Cette année post confinement aura vu fleurir bon nombre de Pride radicale, un petit peu partout en France. Signe d’un sursaut politique que l’on aurait pu croire éteint à cet endroit. Dans notre dernier numéro, une critique de la Pride radicale de Paris mettait en lumière le paradoxe existant entre une charte comportementale destinée à rendre l’évènement le plus inclusif possible, pour toutes et tous, et le quadrillage en résultant, ne permettant pas à l’évènement d’ouvrir un espace de liberté et renvoyant chacun à la mise en question de la légitimité de sa présence.
La Pride Radicale de Rennes se déroula sous d’autres auspices. On peut ainsi lire sur l’évènement Facebook proposé par le Front Révolutionnaire Anti-Patriarcal : « face aux Prides dépolitisées, à la précarisation de nos vies et aux agressions d’extrême droite (…) Tout le monde est convié, concerné.es ou allié.es, mets ton masque ou ta cagoule à paillette et rejoins-nous ! »
Nous avons répondu à l’appel.
Il nous semblait essentiel de revenir sur cet incroyable moment qui augure, nous l’espérons, une vitalité politique queer et débordante.
Initialement paru sur TROUNOIR.ORG
Un grand merci au photographe Oli Mouazan de nous permettre d’utiliser ses clichés de la Pride.
Le rendez-vous indiquait 13h au début du mail François Mitterrand. À l’heure pile, nous n’étions encore qu’une cinquantaine. Mais déjà très visible. Autant d’originalité et de style ne passent pas inaperçus. Et si notre apparence ne dit rien de notre être, elle ne manque pas d’adresser au monde, par mille signes, sous quels augures nous nous situons, nous prenons parti. Très vite, notre nombre double puis triple. Le discours des présences laisse maintenant la place aux énoncés et aux slogans qui apparaissent sur des banderoles posées au sol et des pancartes. « Zbeul ton genre », « PMA pour toutes », « personne n’est illégal », « fier.es deters feu aux frontières » ou encore « Révolution féministe ». Nous sommes maintenant plus de 300 et il devient difficile de se compter. La musique commence à se faire entendre. Il ne s’agit pas d’un char, mais d’un dispositif ingénieux fixant une enceinte sur un fauteuil roulant permettant de suivre « de l’intérieur » les rythmes de la manifestation. On distribue des flys sur lesquels sont inscrits des slogans ainsi que des masques, des loups de couleurs en velours. Le soleil brille et la manifestation est sur le point de démarrer.
En ce samedi 16 octobre, la situation est incertaine. Le samedi est jour de commerce, jour du marché des lices et aussi jour des manifestations anti-pass sanitaires. Une manifestation « des logements pour tou.te.s » était également appelée à 15h depuis l’esplanade Charles de Gaulle. Autant d’éléments pouvant laisser craindre un flicage de la manif ou du moins un bouclage des rues du centre. Depuis les remarquables manifestations contre la loi travail en 2016 envahissant régulièrement le centre-ville et politisant la place de l’économie dans nos vies à grand renfort de bris de vitrines, le centre-ville a été sanctuarisé, bouclé, interdit.
La manif, dynamique et festive, démarre sans encombre et sans présence policière. Les banderoles sont déployées et semblent pouvoir résister à tout (...)