Noëlle Besse, une illustre bandite pourtant inconnue

Une grande partie de l’existence de Noëlle Besse est faite d’évasions, de cambriolages, de lutte dans les prisons et de solidarité. Pourtant, elle est bien moins connue que son frère, François Besse, gangster français légendaire. Paradoxalement, elle incarne à la fois la femme qui va aider, soigner et suivre sans faillir les hommes de sa vie, et celle qui va bousculer les codes de l’illégalisme à la recherche d’une liberté totale en assumant ses choix et son indépendance. De ses cavales à ses réflexions féministes dans le monde misogyne du banditisme, de son soutien indéfectible à son frère jusqu’au fait que sa fille ait passé les premières années de sa vie en taule avec elle, la vie de Noëlle Besse vaut la peine d’être connue et reconnue, à la hauteur du courage qu’il a fallu pour la mener. La voici racontée.

Cet article est d’abord paru sur La Grappe.

Noëlle Besse est née un jour d’hiver 1946 à Cognac en Charente. Sa famille a des revenus modestes et vit dans un quartier pauvre où l’alcool et le chômage sont présents. Sa mère, Marcelle Besse, veuve depuis la Seconde Guerre Mondiale, est en couple avec son père Francisco Esposito, ouvrier anarchiste et réfugié politique espagnol. Son frère, François Besse [1], futur ennemi public numéro 1, complice et ami de Jacques Mesrine et condamné à mort par contumace, est né deux ans avant, en 1944. Le climat de discorde qui persiste dans la famille est dû à la recomposition de celle-ci et à l’humeur caractérielle et parfois brutale de leur père. Cela rapproche Noëlle et son frère. « Bien sûr, je faisais des sottises. Mon frère, si cher à mon cœur, était là, toujours là pour prendre à ma place les raclées de ce père violent.  [2] » Cet amour, cette complicité ne connaîtra pas de faille leur vie durant. Elle passe son enfance à jouer avec François et sa bande. Il lui apprend à nager, à courir dans les grottes, à monter aux arbres. Ses genoux et ses vêtements font souvent les frais de leurs aventures, ce qui vaut à son frère des corrections lorsqu’ils rentrent à la maison.

En 1960, lors d’un rendez-vous au commissariat pour renouveler le statut d’exilé politique du père, un flic cafarde un délit qu’avait commis François quelque temps auparavant. Le papa rentre à la maison, affûte une lame et attend son fils pour le punir. Lorsque celui-ci est de retour, le ton monte. Noëlle, par réflexe, saute et s’interpose entre son frère et la lame qui l’entaille le creux de la main. François, lui, s’échappe définitivement du foyer familial pour vivre les aventures que nous lui connaissons et faire son entrée, petit à petit, dans la cour du grand banditisme.

Suite à cet événement, leur mère, pourtant d’ordinaire si obéissante et soumise [3], chasse son compagnon de la maison, qui une fois ses affaires faites, la quitte sans se retourner. Noëlle, tête dure et enfant rebelle, est mise à l’internat dans un foyer pour jeunes délinquantes tenu par des religieuses. Les flots de punitions qu’elle reçoit ne font que l’endurcir. Elle ne pense qu’à s’enfuir et à se venger. De ses camarades d’internat, elle dit : « J’ai toujours eu tendance à leur trouver des excuses, mais je ne comprenais pas pourquoi elles ne se servaient pas de leur hargne pour s’en sortir. Je m’étais vite rendue compte qu’elles aboyaient comme des roquets, prenaient deux gifles par leur « homme » et tout rentrait dans l’ordre. Cet état de fait m’a toujours désolée. Plus tard, en Amérique du Sud, j’ai pu admirer la détermination de certaines femmes qui savaient utiliser leur haine pour combattre l’oppression ».

En 1962, elle a 16 ans et elle parvient à s’échapper. Elle devient « blouson noir », fréquente des amis délinquants, vole dans les magasins et participe à des bagarres. L’année suivante, elle apprend la première arrestation de son frère qui choisit l’appel militaire pour échapper à la prison. Noëlle fait partie d’une bande d’une cinquantaine de voyous, qu’elle quitte après avoir échappé de peu à une tentative de viol collectif par certains d’entre eux.

Elle fait partie d’un groupe de musique, Les Loups Blancs, dont les paroles abordent les conflits générationnels, la lutte contre la guerre et la pollution. Pour acheter des instruments, ils volent des disques, des vêtements et des radios qu’ils revendent à bas prix. Passionnés par les armes, ils s’apprennent à tirer. « Lorsqu’un copain tombe et rentre en prison, [ils en font] un héros ». Peu après ses 18 ans, elle est condamnée pour vol à 6 mois avec sursis et obligation de pointer une fois par mois. C’est déjà l’époque où son frère obtient une certaine notoriété chez les voyous et le simple fait de le connaître ouvre certaines portes.

Après avoir connu les événements de mai 68 à Paris, elle file découvrir l’Algérie en 69. Ce pays la passionne et émerveille. Elle y retournera d’ailleurs dix ans plus tard : « après l’évasion de François de Bruxelles, en 1979, je devais y revenir dans ce beau pays, mais pour de toutes autres raisons. Je devais y faire mon apprentissage de la vie de hors-la-loi ; ce fut une sorte d’initiation menée par les amis de François, j’y appris à me soigner et à soigner les autres, à survivre en conditions difficiles, à faire face au danger. Je gardais des contacts en cas de gros soucis, car l’Algérie de cette époque n’extradait pas les Français ».

En 71, son frère s’est échappé de la prison de Gradignan depuis deux ans. Lorsqu’elle apprend, qu’à Bordeaux, cerné par la police, il vient de retourner son pistolet pour se tirer la dernière balle de son chargeur en direction de son cœur, elle se fait la promesse que s’il en réchappe, elle l’aidera à sortir. Entre 1971 et 1982, François Besse s’évadera 6 fois, de Gradignan, Fresnes, La Santé, Bruxelles, Madrid... Dès que c’est possible, Noëlle s’installe au plus proche de son lieu d’incarcération. Lorsque la situation est compliquée, elle fait le tour des amis (dont Jacques Mesrine) capables de l’aider à s’évader.

En Belgique, comme personne ne répond présent, c’est elle qui s’en occupe. Elle prépare une planque avec de quoi manger, s’habiller et se grimer. Sur le miroir de la salle de bain, elle écrit : « Petit frère, bonne chance, bisous et à bientôt ». Habillée en avocate, elle place le jour du jugement deux flingues sous le banc des prévenus du tribunal, laisse une moto de course avec les clés dessus devant, puis fuit directement en Espagne. Le lendemain à la radio, elle apprend l’évasion de son frère. Au bout d’un an, elle pense avoir été oubliée et rentre à Perpignan. Elle est mise en garde à vue. La Belgique ne retient rien contre elle, car ce pays ne reconnaît pas la complicité lorsque c’est un parent qui aide un proche à s’évader. La France, plus mauvaise perdante, lui reproche d’avoir sorti de l’Hexagone les capitaux nécessaires à l’évasion et lui inflige 18 mois avec sursis.

Noëlle Besse

Malgré la vie dangereuse de ses enfants, ainsi que toutes les épreuves qu’elle a dû subir en conséquence, la maman de Noëlle et François reste aimante et solidaire. Voici une anecdote plutôt cocasse : un jour, alors qu’elle se balade en Dordogne avec sa mère, Noëlle est énervée d’avoir pris une prune de stationnement. Elle décide de simuler une panne de démarreur et interpelle les flics pour qu’ils poussent la voiture en côte. Dès qu’elle redémarre, Noëlle s’amuse à chaque fois à la faire recaler, puis une fois qu’elles ont bien ri, elles décident de repartir. Plus généralement, leur maman les a toujours soutenus lorsqu’ils étaient en prison. Noëlle témoigne que pour voir François, sa mère « ne manqua jamais de courage. Elle n’hésitait jamais à faire des milliers de kilomètres pour aller le voir à Gradignan, Fresnes, la Santé ou Fleury-Mérogis, et même en Belgique. Elle préparait avec amour de bons casse-croûtes et le thermos de café chaud. Nous ne nous arrêtions que pour mettre de l’essence. Nous n’avions qu’un objectif : voir François. À l’aller, nous tentions d’être gaies, au retour, la tristesse nous accablait. De voir son fils, entre quatre murs est un chagrin très lourd à porter pour une mère. L’incarcération qui la marqua le plus, fut sans conteste celle de Fresnes. Les Q.H.S. [4] se trouvaient au fond d’une cour sombre et lugubre. Lui était si heureux de nous voir qu’il essayait de cacher sa peine en souriant et en plaisantant sur tout et sur rien ».

François est arrêté en 82 en Espagne et incarcéré à Madrid. Il partage sa cellule avec un voyou espagnol, Éric pour les intimes, José pour l’administration. C’est un braqueur de banque que Noëlle va rencontrer en parloir et dont elle tombe amoureuse. Au départ, ils se voyaient pour faire évader François. C’est un coup de foudre réciproque pour celle qui vivait jusqu’alors un célibat choisi. Une fois François en cavale, Noëlle se fait oublier et Éric purge la dernière année qui lui reste. Durant une permission de sortie, elle l’attend et ils vont au restaurant en tête-à-tête. Ils décident qu’il ne retournera pas en prison et filent en cavale à deux. Juste avant de se lancer, elle appelle sa mère pour lui annoncer la nouvelle. Sous le choc, elle comprend que deux de ses enfants sont désormais en clandestinité.

Éric

Une fois les derniers sous dilapidés en hôtels et en restaurants, il faut réfléchir à une solution. Après en avoir discuté, ils décident de passer à l’acte. Éric passe voir un ami qui lui prête une arme factice puis s’en va carjacker une bonne voiture. Il va braquer une banque et Noëlle va démarrer en trombe une fois le coup terminé. Le plan fonctionne et ils enchaînent par toutes les petites banques de la région. Noëlle veut participer au casse, mais Éric, bon macho qu’il est, refuse. « À l’entendre, je me serais donc fourvoyée en défendant la cause des femmes en mai 68. Je tentai de le convaincre de m’aider aux tâches ménagères, mais il me rétorqua que c’était comme ça, que c’était lui, à sa connaissance, qui allait chercher les « haricots ». C’était son expression, cela m’avait fait rire, car il préférait de loin le caviar aux haricots qu’il venait de manger pendant tant d’années. Mais j’insistais, je voulais qu’il me donne une chance de m’affirmer, de m’épanouir, il y avait si longtemps que j’attendais ».

Pour commencer, il accepte qu’elle rentre avec lui dans une banque, mais comme spectatrice. Elle s’occupe alors de surveiller que personne ne rentre ni ne sorte. Dans les plus grosses banques, elle surveille à la porte si les flics patrouillent dehors ou non. À force de succès, il lui propose de changer les rôles. C’est elle qui va sauter par-dessus le comptoir, mais en silence pour qu’on ne découvre pas son accent français. De complice, elle passe à partenaire. Par la suite, c’est à pile ou face qu’ils décident de la répartition des rôles. Parfois, ils se disputent sur l’usage de l’argent. Noëlle se lasse que cela serve seulement à faire la fête avec les amis, aux restos et aux hôtels de luxe, elle voudrait aider les gens dans le besoin. Après s’être fait de faux papiers, ils se mettent à la recherche de plus grosses armes. Ils filent en Colombie dans ce but pour retrouver un contact, mais apprennent que cet ami, qui devait leur en fournir, s’est fait fumer par les militaires dans son pays à cause de son appartenance au Mouvement Révolutionnaire. De ce voyage, Noëlle découvre les bidonvilles qui la marquent fortement. Ils fréquentent les endroits louches, où se mêlent révolutionnaires, vendeurs d’armes et de drogue.

Noëlle Besse revient sur tous les braquages qu’ils ont réalisés le long de la Costa Brava.

De retour en Espagne, Noëlle apprend qu’elle est recherchée, car inculpée pour l’évasion de son frère. Elle prend conscience qu’Éric et elle sont sans le sou et que le braquage de banques de campagne est aussi peu rentable que risqué, car les flics tirent de plus en plus sans sommation. Les seuls horizons qu’elle voit sont la prison ou la mort. Elle perd la confiance qu’elle a en son compagnon et se libère toujours plus de son influence. Qui plus est, dans ce moment d’agitation, elle oublie de prendre la pilule et tombe enceinte. Éric ne souhaite pas qu’elle garde l’enfant, Noëlle ne l’écoute pas. Ils décident de faire un gros coup pour finir en beauté. Un coup qui demande beaucoup de repérage et de neutraliser une vingtaine d’employés de banque. Malheureusement, le jour J, le plan foire et Éric est bloqué dans un cube de vitre blindée, ne pouvant tirer de l’intérieur sans risquer de se blesser. Noëlle prend une arme et tire jusqu’à l’exploser. Ils s’en sortent avec de sérieuses plaies. L’alarme retentit dans toute la ville. Ils arrivent à fuir et doivent panser leurs blessures.

Noëlle Besse enceinte.

C’est au sud de l’Espagne qu’ils vont se mettre au vert. Éric bricole des petits coups, Noëlle hésite à changer de vie et à le quitter, mais elle l’aime toujours. La grossesse se poursuit et reste un tabou entre eux. Finalement, l’accouchement a lieu. C’est une fille et elle se nomme Eva. Noëlle va à la Mairie pour déclarer sa naissance sous son identité réelle. Cette opération est risquée. Ils la préparent comme un braquage : repérage de la Mairie et des alentours, quels plans pour la fuite, quels rôles pour chacun, etc. Au final, tout se passe bien et c’était un danger qu’il fallait prendre, puisque cela lui permet plus tard de prouver que c’est bien sa fille après son arrestation.

Carnet de Famille où apparaît sa fille à son vrai nom en pleine cavale.

En effet, le 7 janvier 1985, les policiers arrêtent le couple à leur domicile. Ils saccagent tout. Des flics français sont même présents, pensant pêcher François au passage. Éric est incarcéré, Noëlle ressort étrangement rapidement. Elle sent le piège. À qui peut-elle demander de l’aide si ce n’est à son frère ? Elle redouble de prudence, car elle se sait filée par les keufs. Elle organise sa fuite avec un bébé dans les bras, c’est épuisant. Finalement, au bout de quelques jours, elle est de nouveau arrêtée. Changement de stratégie policière, on l’incarcère et beaucoup de bruit est fait pour que son frère sorte de sa tanière. Elle passe 9 jours de garde-à-vue dans des conditions d’hygiène déplorables et un bébé de 2 mois dans les bras sans structure adaptée. Les flics la menacent de laisser Eva mourir de faim si elle ne balance pas la planque de son frère.

Au bout du compte, c’est direction la prison d’Alicante. En Espagne, à cette époque, l’enfant peut rester en prison avec sa mère jusqu’à l’âge de 6 ans si personne n’est dans la possibilité de le prendre en charge. Mais aucune commodité n’est prévue pour lui en prison. Eva ne peut plus téter, car depuis l’arrestation, Noëlle ne produit plus de lait. S’il y a bien deux lits et à manger pour deux adultes, il n’y a pas de nourriture pour bébé et encore moins de lait en poudre. Eva, affamée, pleure sans cesse et sa mère craint qu’elle meurt avant le lendemain. Une jeune gitane arrive à lui glisser du lait maternel encore tiède dans une bouteille de soda. « Elle avait ce soir-là, gagné ma confiance, mon amitié et ma gratitude pour le reste de ma vie. À ma sortie, ma première visite devait être pour elle et son enfant ». Les douches étant faites pour les adultes avec une pomme d’arrosoir fixée très haut, Noëlle trouve un vieux seau qui traîne et s’en sert pour laver sa fille qui se débat en hurlant.

Comme le problème de la nourriture n’est toujours pas résolu, Noëlle décide de ne plus manger et de rester dans la cour sans obéir. Ensuite, elle menace de prévenir les journaux et son avocat pour avertir que les prisons espagnoles sont semblables à celles de l’époque de Franco. Eva pleure si fort que rapidement toute la prison, même la partie masculine, est au courant. « Aussitôt, tous se sont manifestés. On est au bord de la mutinerie ». Ils lancent tous de leur cellule des paquets de clopes avec de l’argent à l’intérieur pour permettre à Noëlle d’acheter une baignoire en plastique, du lait en poudre et tout ce qui leur est nécessaire. Puis, tous les hommes se mettent à siffler et toutes les femmes à applaudir pour signaler leur soutien.

Plus tard, alors que le bébé est pris d’une grave quinte de toux toute une nuit, sa maman tambourine la porte pour demander de l’aide. Sans réaction de la part des surveillantes, toutes les femmes se mettent à crier. Une nouvelle fois, lorsque les hommes apprennent que c’est pour Eva, ils participent au désordre. Aussitôt, Noëlle est reçue par le médecin qui prescrit du sirop et lui fait passer deux grands cartons de nourriture pour l’enfant. Quand tout le monde apprend la nouvelle, c’est la fête dans la prison. Dans d’autres situations, il lui faut se battre pour se faire respecter, et Noëlle n’hésite pas à rendre les coups pour se défendre et gagner l’estime de ses comparses.

Si, à force de persévérance, Noëlle gagne quelques privilèges, elle veut que ce soit la norme pour toutes. « Il fallait que ma rébellion et mon soi-disant mauvais caractère me servent pour cette bonne cause, celle que je sentais juste : il fallait que ma lutte ancienne contre les Q.H.S. dans les années 70, cette ignominie, que ce combat m’aide, encore et encore, qu’il ait un sens plus positif. Que mon ancienne lutte en France pour le respect des droits serve ici, en Espagne. Mes revendications étaient encore plus sincères, mes convictions plus profondes puisque vécues, j’étais en plein dans le problème ». Les autres filles suivent le mouvement et écrivent quotidiennement à la directrice, et même au maire de la ville. Certaines améliorations voient le jour.

Eva, au fur et à mesure, devient bilingue, en apprenant le français avec sa mère et l’espagnol avec les autres prisonnières. Noëlle rédige des lettres d’amour codées à Éric, détenu ailleurs en Espagne. Pour conserver un peu d’intimité, elle écrit ses mots au citron, qui une fois réchauffés, se révèlent à l’aide de la chaleur d’un briquet. Au bout d’un an, Noëlle apprend que, suite à un vice de procédure, elle peut demander de sortir. Une semaine après, elle est sur le trottoir, Eva dans ses bras. Direction Madrid pour voir Éric en prison. Eva, qui a passé le début de sa vie dans la grisaille du monde carcéral, en profite enfin pour découvrir le monde extérieur, les paysages ouverts et ses couleurs. Noëlle voudrait fuir en Algérie, mais ne se résout pas à abandonner Éric : « j’étais aussi coupable que lui et il était seul à payer l’addition ».

Justement, celui-ci lui dit un jour au parloir qu’il n’en peut plus, qu’il veut se faire la belle. Elle se lance sur les repérages, au gré des transferts de prison qu’il subit. Faut-il jeter l’arme depuis la rue jusqu’à la fenêtre avec un grappin, faut-il la faire passer durant les parloirs « intimes » ou la faire passer dans le camion de nourriture qui entre chaque semaine dans la prison ? Ce sont des décisions importantes qu’elle doit prendre. De plus, Éric lui apprend qu’il va s’échapper avec deux autres détenus. Cette nouvelle donne dans le plan se fait sans concerter Noëlle, ce qui l’inquiète et l’énerve. Cela lui rappelle la fois où son frère s’est échappé de la prison de la Santé avec Mesrine. Carman Rive s’est greffé au plan au dernier moment et s’est fait abattre par un flic alors qu’il passait le mur. Les médias s’étaient trompés et avaient annoncé la mort de François. De l’étranger, Noëlle avait foncé retrouver sa mère pour la soutenir. Ce n’est que le soir que la radio avait commencé à démentir cette information, mais le choc avait été terrible, immense pour les deux femmes.

Noëlle n’a pas le choix. Pour aider Éric, elle fait sa part de la préparation, même si elle trouve que c’est l’évasion la plus mal préparée qu’elle connaisse. Les fautes se multiplient et la préparation de la planque et de la clandestinité est sous-évaluée. Elle doit faire des adieux déchirants à sa coloc et ancienne comparse de cellule avec laquelle elles s’entraident depuis leurs sorties, notamment pour la garde d’Eva.

Finalement, alors qu’elle n’y croit plus, l’évasion réussit. Éric et les deux autres fugitifs débarquent à toute allure dans la voiture où les attend Noëlle. C’est là qu’elle se rend compte qu’un des évadés n’est autre que l’Ennemi Public N°1 en Espagne, condamné pour avoir fumé des keufs. La cavale s’annonce encore plus risquée que prévue. Une fois dans la planque, elle découvre que rien n’a été prévu, ni les provisions, ni les mesures de sécurité. Elle ne donne pas cher de la réussite de leur entreprise. Rapidement, ils doivent en trouver une cache plus sûre et filent en voiture. Les comparses d’Éric la dégoûtent. « À plusieurs reprises sur mon chemin, j’avais eu à côtoyer des bandits encore plus hautement qualifiés dans le crime, dont la réputation n’était plus à faire ; cela ne m’avait nullement impressionnée, mais j’avais toujours su me tenir à ma place, sachant bien que ce milieu est un milieu misogyne ; j’arrivais à mes fins plus souvent par ruse que par autorité ». Lors d’une virée alcoolisée de l’Ennemi Public N°1 et de son ami, le premier se fait choper et l’autre s’échappe de justesse. Revenant à la planque, il est soigné par Noëlle qui fulmine. La coupe est pleine, les équipes vont se séparer.

Dans la dèche, il faut faire un coup. Éric recrute un mec peu expérimenté et insiste fortement pour que Noëlle y participe. Finalement, le braquage fonctionne bien et leur permet de retourner en France. Sa mère ayant fait un malaise cardiaque, Noëlle souhaite aller la voir à l’hôpital. Déguisée en infirmière, elle arrive à déjouer la surveillance constante de la police pour lui rendre visite. Peu de temps plus tard, Noëlle retrouve Éric sur une plage, qui revient d’un braquage et ils se font cueillir par une armada de flics qui les cernent. Noëlle est embarquée comme les autres, Eva dans les bras, un P38 sur la tempe. Une fois au commissariat, une assistance sociale de la DDASS vient chercher l’enfant de deux ans. Tous les flics défilent, un à un, pour dévisager la mère, se félicitant de cette prise de guerre au nom de famille si renommé. De son côté, elle prend conscience qu’elle perd sa fille, son « seul bonheur » et qu’elle n’est pas près de la revoir.

Noëlle Besse, qui revient sur la plage où a eu lieu son arrestation et celles d’Éric et d’Eva.

En juillet 1987, Noëlle est transférée à la prison de Nîmes et Éric à celle de Toulouse. Rapidement, elle pense à l’évasion, elle s’en croit capable, mais elle pense aussi à Eva, à l’espoir de la retrouver. Sa codétenue « si calme le jour, avait, la nuit des accès de folie. Elle entrait en transe, au bord de l’asphyxie, avec des convulsions. Elle hurlait. Son cri était l’expression de son chagrin, de sa solitude. Elle aussi avait laissé un enfant dehors – cela vous déchire en dedans. Un cachet la calmait, anéantissant sa volonté de lutter ». Noëlle refuse de prendre des comprimés et s’attelle à lui apprendre à lire pour qu’elle prépare sa défense.

Les sorties de cellule de Noëlle s’accompagnent de fouille à nu. Sa pièce est fouillée plusieurs fois par jour et pendant ce temps, elle est envoyée au mitard. Lorsqu’elle réclame des nouvelles d’Eva, on lui répond que sa fille doit être plus heureuse là où elle se trouve. Pour avoir des nouvelles de sa famille, elle entame une grève de la faim. On lui met un maximum de pression pour la punir de son caractère qui ne cède pas, de son passé plein de rébellion, et pour le simple fait de s’appeler Besse.

Alors, petit à petit, elle va chercher à unir les prisonnières pour obtenir des droits que les femmes n’ont pas dans cette prison. « La discipline était toujours plus stricte pour les femmes. Avec le même rapport disciplinaire, nous prenions toujours plus de sanctions. Et cela dans tous les centres pénitentiaires, pourquoi ? Il fallait donc que nous en discutions. C’était très compliqué ; je pensais parfois que clamer notre égalité dans les rues en 1968 n’avait pas servi à grand-chose. La situation de la femme n’avait pas beaucoup évolué, même à l’extérieur d’ailleurs. Une femme en prison en 1987 avait perdu toute crédibilité, était plus brimée, opprimée que l’homme, pourquoi ? Il ne s’agissait plus de se battre pour avoir des loisirs, mais pour obtenir des droits. Certaines femmes ne voulaient pas suivre le mouvement, par peur des représailles. D’autres culpabilisaient et croyaient que ce qui arrivait était de leur faute. Là n’était pas le problème, nous étions toutes fautives, toutes coupables, ou presque. Il ne fallait pas courber l’échine pour autant. Beaucoup étaient dans mon cas, et subissaient un traumatisme grave suite à la privation de visite de leurs enfants. Il y avait encore du travail à faire ». Noëlle reprend une grève de la faim pour pouvoir voir sa fille. Au bout de quatre jours, la directrice cède et lui annonce que cela va être possible.

Ce qui manque à Noëlle, c’est de l’argent pour payer le transport. Elle s’abaisse donc à travailler en prison, pour gagner le moindre petit sou. Elle ravale sa fierté pour rendre cette visite possible. Elle apprend que la famille d’accueil de sa famille ne parle jamais de Noëlle ni de François à l’enfant qui a désormais 3 ans et demi. La maman angoisse que sa fille ne la reconnaisse pas. Lorsque les retrouvailles se font enfin, le mot « maman » qu’Eva prononce et l’étreinte qu’elles partagent peuvent la rassurer. Une fois le parloir fini, c’est la violence d’une nouvelle séparation qui s’impose et l’attente intense de la prochaine autorisation de se voir. Deux mois à compter les jours. Noëlle et Éric, emprisonnés parfois dans la même prison, se voient de temps en temps et entretiennent une belle relation où ils se projettent après leur sortie. Sa cellule donne sur la cour des femmes, et avec une glace, il arrive à voir Noëlle qui s’assoit toujours au même endroit. Ils mettent au point un langage des signes pour communiquer et à chaque parloir, inventent de nouveaux gestes pour parler des « sujets plus graves ».

Suite à un incident anodin durant son travail, Noëlle est surprise de la disproportion des conséquences. Elle se fait condamner au mitard et surtout, elle perd la visite de sa fille la veille de Noël. Les conditions en isolement sont ignobles. Elle perd tout son courage et pense à son frère, qui à chaque fin d’évasion, y est enfermé 90 jours d’affilée, avant d’en sortir à moitié mort. Quand la geôlière qui est la cause de cette punition vient pavoiser dans sa cellule, elle lui saute dessus et la frappe, avant d’être tabassée par les gardiennes. Finalement, elle est autorisée à voir sa fille et on lui donne une trousse de maquillage pour qu’elle masque ses ecchymoses.

Éric, présent aussi au parloir, s’alarme de son état. Noëlle est ramenée au mitard. Elle ne mange plus, ne parle plus, n’est plus capable de voir son avocat. Les autres femmes de la prison chantent dans la cour « Le Pénitencier », la chanson préférée de Noëlle, dont il existe d’ailleurs un enregistrement de François et de Mesrine en cavale l’interprétant. Malgré les menaces de privation de promenade, les prisonnières continuent le raffut jusqu’à être enfermées dans leur cellule. Quasi-inconsciente, Noëlle est hospitalisée en urgence puis traînée de nouveau au mitard pour finir sa peine. À la sortie de ce régime spécial, elle reçoit une vingtaine de lettres d’autres détenues, qui, avec franchise et force, la motivent et l’aident à remonter la pente.

En mai 1989, lorsque débute son procès, elle se rend compte que c’est aussi son frère en cavale qui est jugé à travers elle, car en réalité, la justice a très peu de motifs d’inculpation à son encontre en France. Ses délits, elle les a faits en Espagne. Rien qui n’explique les trois ans de taule qu’elle vient d’effectuer dans son pays natal. Les flics s’attendent à ce que François vienne la libérer, elle qui a tant de fois aidé son frère à s’enfuir. Noëlle redoute qu’il se fasse piéger et abattre. C’est un dispositif policier et médiatique exceptionnel qui est déployé autour de ce procès en assises. Tireurs d’élite sur le toit, chiens, menottes aux poignets et chaînes aux chevilles. Durant les débats, on ne parle que de François et on ne cesse de lui demander si elle a connu Mesrine. Noëlle, qui redoute que son frère tente quelque chose, n’arrive pas à se concentrer. Elle a l’impression qu’on parle de quelqu’un d’autre. Lorsque son avocat déroule une plaidoirie touchante, sur son enfance difficile, son parcours périlleux, elle a honte que tout cela soit dévoilé en place publique et cela s’ajoute à son sentiment de distance avec ce qu’il se passe.

À l’heure du verdict, le juge annonce que Noëlle s’en tire avec 3 ans et Éric avec 8. C’est un soulagement. Lorsqu’elle est ramenée à la prison, les détenus qui ont veillé jusqu’à tard pour écouter la radio font la fête dans toute la prison, côté femmes et côté hommes. L’administration pénitentiaire, toujours rancunière, on lui refuse toute liberté conditionnelle et permission de sortie. Plus que 5 mois à tirer. Le dernier jour, au matin, elle a un parloir avec Éric. Elle tente de dissimuler sa joie, car lui reste en prison. En plus, il est particulièrement triste puisqu’il ne pourra plus la voir tous les jours avec son miroir depuis sa cellule. C’est la première fois qu’il pleure. Suite à cette entrevue, elle sort de prison.

Hébergée, elle doit trouver un travail, réapprendre à marcher dans la rue, reprendre confiance en l’avenir et en elle. Et puis retrouver Eva, sa fille. Justement, elle voyage jusqu’à elle, mais la femme qui s’en occupe refuse de la laisser la voir, alors même que la juge avait donné son autorisation. Celle-ci pousse Noëlle qui lui rend une gifle. Eva se cache derrière sa mère et elles partent toutes les deux en courant, prenant le premier bus qui passe par là. La nuit est horrible. Elle vient d’enlever son propre enfant. Que faut-il faire ? Rassembler des sous et repartir en cavale au risque de la perdre de nouveau ? Elle décide d’appeler la juge et de s’expliquer. Celle-ci la convoque immédiatement. Noëlle s’empresse de traverser tout Paris avec sa fille et arrive en retard, au moment où la juge allait émettre un mandat d’arrêt international. Après une discussion et des vérifications d’usage, la juge surprend tout le monde en se tournant vers Eva et lui demande avec qui elle veut vivre. Celle-ci se jette au cou de sa mère en disant « Maman ». C’est gagné, définitivement gagné. Joie et larmes.

C’est le retour à une vie ordinaire. Tout se passe bien, mais un événement vient mettre les résolutions de Noëlle à rude épreuve. En faisant ses courses avec sa fille, elle croise la gardienne responsable de son séjour en mitard. Noëlle l’avait menacée de lui faire payer un jour. La matonne, se rendant compte de la situation, devient blême et bredouille quelques mots. Malgré la haine, Noëlle pense à sa fille, parvient à se contenir et à partir. Quand Éric, au parloir, lui parle de nouveau d’évasion, ce n’est plus possible pour Noëlle. Elle a déjà fait ce qu’elle avait à faire. Mais le pauvre est constamment transféré, car l’administration craint justement une tentative de ce style. Puis, il est transféré en Espagne et Noëlle ne peut plus lui rendre visite. Elle manque d’argent, et surtout, elle est toujours inculpée et recherchée dans ce pays.

Si Noëlle décide de couper court avec l’illégalisme, elle ne renie pas son passé ni ses actes. De son activité, voilà ce qu’elle en dit : « J’ai commis bien des actes répréhensibles, je ne le nie pas, mais j’ai toujours été profondément convaincue que je combattais l’injustice. Dans mon esprit, il a toujours été clair que je ne molesterai jamais les pauvres. Si je devenais gangster, je ne frapperais qu’à la porte des riches. Je me posais la question de savoir ce qu’il pouvait y avoir de plus riche qu’une banque… à part une autre banque ! De surcroît bien assurée... ».

Cette vie simple et calme dure jusqu’au retour de François dans l’actualité, en novembre 1994. Alors que les autorités le croyaient mort, on retrouve sa trace aux alentours de Cognac. Toutes les télévisions reparlent de lui. La nouvelle vie de Noëlle est bouleversée. La presse parle d’elle. Eva découvre tout un tas de choses sur sa famille. Âgée désormais de 10 ans, cela l’atteint, d’autant qu’elle est l’objet de moqueries à l’école. Elle se met à rejeter son père toujours en prison et devient souvent agressive. Noëlle revoit sa rébellion de jeunesse et ne veut pas lâcher sa fille qui la teste constamment : « Le seul tort que j’ai eu envers elle — il est de taille, j’en ai conscience — c’est de ne pas lui avoir dit la vérité avant qu’elle ne l’apprenne par la presse. Elle pensait que ma vie était un tissu de mensonges, elle ne me respectait plus ».

Malheureusement, la même année, Marcelle Besse, la mère de Noëlle et de François, décède. Autour de sa dernière demeure, la police investit chaque recoin. Tireurs d’élite sur le toit, brigades spécialisées cachées derrière les arbres, tout le monde attend la faute de François Besse qui voudrait embrasser une dernière fois sa mère, et ils espèrent le cueillir ainsi. Bien sûr, il ne se fait pas avoir.

En 1998, Éric reçoit sa première permission de sortie. Noëlle s’interroge : va-t-elle ressentir de l’amour, de la pitié, du regret ? Au final, ce sont de beaux moments qu’ils passent ensemble. Ce n’est pas le cas pour Eva qui enchaîne les actes de rébellion, reconnaissant plus tard que si elle ne veut pas entendre parler de son père, c’est parce qu’elle craint que sa mère retombe dans le banditisme. Après sa libération, il rejoint leur foyer et ils tentent, les trois, d’aller de l’avant. Éric s’apprête à reconnaître officiellement sa fille. Noëlle en profite pour demander la main de son compagnon. Le mariage est prévu pour janvier et les préparatifs avancent, lorsque Éric reçoit un courrier du ministère de la Justice. Celui-ci stipule qu’on lui refuse sa demande d’asile, que leur union n’est pas reconnue. L’administration lui intime même l’ordre de partir dans le mois, sous peine d’expulsion. Il est considéré comme « indésirable sur le territoire français ». Il n’y a pas d’appel possible.

La famille décide de retourner en Espagne, d’autant plus que les affaires de Noëlle sont prescrites. Éric doit promettre à sa compagne qu’il ne va pas tenter de gagner de l’argent illégalement. Eva réapprend très vite la langue. Mais l’union dans la famille ne prend jamais vraiment. Éric est de plus en plus agressif. Un jour, lors d’une crise, après que les insultes aient fusé des deux côtés, il s’apprête à frapper Eva. Noëlle s’élance pour la défendre. Il se met à étrangler sa compagne qui parvient à le blesser au visage. « Je ne faisais pas le poids, la cocaïne décuplait sa méchanceté et sa force. Le combat était déloyal. J’ai pris conscience ce jour-là de ce que pouvait endurer les femmes battues. Je n’avais jamais vécu une telle expérience, cela me laissa brisée. Nous ne nous adressions plus la parole. Je décidai, le cœur déchiré, de partir, de le quitter ». De plus, il lui avoue qu’il a repris ses anciennes activités et qu’il a une maîtresse de 24 ans. C’est le moment de partir de la maison.

Eva, presque majeure, vit de sorties et de divertissements grâce à l’argent de son père. Après une dispute avec sa mère, elle décide de retourner chez lui. Noëlle revient en France, seule et abattue. Quelques mois plus tard, Éric se fait arrêter à son domicile pour trafic de drogue et possession illégale d’arme. Peu de temps après, Eva, isolée en Espagne, est placée en centre pour mineur délinquant.

Lors d’une sortie, Eva s’enfuit et retourne en France, avec sa mère. Les années suivantes, elle arrive à se réconcilier avec son père, très malade, et retrouve la joie de vivre. François, repris, purge sa dernière peine et ressort enfin et définitivement libre de prison, après toute une vie de cavale et de lutte. C’est presque un miracle, mais François et Noëlle sont enfin libres en même temps. Ils mènent une vie discrète. Chacun fait tout de même paraître une autobiographie afin de relater son existence respective, tout en gardant un lot immense de secrets qui ne regardent qu’eux, leurs complices et leurs amis. Aux dernières nouvelles, ils vivent et jouissent encore de leur liberté. Après une vie d’aventures et d’épreuves, de combats et de résistances, nous leur souhaitons le meilleur.

Voici les ouvrages qui ont servi à documenter cet article :

Une femme au cœur du grand banditisme : autobiographie, Noëlle Besse, Trabucaire Éditions, 2008.
Je suis un bandit d’honneur, François Besse, Paul Legrain, 1984.
Cavales, François Besse, Plon, 2019.


Si vous avez des commentaires à faire sur ce texte ou un moyen de contacter Noëlle, sa fille, François ou ses deux enfants, afin de les interviewer, ce qui permettrait d’approfondir certains points, vous pouvez écrire à cette adresse : articlesbesse@riseup.net

Notes

[1La vie incroyable de François Besse se lit avec délectation dans l’article suivant : https://lagrappe.info/?Francois-Besse-un-flamboyant-rebelle-si-discret-1493

[2Toutes les citations de Noëlle Besse viennent de son autobiographie : Une femme au cœur du grand banditisme : autobiographie, Noëlle Besse, Trabucaire Éditions, 2008. Les faits relatés sont issus d’un regroupement de toutes les sources disponibles et rencontrées. Les images proviennent de Les cavales finissent mal… en général, Jean-Marc Froissart, 2010.

[3Noëlle Besse l’explique ainsi dans ses mémoires : « Souvent à cette époque, les femmes subissaient en silence — heureusement pour moi qu’il y eut mai 1968 pour m’émanciper — ».

[4Un Q.H.S (Quartier de Haute Sécurité) était un type de prison en France destiné à détenir les détenus considérés comme les plus dangereux ou les plus susceptibles de s’évader. Introduits dans les années 1970, ces quartiers étaient caractérisés par un isolement strict, un contrôle renforcé et des conditions de détention extrêmement dures. L’objectif était de briser psychologiquement les prisonniers pour les empêcher de récidiver ou de s’évader. La suppression des Q.H.S. résulte d’une longue lutte menée par plusieurs acteurs. Les prisonniers des Q.H.S. ont souvent organisé des grèves de la faim, des mutineries et des actions de protestation pour dénoncer leurs conditions de détention. Des groupes comme l’Observatoire international des prisons (OIP) ou la Ligue des droits de l’Homme ont milité contre ces quartiers, les qualifiant de « torture psychologique ». Les intellectuels et militants, tels que Michel Foucault par exemple, ont critiqué le système carcéral français, soulignant que les Q.H.S.étaient une forme de punition dégradante et contraire aux droits humains. Enfin, les médias, notamment Libération, ont publié des enquêtes qui ont exposé les conditions de vie inhumaines dans ces quartiers, ce qui a contribué à sensibiliser l’opinion publique. Jacques Mesrine, François Besse et bien d’autres prisonniers ou évadés ont témoigné à travers de livres, d’interviews ou de communiqués, prenant à partie l’opinion publique. Sous la pression de ces luttes, les Q.H.S. ont été progressivement supprimés dans les années 1980. Ils ont été remplacés par des Quartiers d’Évaluation de la Dangerosité (QED) et des Quartiers de Sécurité Renforcée (QSR), qui restent toujours controversés.

Mots-clefs : vol | histoire

À lire également...