Le matin du 24 juin 2022, environ 1500 migrants subsaharien.es se sont élancé.es depuis une petite ville du rif marocain – Beni Ensar – pour franchir le triple grillage qui clôture l’enclave espagnole de Melilla. Ces milliers de personnes ont tenté de forcer l’une des deux seules frontières terrestres entre l’Afrique et l’Europe. Selon l’Association marocaine des droits humains (AMDH) de Nador, au moins 27 exilé.es ont été tué.es lors de cette « frappe » sur le poste frontalier de Bario Chino et 64 sont toujours porté.es disparu.es. Dernièrement, le journal Le Monde (7 octobre) relatait presque machinalement les peines de prison aggravées qui sanctionnaient 18 migrants africains d’avoir tenté de passer la frontière. Comme si le « drame de Nador-Melilla », dont le bilan humain est le plus lourd pour ce type de tentatives, était le fait de ces personnes et de leurs violences. Un ami a tenté d’y voir plus clair, en faisant le tri parmi les articles, les images et la propagande occidentale mais aussi en recueillant la parole de quelques personnes qui avaient tenté de passer la frontière ce 24 juin.
La plupart des images sont tirées du documentaire d’Africa eye BBC « mort à la frontière » disponible sur YouTube
Le matin du 24 juin 2022, autour de 1500 subsaharien.es se sont élancé.es depuis une petite ville du rif marocain – Beni Ensar – sur le triple grillage qui clôture l’enclave espagnole de Melilla. Ces milliers de personnes noires – migrant.es, transmigrant.es, exilé.es, réfugié.es, selon qu’elles soient désignées dans un registre médiatique et politicien, universitaire, humanitaire et militant, ou voyageurs-aventuriers lorsqu’elles se racontent elles-mêmes – ont tenté de forcer l’une des deux seules frontières terrestres entre l’Afrique et l’Europe pour aller y « chercher leurs vies ». Selon l’Association marocaine des droits humains (AMDH) de Nador au moins 27 exilé.es ont été tué.es lors de cette frappe sur le poste frontalier de Bario Chino et 64 sont toujours porté.es disparu.es.
Ceuta et Melilla – vestiges de la colonisation espagnole, régulièrement contestées par le Royaume chérifien – ont toujours été l’une des voies privilégiées d’accès à l’Europe. Depuis deux décennies, les voyageurs illégaux s’organisent dans des programmes discrets à quelques dizaines ou dans des assauts massifs à plusieurs centaines, voire milliers de personnes pour franchir les grillages, incessamment renforcés, érigés pour les contenir à distance de l’Espagne, et depuis deux décennies, un nombre littéralement incalculable d’entre elles y trouvent la mort en exerçant, de facto, leur droit à la libre circulation. Comme sur l’ensemble des zones frontalières du Royaume, les autorités marocaines minimisent le nombre de décès et s’en tiennent aux corps impossibles à cacher, mais ce n’est que la partie émergée de l’iceberg et les témoignages de disparitions « forcées » s’accumulent auprès des associations.
Si le massacre de Bario Chino peut être qualifié d’épisode le plus meurtrier aux frontières terrestres du Maroc, ce n’est pas la première journée sombre de l’histoire des enclaves espagnoles et les collectifs d’exilé.es s’attendaient à ce que de tels drames adviennent de nouveau. Ce sont les vidéos d’une violence insoutenable, comme celles montrant des corps gisants sur le sol et frappés par les agents marocains, captées sur le vif et répandues sur les réseaux sociaux, qui ont contraint les autorités marocaines et espagnoles à reconnaître officiellement le décès de 23 exilé.es.