Tout le monde est concerné par le virus Corona, mais tout le monde n’est pas confiné de la même manière. Cela a été dit et redit, et ce n’est pas ici le propos. Pour autant, cette mesure d’exception, qui ressemble à d’autres, remet en lumière encore et toujours les mêmes disproportions, les mêmes inégalités qu’en temps ordinaires. Pour certain-es le confinement de luxe, qui permet de se poser et de réfléchir, se divertir, prendre le temps de créer et laisser courir son imaginaire, pour d’autres l’aggravation de l’injustice et des peines quotidiennes. Les plus précaires ne sont pas en télétravail, iels vont au turbin, le plus souvent sans matériel de protection adéquat. Ici on pense notamment aux personnels soignants, mais aussi aux livreur-euses et facteur-ices qui vont de foyer en foyer, ou les travailleur-euses du bâtiment qui seront bien incapables de se désinfecter les mains à longueur de journée et de ne pas s’essuyer régulièrement le visage...
Et puis, si l’on veut bien le voir, les images Snapchat et Instagram tournées depuis les fenêtres confinées montrent chaque jour de nouvelles scènes de déchaînement bestial de la part de policiers racistes, qui frappent au visage les passant-es de couleur qui n’ont pas dans leur poche l’absurde papier qui donne le droit d’exister dans l’espace public depuis le 17 mars. On ne les imaginerait pas asséner des coups au visage des bourgeois-es qui profitent de leur pause en télétravail pour aller flâner sur les berges muni-es du sésame fraîchement sorti de leur imprimante de bureau...
Avant que le virus ne vienne ébranler nos habitudes, un film venait de sortir pour pointer ces violences policières racistes : « A Nos Corps Défendants ».
Il a été présenté ainsi par son réalisateur :
A NOS CORPS DEFENDANTS
Durée : 90 min
Année : 2019
Réalisation : IanB
Ce film ne raconte pas une histoire. Il se veut une approche sensible et radicale des violences psychologiques et physiques infligées aux habitant·es des quartiers populaires par la police. Les récits prennent place dans la France des vingt dernières années, celle de l’après Sarkozy, et sont rapportés par les premier·e·s concerné·e·s : pas de sociologue, pas d’historien, pas de journalistes ni de storytelling. Juste la parole de celles et ceux qu’on voudrait voir silencieux·ses : Wassil Kraiker et ses parents Zohra et Abdelaziz, des jeunes d’Argenteuil, Amine Mansouri et son père Moustapha, Ali Alexis et son épouse, Ramata Dieng et Farid El Yamni…
On y aborde la question de la domination, ou comment l’État traite les corps étrangers pour mieux les contrôler. Il est question de racisme, de torture et d’un combat vital pour la vérité. Les protagonistes de ce film n’avaient pas choisi de devenir un jour visibles, mais les violences systémiques en ont fait des combattant·e·s, à leurs corps défendants.
Teaser de présentation : https://vimeo.com/380032242
Plusieurs villes ont accueilli la projection du film entre le 9 janvier et le 12 février et une tournée devait reprendre entre le 18 mars et la fin avril, avec 27 projections prévues dans autant de villes à travers toute la France. Le Corona a eu raison de ce programme.
Il était prévu que le réalisateur accompagne son film pour le présenter, en expliquer les motivations et animer des débats en y associant dans chaque ville des premier-es concerné-es, familles et proches de victimes de violences policières.
La situation sanitaire mondiale ayant interrompu toutes nos habitudes, le film sera projeté en « première » sur Youtube [1] le 4 avril 2020 à 20h15, c’est-à-dire juste après les applaudissements quotidiens en faveur des personnels soignants.
Toute personne qui n’a rien de mieux à faire est invitée à prendre le temps d’écouter les témoignages livrés dans ce film.
Lien du visionnage en première, avec chat simultané :
https://www.youtube.com/watch?v=zrHcc_rPacE
(Le lien ne sera actif que le 4 avril à 20h15 / Il est possible d’activer les sous-titres en anglais)
Ce rendez-vous est à diffuser aussi largement que possible, y compris à l’étranger !