« Marée populaire » du 26 mai : qui est arrivé en tête ?

Que s’est-il passé le 26 mai dernier ? Qu’est-ce qui transforma le cortège de tête, pourtant construit en opposition aux cortèges traditionnels, en une entreprise politique de gauche ? Ce texte, publié originellement sur Lundi Matin, se veut une ébauche de réponse.

Le 5 mai dernier - une éternité - avait lieu à Paris la « Fête à Macron », manifestation « festive », décidée à la Bourse du Travail sur une idée de MM. Ruffin et Lordon, qui l’appelaient alors le « Grand débordement ». Le 5 mai, la principale radicalité du « pot-au-feu » des luttes, s’est avérée être son nom (le gouvernement s’offusquant de l’usage de l’expression « faire sa fête à »), et la présence au sein du cortège d’une effigie du président... pendue. Un Macron pendu ça va, un Macron brulé, bonjour les dégats : l’un des co-organisateurs se dissociera plus tard de ce type de pratique.

Après cette "Fête à..", et grisés par leur succès (on ne fit effectivement pas sa fête à Macron et ça ne déborda d’ailleurs pas), les organisateurs décidèrent de remettre le couvert, le 26 mai. Tout en améliorant le logiciel. Premier bug à régler : les accusations internes de récupération par la France Insoumise. On déporta donc le grand chef à Marseille, on réduisit la hauteur des tas en self-service de pancartes siglées "FI" et on plaça les partis politiques le plus loin possible derrière les autres composantes du cortège. Le second patch correctif concernait l’image de l’événement. Tout en restant dans la métaphore aqueuse, on fit plutôt une référence à la plage et aux congés payés qu’aux crues et leurs ravages. Et l’on promis l’absence d’effigies à molester. On prit même en compte les évolutions contemporaines : la version 2.0 de la FàM aurait son Cortège de tête ! dans une version sans k-ways - malgré les embruns. Il visait à accueillir tous ceux qui ne se reconnaissent pas d’appartenance à un parti, un syndicat, ou une association militante - mais tout de même à la République : on l’appela donc "espace citoyen". Cet espace, représenté sur le "plan" de la manifestation comme vide et informe fut doté, à la place du "carré" des personnalités, plutôt d’un "char de tête" consacré aux luttes.

Cette tentative d’institutionnaliser le cortège de tête était certes maligne – pourquoi pas tenter d’amener les individus en cours de désaffiliation dans un espace dédié (qu’on imagine ludique et confortable) plutôt qu’ils se solidarisent de manière autonome et donc potentiellement incontrôlable. Mais aussi naïve – le cortège de tête a acquis une saveur à nulle autre pareille, qu’il est difficile de reproduire artificiellement. Une grande partie de ceux qui s’étaient arrachés aux affiliations militantes, s’arracheraient à la citoyenne. Le cortège en tête de la #maréepopulaire serait donc dépassé par un... cortège de tête.

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Mots-clefs : manifestation | auto-critique
Localisation : Paris

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