Foutue putain d’usines…

Et foutues putains de capitalistes… À propos de la catastrophe écologique et humaine dans la région rouennaise.

Il a justement fallu qu’hier soir je sois à la représentation de Putain d’usine à la maison de l’université. Il a justement fallu que je sois travaillé toute la nuit par la notion de ces saloperies d’installations qui risquent de nous péter à la gueule à tout instant. Celles-là mêmes qui avalent beaucoup des nôtres dès l’adolescence pour nous les rendre brisés, sans illusions, n’aspirant qu’au sommeil, arrivés à l’âge d’une maigre retraite dans des logements de rien, à l’ombre de ces quartiers ouvriers séculaires, sortes de ghettos d’exploités.
Que je me rappelle la beauté de cette vallée de Seine que je parcourais régulièrement lorsque j’allais rendre visite à ma famille au Havre, de la majesté de ses falaises que toisent en face d’immenses bombonnes de gaz prêtes à nous rayer de la carte, de la balafre que forment les flammes crachées par les immenses cheminées des raffineries, transformant l’incroyable sérénité des ces lieux, couvés entre la falaise et le fleuve en un immonde Mordor d’où sortent les pires horreurs qui détruiront un jour toute vie sur terre. De ces milliers d’anonymes, qui tous sont sortis par centaines de leur HLM après un mauvais café pour retourner alimenter ces funestes machines contre la promesse d’une traite payée pour la Clio, d’une bavette à l’échalote pour accompagner les spaghettis du soir, et qui ensuite retourneront épuisés chez eux en entendant à la radio RTL leur souhaiter un bon réveil et une bonne matinée.
Il a justement fallu que je repense à ce petit bonhomme qu’on avait un jour rencontré mon frère et moi, bourré rive droite, incapable de rentrer chez lui. À son petit Kangoo dans lequel on avait eu du mal à le faire monter pour que je le ramène. Un Kangoo neuf, sans aucune option, sans places arrière, mais flambant neuf dont il était si fier, car c’est un de ses moteurs qui était dedans. Un des derniers qu’il a monté sur la chaîne de Cléon avant de prendre sa retraite après une vie d’ouvrier, de lutte syndicale et de petite paye. Il a fallu que résonne en moi cette petite maison ouvrière où je l’avais ramené, au pied de Seine Innopolis. Un quartier de gens de peu toisés par le Rouen qui va bien.

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