contre les expulsions. C’est un arrêté qui a été adopté dans différentes communes d’Île-de-France, mais toujours pas à Montreuil, commune historiquement communiste... L’année dernière, avec la fin de la trêve hivernale, on a monté un campement sur la place de la Mairie. On voulait visibiliser le fait que la fin de la trêve hivernale, c’est le retour des expulsions et donc des personnes qui sont jetées à la rue. On a campé pendant trois jours, fin mars 2022 et tout ça sous la neige, cocasse pour soi-disant la fin de la trêve hivernale ! la Mairie nous a coupé la seule source d’électricité qu’on avait sur le campement et en a profité pour mettre une amende au camion qu’on a utilisé pour transporter le matos. A la fin des trois jours du campement, on a eu aucune nouvelle du Maire ou de ses adjoints, on a donc décidé de lui rendre visite. On est rentré dans la Mairie à une vingtaine, couverture sous le bras et slogans à la bouche. Au bout d’une heure, on a obtenu un rendez-vous avez un adjoint du Maire pour parler de certaines situations à Montreuil, notamment le squat EIF (qui a finalement été expulsé en août 2022). Le jour d’après (le 2 avril) on a organisé un grand carnaval festif et revendicatif. Plus de deux cents personnes hautes en couleurs se sont réunies et ont déambulé dans la ville, entrainées par le rythme des batucadas et n’hésitant pas à redécorer les agences immobilières croisées en chemin. Arrivé à la mairie, on a été accueilli par des dizaines de CRS et la BRAV (unité de police à moto), une personne a été arrêté sur le moment, et plusieurs autres ont été arrêté des mois après suite à une enquête menée par la police judiciaire pour des faits de dégradation (on parle de quelques tags sur des vitrines !) .

Aujourd’hui, on est un an plus tard et on se retrouve encore pour le Grand Carnaval contre les expulsions ! En un an, la ville a bien changé, de nouveaux squats ont ouvert, d’autres ont été expulsé ou vont bientôt l’être. Malgré le manque d’eau sur le territoire, les résidences pour riches, elles, n’ont pas de mal à pousser. Partout on voit s’afficher des permis de construire et de démolir. On nous parle de grands projets de restructuration urbaine, de plans de rénovation, de lutte contre l’insalubrité, du 21e arrondissement Paris, de l’arrivée de la ligne 11 et du tram, du Grand Paris... On a quelques infos par ci par là, des concertations sont organisées, mais nous, les habitant.es qui galérons à nous loger dans de bonnes conditions à Montreuil, on sent bien que la ville elle n’est pas pensé pour nous, on sent bien qu’on dérange. Qu’à la place de nos squats et de nos grandes collocs bricolées, les « aménageurs » du territoire rêvent de grands ensembles lisses. Qu’à la place de nos cantines populaires, ils espèrent voir fleurir des snacks bio et végan. Que les petites enseignes, taxiphones et épiceries font taches quand elles se trouvent entre un barber-shop et une boutique de CBD. Que les personnes qui persistent à trainer sur la place de la République, qui posent leurs tentes et allument des braseros en partageant une bière, que ces personnes-là sont perçues comme des indésirables. Les promoteurs rêvent d’individus qui traversent les espaces, surtout pas qu’ils s’y ancrent, qu’ils s’y attachent, qu’ils y revendiquent un droit d’usage. L’espace doit être lieu de consommation et non pas de vies et de résistances.

Nous, comme beaucoup d’autres, on essaye de faire face à ces processus qui rendent tout marchand. On organise des banquets, des déambulations, on participe à des ouvertures de squats...Mais tout va tellement vite qu’on sait plus trop où donner de la tête. Les flics sont toujours plus nombreux et équipés pour écraser les résistances, les proprios se sentent toujours plus en confiance pour faire appel à des gros bras et expulser des squatteur.euses par la force, la législation anti squatteur.euses et « mauvais » locataire se renforce à l’image du nouveau projet de loi Kasbarian qui est débattu en ce moment à l’assemblée. La mobilisation contre la réforme des retraites concentre beaucoup de forces et d’énergies. Alors nous dans tout ça, on a voulu écrire cette petite brochure. On a voulu faire exister les récits de celles et ceux autour de nous qui persistent à Habiter Montreuil, qui persistent à faire exister d’autres rapports aux autres et au monde. Ces récits ne sont bien sûr pas exhaustifs, n’hésitez pas à nous écrire pour ajouter votre contribution ! (assemblee-mal-logee@riseup.net)

Localisation : Montreuil

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