Contre la transphobie, riposte antifasciste

Quelques perspectives de ripostes trans et antifascistes à la veille des nouvelles législatives

La proposition de loi à l’encontre de la prise en charge des personnes trans mineures déposée par Les Républicains a été votée par le Sénat le 28 mai. Cette proposition de loi vise à interdire l’accès aux bloqueurs de puberté aux personnes mineures qui en feraient la demande, rendant ainsi cruellement inaccessibles des outils médicaux et administratifs existants et nécessaires.

En parallèle, la dissolution de l’Assemblée Nationale suite aux élections européennes du 9 Juin 2024 où le RN est arrivé en tête s’inscrit par ailleurs dans une séquence de radicalisation des débats, de percée décisive des idées d’extrême-droite et de fascisation des institutions. La perspective d’une assemblée où la droite conservatrice et le RN se trouvent majoritaires et sans aucune force d’opposition organisée en face d’elleux ouvre la perspective alarmante de l’adoption définitive de cette loi et de l’approfondissement morbide de l’offensive réactionnaire transphobe, raciste, antiféministe et répressive en cours. Là où le narratif dominant lors du premier passage de ce projet de loi transphobe au Sénat était au « rassurisme »- supposant que le texte ne trouverait pas de majorité à l’assemblée - la perspective d’une large majorité réactionnaire et fasciste (libre à vous d’où ranger Renaissance ici) à l’Assemblée fin juin vient très largement battre en brèche l’hypothèse qu’une telle loi ne passerait jamais. La séquence politique dangereuse qui se déroule sous nos yeux démontre l’absolue nécessité de tenir ensemble les luttes antifascistes, antiracistes, féministes et contre l’homophobie et la transphobie.

Refuser l’accès à ces traitements aux personnes mineures, c’est forcer celleux qui en ont besoin à endurer des changements physiques dûs à la puberté qu’iels ne désirent pas et les priver d’outils précieux dont iels pourraient avoir grandement besoin pour vivre, survivre de façon urgente. Repousser à la majorité tout accès aux médicaments permettant d’agir sur son expression de genre constitue un déni de réalités quant à la difficulté de certains vécus trans durant l’adolescence, quant à la surexposition des personnes trans au suicide, quant au poids de la transphobie dans nos quotidiens et celui de nos adelphes. Le Trans Day Of Remembrance (TDOR) que nous célébrons chaque année rappelle cruellement ces réalités-là, et le besoin de les prendre à bras le corps en rendant aussi large que possible l’accès aux outils médicaux existants pour soutenir les personnes qui le souhaitent dans leur transition - et ce à tout âge !

Nous vomissons à l’écoute de celles et ceux qui prétendent, par cette proposition de loi, vouloir « protéger les enfants » alors que sont mis en péril les droits et les vies... des enfants trans ! Les parcours de transition ne sont pas une erreur à éviter, mais un chemin de vie complexe et beau sur lequel chacun.e peut avoir envie - et doit avoir le droit - de s’expérimenter et de s’épanouir. Un chemin qu’il est parfois nécessaire d’emprunter tôt pour pouvoir tout simplement survivre. Ce mépris de la vie et de l’intégrité des mineur.x.es trans fait par ailleurs échos au laisser-faire et à l’impunité existants concernant les mutilations pratiquées sur les enfants intersexes. L’objectif ici est donc moins de protéger les enfants que de leur retirer toute possibilité d’autodétermination et de (ré)assigner de force leurs corps à la norme cissexiste.

La panique morale alimentée depuis quelques années autour du concept de genre prend tout particulièrement pour cible les personnes trans, leurs vécus et leurs droits. Autour de cette haine aveugle se constitue un front transphobe rassemblant tous les conservateurs : de l’extrême-droite la plus ouvertement néo-nazie aux « »« »féministes« »« »« essentialistes. Ensemble, iels construisent ce sujet comme un vecteur de fascisation des débats, alimentés par des mensonges, des témoignages biaisés et autres arguments de »bon sens" éventés - par ailleurs disqualifiés scientifiquement.

Cette proposition de loi s’inscrit plus largement dans une offensive antiféministe, homophobe et transphobe internationale. La France contribue à plein à cette dynamique, n’en déplaise aux ravi.es de la crèche qui se satisferont de l’inscription toute théorique de l’IVG dans la constitution quand ferment des services et cliniques - qui sont les seuls moyens concrets de garantir l’accès réel à ce droit. Déjà en janvier, Attal avait annoncé la couleur dès son arrivée au poste de premier ministre en promettant de sonder la fertilité des jeunes pour « remettre les utérus » au travail au sein de son projet capitaliste, nationaliste et suprémaciste. Nous refusons en bloc ce projet de société fascisant basé sur la famille nucléaire hétéro en vue d’augmenter la production de travailleur.euses, de flics et de soldats - et nous n’aurons de cesse de nous y opposer par tous les moyens. Aujourd’hui, la dissolution de l’Assemblée Nationale promet d’ouvrir grand les urnes aux fascistes et à leurs héritier.es dès la fin du mois dans un contexte où l’appareil d’État a déjà été, lourdement utilisé par Macron et son parti à des fins répressives et autoritaires. Nos libertés et nos droits s’en trouveront nécessairement mis à mal, et seules des alliances fortes et complicités réelles pourront nous permettre de tenir ensemble et de riposter comme il se doit.

Face à cela, nous affirmons notre dégout pour les « bonnes mœurs », notre volonté d’émancipation, notre droit à l’épanouissement et à la vie belle. Nous, militant.x.es antifascistes, lutterons tant qu’il le faudra aux côtés de nos adelphes trans, quand nous ne le sommes pas nous-même, pour l’autodétermination pour tous.x.tes et de chacun.x.es. Nous lutterons sans relâche contre le mépris hétérocissexuel pour les vécus trans.

Et quelles que soient vos lois mortifères, sachez que nous partagerons nos ampoules et nos savoirs, que nous créerons nos propres refuges, et que nous vous crèverons les yeux avec nos poings médians. Alors que débute tout juste le mois des fiertés, rappelons-nous que Stonewall était une émeute.

Nous serons présent.es le 16/06 à la Pride Radicale.

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