Dans cette chambre du Palais de Justice, tous les prévenus ont accepté la comparution immédiate.
Tous sont accusés du délit « de participer sciemment à un groupement, même formé de façon temporaire, en vue de la préparation, caractérisée par un ou plusieurs faits matériels, de violences volontaires contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens ».
Tous ont été arrêtés à leur arrivée à Paris, et ne sont pas arrivés sur les lieux de la manifestation dite « violente » des Gilets Jaunes. Les procès-verbaux d’interpellation sont plus que maigres, et se contentent de la liste du matériel contenu dans les sac à dos. Le tribunal n’a aucun acte à leur reprocher.
Un artisan du Sud de la France qui ne s’en sort pas financièrement, a fait tout ce chemin pour « montrer qu’on est un peu plus chaque jour à dire non à tout ça » et « montrer son mécontentement et sa solidarité avec ceux qui souffrent ». Il a été menotté et insulté par des policiers en gilet jaune, à 10h50, en sortant de la voiture de son cousin.
Il avait emporté avec lui une tenue de moto cross (un plastron, des genouillères et un casque). Aucun élément ne prouvait que les lunettes de piscine et le marteau indiqués comme lui appartenant étaient vraiment à lui, la charge de la possession d’arme est retirée par la procureure.
La juge lui reproche de ne pas avoir écouté la radio avant de se rendre sur les lieux et se moque de sa tenue de « tortue ninja »
L’avocat demande la relaxe : il avait juste des protections, il ne dissimulait pas son visage, il n’est pas allé à la manif, n’a même pas eu le temps de mettre son gilet jaune, se rendre à la manifestation ne peut lui être reproché si elle est autorisée, et si elle est interdite, c’est une autre poursuite que celle là.
Verdict : Relaxe du transport du marteau
Coupable du surplus : 4 mois de sursis
Peine complémentaire : 8 mois d’interdiction de séjour à Paris
Cinq gars, venus en voiture à Paris depuis l’Essonne, se font arrêter près de leur voiture alors que l’un deux est en train de payer le stationnement dans le 17e arrondissement, et qu’ils n’ont pas encore enfilé leur gilet jaune. Trois d’entre eux bossent dans la même boîte, ce qui fera dire à la juge : « mais c’est quasiment une délégation ».
Leur est reproché la possession et le transport de sérums physiologique (18 petites fioles pour l’un d’entre eux, ce qui semble affoler la juge), de 30 masques en carton (une autre juge affolée, « mais où avez-vous acheté cela ? » dans une grande enseigne de bricolage...). Le prévenu concerné justifie ce nombre de masques : à la dernière manifestation, il a porté secours à des personnes âgées qui souffraient de l’inhalation des gaz lacrymogènes, et pour celles-ci il avait prévu d’en distribuer à ceux qui n’en avaient pas.
Des pétards, autorisés à la vente et aux transport par toute personne de plus de 12 ans, se transforment en produits incendiaires et explosifs dans la bouche de la proc. Ces produits à haute valeur terroriste ont été achetés dans un magasin de magie...
La procureure, qui les caractérise comme des « trentenaires insérés socialement et en difficulté financière au regard des charges » requiert alors de la prison ferme pour trois d’entre eux.
L’avocat plaide que rien ne peut leur être reproché, ni acte, ni intention.
L’audience est émaillée des reproches, remarques maternalistes, humiliations et railleries de la juge. Tout sourire : « y avait de l’ambiance déjà, avec vos petits pétard ça fait un peu minus », disant à l’un qu’il est « un bon père », à l’autre « c’est pour protéger les vieux que vous apportez des masques ? », soulignant que le crédit à la consommation, c’est vraiment une catastrophe et qu’il ferait mieux de trouver une autre solution, « y a pas un CE dans votre entreprise ? ». La juge reproche à tous de ne pas avoir écouté la radio dans la voiture en venant, de façon tellement insistante tout au long de l’audience, que l’on pourrait finir par croire que c’est un délit.
Sur la participation à un groupement et le transport d’explosifs, deux d’entre eux ont été déclarés coupables des deux infractions ils écopent de 8 mois de sursis et 1 an d’interdiction de séjour. Deux autres sont déclarés coupables de la participation au groupement et écopent de 4 mois avec sursis et 1 an d’interdiction de séjour à Paris.
Le dernier, parce qu’il avait un casier judiciaire, a été condamné à 3 mois de prison ferme et 1 an d’interdiction de séjour à Paris.
Pour tous les prévenus du jour, rejet de la non-inscription au B-2.
La salle est remplie de journalistes et d’un public qui ne manifeste aucun soutien. L’arrogance des juges et de la jeune procureur rappelle celle des députés LREM sur les plateaux télés...
Le montage en épingle est plus gros qu’un éléphant, les gilets jaunes jouent profil bas pour s’en sortir le mieux possible, et votre rédactrice fulmine et s’imagine hurlante être évacuée de la salle, mais elle ne le fait pas.