La double journée, la double manif !

Petit récit d’une participante à la Manifestation des Femmes Gilets Jaunes ce dimanche 6 janvier à Paris.

L’appel à la manif sur les réseaux sociaux invitait à se rendre à Paris pour 10h00 et vers 10h30 le lieu de la manif serait annoncé.

Le rendez-vous à été fixé à Bastille, 11h00.

Votre rédactrice arrive en retard et rate le début. Elle apprendra par la suite par des manifestantes qu’une tentative de partir par le faubourg Saint-Antoine a échoué, que la manifestation s’est mise en route vers République par Richard Lenoir, et que sur le boulevard Beaumarchais, tout le monde s’est mis à genoux pour une minute de silence en l’honneur des morts du mouvement et des victimes des violences policières.

Retrouvant le cortège vers République, je me joins à une multitudes de femmes, de tout âge, allant de la petite fille à la grand-mère. La plupart en gilet jaune, quelques-unes sans, et beaucoup de ballons de baudruche jaunes. Quelques hommes sur les bords qui semblent s’être missionnés sur la sécurisation du cortège, mais il semble que personne n’en ait vraiment que faire.

J’estime à la louche qu’il y avait au moins 1000, 1500 personnes, peut être un peu plus un peu plus tard.

À République, le cortège se lance vers Châtelet, mais la police bloque et nasse une partie du cortège, des manifestantes font le tour par une rue derrière, renforcent le cortège, quelques unes essaient de parler avec les bleus, mais finalement une solution plus efficace est mise en œuvre : la ligne de flics est enfoncée. Tout le monde court sur la place de la République et repart joyeusement sur le boulevard Magenta.

Cortège bloqué à République

Beaucoup de bonne humeur, de rires, d’échanges, de sourires, des chants, « Macron t’es foutu, toutes les femmes sont dans la rue », et l’indémodable « Emmanuel Macron grosse tête de cooonnn... »

Remontant le boulevard, on voit des camions de CRS qui le redescendent tout prêt à bloquer.

S’en suit un moment de flottement, une partie de la manif s’engage dans une petite rue à gauche qui débouche sur le faubourg Saint Martin. Un groupe resté immobile sur le boulevard s’interroge, une femme se fâche car elle trouve honteux que les organisatrices de l’évènement ne soient pas là en tête de cortège pour guider la manifestation… mais elle semble un peu seule dans son énervement, car la plupart se foutent de savoir s’il y avait un trajet de prévu, et encore moins s’il est respecté.

Beaucoup de toutes façons voulaient aller à l’Élysée.

Descente du faubourg, une partie se faufile par un petit passage sur la droite et tout le monde se retrouve sur les grands boulevards, les gens du quartier nous regardent passer, étonnés, amusés et souvent solidaires dans les gestes et les mots. La marche est rapide, j’aperçois une femme enceinte dans le cortège, qui s’efforce de garder le rythme.

Remontée des Grands Boulevards

On continue sur les grands boulevards, et à hauteur du métro du même nom, les flics se rapprochent, une ligne de flics prend la tête du cortège. Derrière la manif, les gros renforts.

Et là, à cette fourche qui permet de choisir entre la direction Saint-Lazare ou Concorde, les flics s’affolent. Ils ne veulent pas qu’on aille vers Saint-Lazare. Un petit groupe essaie de forcer, s’en suit un gazage, bousculade, un flic gazé par un collègue est tout rouge, en pleurs… Le gros du cortège est déjà parti vers Opera, le petit groupe abandonne l’autre chemin.

Sur les marches de l’Opéra, les femmes regroupées entonnent la Marseillaise. J’en profite pour faire un tour et discuter avec des participantes. Rapidement, vu le nombre de camions de police arrivés par tous les côtés, la place est nassée. Au dehors de la nasse, les rencontres se poursuivent, et on reste au contact des cordons pour échanger avec l’intérieur. Deux infirmières en blouse blanche et gilet jaune par dessus sont restées en dehors parce qu’elles doivent aller chercher leur enfant. Une parisienne du 10e venue toute seule aujourd’hui, avait fait la manif hier avec 2 copains, elle trouve qu’il n’y a pas beaucoup de parisiennes. Une mère nous confie sa fille, pour aller prendre des photos dans la nasse, la petite est dégoutée, elle voulait rester dans la nasse. Elle a un air sérieux. Une femme en fauteuil roulant, pas électrique, qui a fait toute la manif poussée par ses 2 copines qui se relayaient. C’est elle qui avait absolument insisté pour venir. On habite le même quartier, on échange nos numéros, on se tiendra au courant.

Une jeune femme qui, interviewée par une femme d’une radio coopérative, déroule une franche leçon d’anti-capitalisme, en parlant de la violence des classes riches qui vivent sur le dos des pauvres, et de la condition des femmes, souvent les plus précaires… et à la question : mais alors que voulez-vous ? Elle tourne la tête vers moi, semble indécise, et répond « ben le RIC », mais on sent bien que ce n’est pas ça, qu’elle n’y croit pas vraiment, et qu’elle dit ça dans le jeu de l’interview pour donner une réponse… et tout ce qu’elle a dit avant ne se satisfera jamais d’un quelconque RIC.

La nasse a duré jusqu’à 16h00 à peu près, et un rendez vous circulait pour aller au Trocadéro.
Finalement un groupe a fini sur les Champs Élysées...

Localisation : Paris

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