Quand on comprend que les grenades sont un enjeu stratégique pour la doctrine du maintien de l’ordre…

Le 2 décembre 2014, soit un peu plus d’un mois après l’assassinat de Rémi Fraisse par le maréchal des logis Jasmain, qui avait cru utile de lancer une grenade offensive de type OF F1 par-dessus une grille pour disperser des manifestants en pleine nuit, l’Inspection générale de la Gendarmerie nationale rendait son rapport sur le déroulé des événements.

Le déroulé des faits qui ont conduit à la mort de Rémi Fraisse

Dans le rapport de l’IGGN, on apprenait notamment que l’escadron de Gendarmerie mobile 28/2 était venu à minuit relayer l’EGM 47/3 sur la zone de Sivens, où le commandement du Groupement tactique de gendarmerie (GTG) s’était mis en tête de garder le contrôle jusqu’au lundi matin sur un terrain vague entouré de fossés et de grille appelé « zone de vie » et qui ne comprenait alors guère plus qu’un reste d’algéco incendié la veille. Les effectifs de cet escadron étaient de 72 gendarmes mobiles, composant 4 pelotons appelés Alpha, India, Charlie (divisé en deux) et Bravo.

Le rapport dit que les gendarmes subissent des jets de projectiles à partir de 00h25, soit juste après leur arrivée sur place, et font les premières sommations à 00h35 depuis un véhicule avec haut-parleur.

À 00h49, les gendarmes tirent les premières grenades lacrymogènes.

À 01h03, les gendarmes tirent les premières grenades à effet de souffle (contenant de la TNT), les grenades lacrymogènes instantanées (GLI F4) et les grenades offensives (OF F1). À partir de ce moment et au cours de la nuit, les gendarmes lanceront 237 grenades lacrymogènes, 38 grenades GLI F4, 23 grenades OF F1, ainsi que 41 balles de LBD 40.

À 01h40, d’autres manifestants viennent renforcer les premiers.

On apprend que le maréchal des logis Jean-Christophe Jasmain est à la fois équipé d’un LBD 40 et d’au moins une grenade offensive, ainsi que des jumelles infrarouges. Le dispositif d’éclairage du camion de gendarmes est cassé, mais Jasmain lance néanmoins sa grenade dans le noir, par-dessus un grillage de 1m80.

Rémi Fraisse reçoit la grenade derrière la nuque, qui explose entre son dos et son sac, le tuant sur le coup.

À 01h45, les gendarmes récupèrent son corps.

À 01h53, son décès est signalé au Centre d’opérations et de commandement de la gendarmerie (CORG 81), à 01h57 au Centre de renseignement opérationnel de la gendarmerie (CROGEND), à 02h00 au parquet d’Albi et à 02h08 au directeur de cabinet du préfet.

Avant 03h00, le SR de Toulouse, la BR de Gaillac et les techniciens en investigation criminelle du GGD 81 se rendent sur place et commencent les investigations, suivies des premières auditions par les OPJ à partir de 03h45.

Malgré l’analyse du corps de Rémi Fraisse et la découverte de son sac déchiqueté, les autorités en la personne du procureur d’Albi affirment d’abord qu’il n’est « pas possible d’établir un lien certain entre le jet d’une
grenade et le décès de Rémi Fraisse ». Ce n’est que le 28 octobre que l’analyse des blessures indique la présence de TNT et confirme qu’il s’agit bien d’une blessure mortelle infligée par une grenade.

Le meurtrier de Rémi bénéficiera finalement du non-lieu requis par le procureur de Toulouse le 20 juin 2017, accordé par les juges le 9 janvier 2018 et confirmé par la Cour de cassation le 9 mai 2019 qui a rejeté le pourvoi de la famille Fraisse contestant le cadre d’intervention des forces de gendarmerie (les gendarmes bénéficiant d’une justice militaire alors qu’ils intervenaient en maintien de l’ordre, donc sous une autorité civile).

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