Les sites antiautoritaires et l’antispécisme

Petite critique des sites antiautoritaires sur le sujet de l’antispécisme

Même dans le milieu antiautoritaire, il y a des luttes qui comptent moins ou qui ne sont pas encore intégrées comme de « vraies » luttes.
Ainsi l’antispécisme, grand mouvement social de libération animale n’est pas encore pris au sérieux.
Les discriminations envers les races (socialement parlant), les sexes, les préférences sexuelles, etc. sont disséquées, leurs mécanismes sont compris, expliqués et rejetés.
Dans le milieu antiautoritaire, on donne une petite place à l’antispécisme (notons que mener un animal de force à l’abattoir est tout sauf antiautoritaire), mais seulement une minorité cherche à comprendre cette lutte et ajuste son comportement à ses idées. Les autres ignorent le sujet tout simplement.
Qu’est ce qui peut faire, par exemple, qu’un homme blanc cis se sente concerné par le féminisme, la LGTBQI-phobie ou le racisme ? Après tout, il n’est pas femme, ni homosexuel, ou trans, et n’appartient pas à aucune catégorie oppressée. Pourtant il se dit que son comportement n’est pas juste vu que la femme, l’homosexuel·le·s, le·la trans comme la personne opprimée a tout simplement le droit de vivre sa vie sans être discriminée.
Pourquoi ne se le dit-il pas quand il s’agit des animaux non humains ?
Pour quelle raison refusons-nous l’esclavage, la coercition, la violence, la tyrannie, le meurtre sauf quand il s’agit d’une autre espèce ?
Est-ce juste une sorte de « communautarisme humain » qui fait que notre espèce puisse avoir de la compassion (enfin une partie) et vouloir de la justice pour ses semblables et ignorer ses valeurs quand il s’agit d’autres êtres vivants, conscients de leur vie ?
Est-ce le poids d’une culture imprégnée de religions (qui hiérarchisent et placent l’homme tout en haut de la pyramide et les animaux en bas de l’échelle) que nous n’arrivons pas à nous débarrasser ?
Ou est-ce tout simplement que nos esprits deviennent tout d’un coup très conservateurs quand il s’agit de défendre nos propres intérêts au détriment des intérêts d’autres êtres ? Car il faut le reconnaître, il est facile de se dire féministe ou antiraciste ; cela n’engage pas de gros efforts en soi. Être antispéciste par contre demande de quitter sa zone de confort et réinventer sa manière de manger, de s’habiller, de se comporter avec les animaux, nos voisins sur terre.
Alors que les sites antiautoritaires et anarchistes espagnols, américains (du Sud comme du Nord), ont inclus la lutte antispéciste dans le répertoire des discriminations comme le sexisme ou le racisme, les sites français ne savent pas où la mettre. On place le sujet dans la thématique « Écologie — nucléaire » ?! C’est dire l’ignorance sur le sujet (mentionnons quand même IAATA qui a une thématique « antispécisme »).
Le problème de cette ignorance du sujet est que des personnes (bien intentionnées on espère) sortent des articles bourrés de fausses informations sur le mouvement. Cela passe comme une lettre à la poste.
On y apprend par exemple que « Certains peuples ont un rapport qu’on pourrait qualifier d’antispéciste, dans le sens où les animaux et les humains sont vus comme égaux, mais sans être végans puisqu’ils consomment des produits issus des animaux pour se nourrir, s’habiller, se chauffer, etc. » ou que « le véganisme, c’est le rejet de toutes dominations entre espèces/individus et la condamnation de toutes les oppressions. ». Sic.

Rappelons quelques définitions de base à propos de ce sujet.
Le spécisme est à l’espèce ce que le racisme est à la race, et ce que le sexisme est au sexe : une discrimination basée sur l’espèce, presque toujours en faveur des membres de l’espèce humaine (Homo sapiens). C’est la volonté de ne pas prendre en compte (ou de moins prendre en compte) les intérêts de certains au bénéfice d’autres, en prétextant des différences réelles ou imaginaires, mais toujours dépourvues de lien logique avec ce qu’elles sont censées justifier.

L’antispécisme quant à lui soutient qu’il ne peut y avoir aucune raison — hormis le désir égoïste de préserver les privilèges du groupe exploiteur — de refuser d’étendre le principe fondamental d’égalité de considération des intérêts aux membres des autres espèces. On ne parle pas d’égalité de traitement (tu veux donner le droit de vote aux vaches comme on entend souvent), mais bien de droit de considération (les féministes militent pour l’égalité femme/homme sans pour autant réclamer le droit à l’avortement pour ces derniers). La capacité à souffrir est le seul critère valable pour un principe d’égalité de considération. Si un être souffre, il ne peut y avoir aucune justification morale pour refuser de prendre en considération cette souffrance. Fixer cette limite selon une autre caractéristique comme la force, l’intelligence, la rationalité serait la fixer de façon arbitraire comme choisir comme critère le sexe ou la race.

Le véganisme signifie, d’un point de vue éthique, le rejet moral de l’exploitation des animaux non humains. Ceux·elles qui acceptent ce principe sont végan·e·s. Bien sûr assumer ce principe veut dire le mettre en pratique (nourriture, vêtements, cirque, zoos, etc.). C’est une forme d’action directe et individuelle contre l’exploitation animale. Un·e antispéciste est devrait donc nécessairement être végan·e. Le contraire n’est pas vrai. Certains groupes défendent les droits des animaux, mais se fichent éperdument du droit de certains humains.

Le spécisme est bien plus ancré que le sexisme ou le racisme qui pourtant ne sont pas en reste. La violence entraîne la violence. L’asservissement des animaux a fait passer l’histoire humaine à un stade de violence accompagné d’un bellicisme sans précédent. L’institutionnalisation de la violence envers les animaux (60 milliards d’animaux sacrifiés chaque année pour la consommation humaine sans parler des poissons) a fait que l’élevage intensif est devenu un des fondements de notre société et nous a entraîné·e·s du coup vers une attitude impitoyable et une indifférence totale.

Bien sûr qu’il y a dans la lutte antispéciste comme dans les autres luttes des personnes qui n’ont rien à y faire, mais l’idéologie est cohérente et la critique doit être construite sur des faits réels.

Il serait peut-être temps de faire une place décente sur nos sites pour cette lutte, de ne pas laisser publier n’importe quoi (intégrer peut-être des antispécistes pour les relectures) et de mettre en cohérence nos idées à nos actions.

GDL

Note

Vous voulez vraiment savoir ce qu’est l’antispécisme ? Demandez nos fanzines à l’adresse suivante : grainedeliberation@riseup.net

Mots-clefs : antispécisme

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