Le jour, tu grèves, la nuit, tu sabotes

Une grève très suivie et reconductible a débuté le jeudi 5 décembre 2019. La grève, c’est le nerf de la guerre. Mais la grève, c’est aussi le grignotement de nos salaires déjà pas bien gros. Comme complément de lutte qui ne vide pas nos frigos, on peut saboter la nuit. On en parle ici dans un sens étendu dans lequel on inclue autant les actes solitaires discrets (ceux recensés par exemple sur attaque.noblogs.org) que ceux se déroulant lors des manifestations de nuit : une pratique qu’on aimerait justement voir revenir.

Voilà comment Wikipedia définit le sabotage.

Le sabotage est l’action de détériorer, mettre hors d’usage volontairement et le plus souvent clandestinement, du matériel, des machines, des installations militaires ou civiles, ou de désorganiser et de compromettre le succès d’un projet, d’une entreprise.

Les réformes successives nous plongent toujours un peu plus dans la précarité. Cette restructuration incessante du capitalisme, c’est le projet qu’on combat.

Le jeudi 5 décembre 2019, comme lors des autres gros rendez-vous qui suivront, on ne s’éternisera pas sur la place d’arrivée de la manifestation (Nation cette fois). Les affrontements pierres et bouteilles de verre contre LBD40 à visée laser et grenades GLI-F4 au TNT ne nous mettent pas - et c’est le moins qu’on puisse dire - dans une situation avantageuse. Et puis, on l’a vraiment mauvaise avec encore ce nouvel éborgement, celui de Manuel, sur la Place d’Italie, à l’occasion de l’anniversaire des Gilets Jaunes, le 16 novembre dernier. Par contre paralyser le centre de Paris et y foutre un bordel monstrueux nous réjouit un peu plus et nous parait un peu moins risqué.

Le truc c’est que la plupart des actes de sabotage se font discrètement dans une certaine forme de solitude. Qui a entendu parler de la bagnole de l’Est Républicain qu’ont cramée Gilles&John pour leur « anniversaire » histoire de signifier à ce torchon collabo que tant qu’il balancerait les photos des manifestants aux flics, le journal constituerait une de nos cibles. Des sabotages comme ça, il y en a à la pelle et c’est toujours intéressant de lire les communiqués sur attaque.noblogs.org.

Tout le monde ne se sent cependant pas capable de poser des allume-feux sous la bagnole d’un média collabo. Alors on va parler d’un truc ici un peu plus inclusif et qui nous manque en ce moment : les manifs de nuit. Dans la suite, on donne deux exemples qui nous ont particulièrement marqué.

Le 31 Mars est un bug dans la Métropole-Matrice

31 Mars 2006 : barroud d’honneur du mouvement victorieux contre le CPE

David Dufresne, dans son Quand la France s’embrase, sur les émeutes de banlieues et le mouvement contre le CPE, mentionne cette manifestation qui a lieu pile le jour où Chirac annonce le maintien uniquement formel du CPE (le contrat en lui-même ne sera pas utilisé) :

Le Parti Imaginaire dans la préface de Maintenant, il faut des armes, édition La Fabrique, la résume comme suit :

Le 31 mars dernier, une manifestation sauvage de 4000 têtes dure plus de huit heures, de l’intervention du président de la gâteuse République – il vient d’annoncer au journal télévisé le maintien du CPE – à quatre heures du matin. Elle veut aller sur l’Élysée, oblique à la Concorde sur l’Assemblée nationale, qu’elle échoue à investir par manque de matériel, d’armement, même chose pour le Sénat. Au fil de la marche, la détermination croît. Une scansion martiale la porte : « Paris, debout, réveille-toi ! » C’est un ordre. Sur le boulevard de Sébastopol puis de Magenta, les vitrines des banques et des agences de travail intérimaire commencent à tomber une après l’autre, méthodiquement. Des prostituées de Pigalle saluent d’une fenêtre. La foule monte en courant sur le Sacré-Cœur au cri de « Vive la Commune ! » La porte de la crypte ne cède pas ; dommage, on aurait pu l’incendier. En redescendant, dans une petite rue, au troisième étage, une dame en nuisette est accoudée à son balcon, elle a mis à tue-tête Les Mauvais Jours finiront. La permanence de l’infect Pierre Lellouche va bientôt être saccagée. Il est trois heures du matin. Le passé ne passe pas. L’incendie de Paris sera le digne achèvement de l’œuvre de destruction du baron Haussmann.

31 Mars 2016 : Nuit Debout, 40 Mars 2016 : Apéro chez Valls

Presqu’un peu magiquement, Nuit Debout commence exactement 10 ans après. Durant les premiers jours, c’est manif sauvage au programme chaque nuit. C’est lors de la 9e, le 40 mars 2016, qu’a lieu l’ « Apéro chez Valls ». Un souvenir mémorable pour beaucoup d’entre nous.

Pour plus de détails sur cette nuit particulière et les sabotages qui se sont déroulés, on pourra consulter ce compte-rendu :

ou le montage vidéo qu’avait fait Street Politics :

La grève et les blocages sont le nerf de la guerre. Mais le sabotage, c’est the cherry on top.

Rendez-vous le jeudi 5 décembre et au delà !