La responsabilité des flics dans la mort de Phillipe, le 23 mai à Drancy est accablante

Dans la nuit du 23 au 24 mai à Drancy, la compagne d’un homme de 36 ans, toxicomane et alcoolique, appelle la police pour « le protéger ». Grave erreur, car les flics, peu empathiques envers les déviants, ont réglé le problème en tuant Phillipe. Encore une fois, les techniques d’immobilisation sont mises en cause.

  • L’autopsie du corps de Phillipe, tué à Drancy par les flics conclue à une asphyxie

    C’est assez rare pour être noté, le rapport d’autopsie est favorable à l’accusation. En effet, d’après le Parisien les médecins ont conclu que :

    le décès résulte d’une asphyxie mécanique par compression cervicale associée à un traumatisme crâno-facial

Terrible drame une nouvelle fois, illustré dans un article du Parisien.
Karen, la compagne de Phillipe, qui offre un témoignage poignant sur les circonstances de la mort du père de famille :

« C’est moi qui ai appelé la police ce soir-là et je porterai toute ma vie un sentiment de culpabilité, admet cette mère de famille. Mais si j’ai appelé la police, c’était pour le protéger pas pour le tuer. »
Elle raconte que les addictions de son conjoint avaient eu raison de leur couple au point qu’elle lui demande de partir, fin 2017. « Il avait fait deux cures de sevrage, mais il avait rechuté », confie Karen.

Depuis décembre, Philippe F. avait l’interdiction de s’approcher de son ex-compagne, dans le cadre d’un contrôle judiciaire. Il aurait dû être jugé le 29 mai au tribunal pour des violences et dégradations, après avoir défoncé la porte d’entrée de son ex, le 10 décembre 2018.

Une situation, qui, à n’en pas douter, sera mise en avant dans la gestion de l’affaire. Tuer un homme violent c’est moins grave qu’une personne « respectable ». Tuer un alcoolique, c’est moins grave que tuer une personne sobre. Tuer un toxicomane, c’est moins grave que de tuer une personne « clean ». Terrible constat social largement utilisé par l’avocat des flics.

Et pourtant, Karen ne s’y résout pas :

« Il lui est arrivé de me pousser, mais il ne m’a jamais tapée, répète sa veuve, il souffrait qu’on ne soit plus à côté, moi je voulais qu’il soit enfermé pour qu’il arrête de replonger, qu’il se coupe des dealers, des épiceries qui vendaient de l’alcool, j’étais sûre qu’il y aurait un drame sinon. » Des addictions confirmées par un ami très proche, selon qui « Philippe n’allait pas bien, mais envisageait de repartir en cure, et voulait voir son fils ».

Une situation personnelle très difficile donc qui donne lieu à des agitations et des situations très violentes. Le soir du 31 mai, il essaie de revoir sa femme, complètement ivre. Karen appelle la police.

« Mais on a entendu des cris, on s’est mis à la fenêtre, Philippe se prenait des coups. Mon fils de 26 ans lui a dit : Philippe laisse toi faire ce soir, demain tu sortiras… Philippe s’est écarté, il était prêt à capituler. Mais il ne voulait pas être menotté. Il a dit : laissez-moi dire au revoir à ma femme et je vous suis. C’est sa dernière phrase. »

Elle fond en larmes. « Il les a juste repoussés, pas frappés, poursuit-elle. Ils ont voulu le faire tomber avec la matraque télescopique, ça a été si violent qu’elle s’est envolée, et c’est mon fils qui l’a reçue. Ensuite j’ai vu Philippe au sol, sur le ventre, menotté. Il était tout blanc, les lèvres bleues, je ne comprenais pas. Pour moi, il était encore vivant, mais inconscient. J’ai proposé une couverture, mais on m’a dit de remonter. »

Des premiers éléments, qui ont fait l’objet d’un communiqué du parquet, il ressort que [Philippe F.] « se débattait, que l’un des trois fonctionnaires a pratiqué un étranglement permettant de le maîtriser », et qu’après cela, il « a sombré rapidement dans l’inconscience ».

Autre preuve que la responsabilité des flics est engagée : l’institut médico-légal fait la rétention du corps.
Pour l’instant les proches de Phillipe n’ont pas pu voir son corps ni enclencher des procédures d’enterrement. Au-delà de l’aspect traumatique de cette pratique ignoble, c’est bien évidemment pour maquiller des preuves que les flics gardent le corps.
Ce doute est appuyé par le fait que les flics ont imposé à un voisin d’effacer la vidéo du meurtre.

Encore une fois, les policiers ont tué une personne en état de grande fragilité. Comme Babacar Gueye à Rennes, comme Shaoyao Liu à Paris, comme un anonyme en 2016 dans le Val de Marne. Ces drames ne sont pas isolés. Il s’agit d’abord de pratique, en premier lieu les techniques d’immobilisation, d’étranglement, qui ont comme effet collatéral de tuer un nombre non négligeable de personnes. Ici c’est visiblement une technique d’étranglement qui a encore tué. Le tout se fait dans une relative impunité. L’exemple le plus frappant étant celui de Hakim Ajimi à Grasse, tué devant une vingtaine de témoins qui demandaient aux flics d’arrêter. Ces derniers ont été condamnés à des peines dérisoires.

Enfin, le conditionnement psychologique des flics à intervenir. Ces cow-boys se prennent tellement pour des justiciers et fonctionnent tellement à l’influx que quand ils arrivent dans les zones « sauvages » du 93, ils se croient tout permis.

Résistons aux violences policières. Karen, tu n’es pas toute seule.

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