Des conditions de travail idyllique
Un’e jeune cheminot’e qui entre à la
Il ou elle travaillera ensuite tout au long de sa carrière sur les voies, sous la pluie ou la neige, de jour comme de nuit, à restaurer et entretenir le réseau, à la main le plus souvent, au péril de leur vie puisque les trains continuent bien souvent de circuler pendant les travaux.
Quand je lui demande ce qu’il gagne après 15 ans de métier et des responsabilités de chef de chantier, Pascal me répond que son salaire de base est de 1800 euros brut, avec les primes de déplacements il arrive parfois à atteindre 3000 euros brut. Et puis, part d’un grand rire franc, pas du genre à se larmoyer le mec.
Un’e jeune cheminot’e qui entre à laSNCF [...] commence sa carrière avec un salaire de base de 1240 euros brut.
Sauf que voila, les cotisations pour la retraite, elles, sont calculées sur le montant du salaire de base et que depuis deux ans environ, l’
Et puis la retraite justement, on en parle. Je lui raconte mes souvenirs de piquets de grève avec les cheminots de Perrache pendant les manifestations contre la réforme des retraites en 2010, plutôt gais comme souvenir mais qui laisse un goût bien amer puisque nous n’avons rien gagné. Les cheminot’es sont passé’es à un âge de départ à la retraite qui devra atteindre 61.5 ans, s’illes ne peuvent pas se permettre trop de décôtes, sans aucune considération pour la pénibilité de leur travail. [3]
Le régime spécial des cheminots est bourré d’avantages
Alors quoi ? C’est quoi c’est super avantages dont tout le monde parle ? La sécurité de l’emploi ? Oui, c’est vrai, quand au bout de 20 ans de loyaux service sur les voies dans des conditions de merde il a le physique abîmé, la compagnie ferroviaire n’a pas le droit de virer son personnel, elle est obligée de le reclasser quelque part. C’est souvent au guichet que la
Un salaire bien bas, augmenté de primes qui ne cotise pas pour la retraite mais sont taxées comme le reste, des conditions de travail éreintantes,...
Il y a aussi les voyages gratuits. Ah ! les voyages gratuits qui font couler toute la vindicte médiatique sur le dos du régime spécial des cheminots. Mais bon, as-t-on déjà vu un boulanger payer son pain ? Dans la plupart des entreprises, les employés reçoivent d’une façon ou d’un autre un intéressement sur le produit de leur travail, non ? Les stewarts et hotesses de l’air ne paient pas l’avion à ce que je sache, il ont aussi le droit à des billets gratuits ou de grosses réductions pour leurs familles et leurs amis. Bah là, illes ont droit à la gratuité sur les trajets et quelques réservations sur les TGV par an, rien de scandaleux, si ? En plus Pascal me précise que la plupart des cheminot’es qu’il connaît utilisent le train seulement pour aller au travail ou leurs enfants pour aller au lycée, parce que quand ils prennent des vacances illes privilégient souvent la voiture.
Un salaire bien bas, augmenté de primes qui ne cotise pas pour la retraite mais sont taxées comme le reste, des conditions de travail éreintantes, des avantages en nature basique, il faut vraiment être un passionné du rail de père en fils comme Pascal pour ne pas être tenter de partir chez les sous-traitants de plus en plus nombreux de la
Au pire, au lieu de se plaindre ils peuvent aller dans le privé
Sferis [4], Colasrail, et autre Bouygues sont de plus en plus souvent sous-traiter par la
(...) on regrette que les conventions collectives arrachées au patronat par les générations précédentes soient appelées « acquis sociaux ». Et non, bordel, rien n’est acquis et seule la lutte paie.
C’est là qu’avec Pascal on regrette que les conventions collectives arrachées au patronat par les générations précédentes soient appelées « acquis sociaux ». Et non, bordel, rien n’est acquis et seule la lutte paie. Il ne sait plus comment le faire comprendre aux plus jeunes qui préfèrent passer du temps sur les réseaux sociaux que de se battre pour leurs droits. Un moment nostalgique, certes, mais vite balayé puisqu’il embraie sur un portrait de son fils qui, à 16 ans et plus énervé qu’aucun. Espoir.
A propos de la lutte syndicale Pascal ne quittera pas la
(...) à cause de leur désirs carriéristes, les bureaucrates [des syndicats] se rapprochent de plus en plus des patrons.
On est arrivé à destination mais je lui propose de boire un coup, envie de prolonger la rencontre encore un peu. Je suis bien consciente que des gars comme ça j’en rencontrerais de moins en moins, puisque les départs à la retraite amènent peu d’embauche. Déjà 3500 cheminot’es de moins cette année, petit à petit remplacés par des intérimaires, des sous-traitants, et autres flexibles à merci. Pourquoi ? Est-ce qu’illes coûtent moins chers ? Oui y’a un peu de ça mais surtout la
Encore une fois je suis bien contente que mon chauffeur a le rire franc, qu’il me raconte tout cela sans s’en plaindre, sinon il aurait un goût bien amer mon picon-bière.