Nous avons appris il y a peu qu’une vidéo de la manifestation du 18 mai a été donnée à la justice par le cabinet de maitre Thierry Levy, l’avocat de deux mis en examen, au motif qu’elle aiderait à disculper un de ses clients (sans que l’on sache si celui-ci a donné son accord à cette initiative). Sur cette vidéo, qui n’avait pas été diffusée jusqu’alors et n’était pas entre les mains des flics, la police a identifié au moins trois personnes : un des mis en examen dont l’avocat a fourni la vidéo, une personne qui était déjà mise en examen dans cette affaire et une troisième personne qui a été interpellée et mise en examen peu de temps après que la vidéo figure au dossier. Il s’agit d’une septième personne mise en examen dans cette affaire.
Une instruction est toujours en cours. Les chefs d’accusation sont lourds (notamment « tentative d’homicide volontaire sur personne dépositaire de l’autorité publique ») et la police recherche encore, entre autres, la personne qui aurait lancé le fumigène. Vu l’ampleur de l’appareil répressif déployé dans le mouvement contre la loi travail et plus particulièrement sur cette affaire, donner cette vidéo aux flics, c’était s’exposer à des conséquences qui risquent bien d’être gravissimes.
Précisons qu’un autre avocat a eu connaissance de cette vidéo et a souligné qu’elle est dangereuse pour la défense. En effet, tout document qui apporte des éléments, même en apparence insignifiants, sur les mis en examen ou d’autres personnes peut être utilisé par la police, mettre la défense en danger et conduire à de nouvelles arrestations.
Cet acte, déjà grave en soi, met aussi en échec toute possibilité de défense commune. En effet, la défense et les proches des personnes déjà concernées — dont l’une est reconnaissable dans la vidéo— n’ont même pas été informés.
Lorsque le problème a été soulevé, l’hypothèse d’un changement d’avocat a été écartée et, à notre connaissance, l’avocat en question n’a pas été viré et représente toujours deux mis en examen. On nous a fait comprendre, ainsi qu’à d’autres, qu’il fallait se taire et accepter plutôt que réagir et dénoncer le problème. Ce qui aurait pu être une erreur devient un procédé dégueulasse. Nous considérons que c’est un choix dangereux et individualiste, irrespectueux des mis en examen actuels et à venir, et en contradiction totale avec une volonté de défense collective. Ce n’est pas la première fois que des menaces plus ou moins voilées ont été exercées dans le cadre de cette affaire.
Defcol considère que les conséquences de ces pratiques et ce désaccord politique, ainsi que la manière dont cela a été géré, ont démontré une fois pour toutes l’échec du comité du 18 mai à organiser une défense collective des mis en examen dans l’affaire de la voiture de flics brûlée. En plus du désaccord fondamental sur les méthodes de la défense, la confiance, essentielle à toute possibilité de fonctionnement commun a été rompue. Aucune collaboration n’est envisageable sur ces bases et dans ce climat délétère.
Aujourd’hui, Defcol ne peut donc que dénoncer ces pratiques dangereuses et prendre acte de cet échec en ne participant plus à un comité qui n’a plus lieu d’être. Nous continuerons à rassembler les bonnes volontés pour contribuer à une défense collective des mis en examen qui souhaitent poursuivre dans cette perspective.