En France, en 2025, des gens victimes de la crise du logement meurent l’hiver dans la rue. La trêve hivernale a débuté et les squats qui comptent parmi les derniers lieux d’accueil et de solidarité pour des personnes sans solutions de logement sont menacés d’expulsion dans l’indifférence la plus totale. Les discours médiatiques qui caricaturent les squats et les "mauvais payeurs" criminalisent et masquent la réalité de toutes celles et ceux qui n’arrivent pas à se loger dignement. Face à la difficulté d’accès à un habitat digne, la hausse constante du nombre de logement vides et à l’augmentation des loyers, ce sont les sans-logis et les locataires en difficulté que le gouvernement a choisi de réprimer, par le vote de la Loi Kasbarian-Bergé.
Cette loi pénalise squatteur.eus.es et locataires précaires, par des procédures d’expulsion accélérées en cas de loyer impayé. Les délais sont réduits et difficiles à obtenir. Ceux qui ne « s’auto-expulsent » pas en quittant leur logement à l’issue des délais sont passibles d’une amende de 7 500 €.
Une véritable politique solidaire et favorable à un logement digne pour toutes et tous aurait pu s’organiser par la réquisition des bâtiments vides, par le plafonnement des loyers à la baisse et par la construction de nouveaux logements sociaux destinés aux plus précaires... Mais en empêchant et en criminalisant l’ouverture de nouveaux squats solidaires, et en accélérant les expulsions, le gouvernement a choisi de s’attaquer aux plus précaires.
Les pouvoirs publics allant jusqu’à se féliciter des expulsions et cautionnant l’augmentation des loyers s’inscrivent ainsi dans une dynamique de spéculation immobilière et de gentrification des villes où les pauvres sont repoussés toujours plus loin en périphérie des villes. Ils valident ainsi la logique de criminalisation des plus précaires qui sont tenus responsables de leur situation, afin de faciliter leur exclusion de nos territoires laissés à la disposition des promoteurs. C’est une réalité frappante en Ile-de-France plus qu’ailleurs, où la pression locative est insoutenable et où les sur-profits de l’immobilier sont particulièrement élevés.
➡️Le Val de Marne est touché de plein fouet par la crise du logement
Le Val-de-Marne n’est pas exempt de ce processus et s’y loger devient plus en plus difficile. Tandis que 38 000 logements sont vacants, les loyers ont augmenté d’environ 20 % en 10 ans. Côté logements sociaux, on compte près de 100 000 demandes en cours. Et souvent, lorsque les locataires, après de longues années d’attente et de nombreux refus, ont la chance de s’en voir attribuer un, ils font face à d’importants problèmes d’insalubrité. En plus de toutes ces difficultés, nous ne sommes pas épargné.es par les risques d’expulsion. Chaque année, 1500 expulsions sont autorisées par le préfet du Val-de-Marne avec recours à la police, pour un résultat de 1000 familles mises à la rue et des centaines de squatteur.eus.es délogé.es de bâtiments pourtant laissés à l’abandon :
- Le Centre Social Autogéré d’Ivry expulsé en octobre 2021 pour des raisons de spéculation immobilière et encore vide aujourd’hui.
- Le Pylos à Vitry puis le Fender à Ivry expulsés en 2022.
- Le Foyer des Beaudemons à Thiais, expulsé en juillet 2023 sur demande de la Mairie de Paris qui ne proposera qu’à 1/5e des 168 habitant.es des solutions de relogement pérennes malgré son obligation et son engagement à reloger tout le monde.
- Le 38 rue de Seine, plus grand squat de France expulsé juste avant les J0 de Paris 2024 et qui abritait plus de 400 personnes n’ayant pas reçu de solutions de relogement dignes, voire pas de solution du tout pour celles et ceux sans papiers.
- La Jolly Roger à Choisy et le Massicot en octobre 2024.
- À partir d’avril 2025, les squats du Nectar à Ivry et de la Kunda à Vitry, abritant plus de 100 personnes et de nombreuses activités sociales et solidaires seront expulsables.
A cela s’ajoutent les nombreuses expulsions en cas d’hébergement d’un.e proche dans les foyers de travailleurs immigrés, transformés depuis quelques années en résidences sociales entrainant la disparition des espaces de vie collective (cantines, mosquées, salles de réunion...) et une surveillance constante de l’administration.
➡️Les mairies plaident leur impuissance tout en inscrivant leurs actions dans des logiques de gentrification
Quelles oppositions à ces logiques restent-ils alors dans les territoires de gauche ? Quelle résistance offrent les mairies communistes à la spéculation dans nos villes ? L’époque où les « banlieues rouges » offraient des conditions de logement décentes et abordables n’est plus qu’un lointain souvenir. L’exclusion des plus modestes de notre territoire se fait par une logique insidieuse :
- Construction de logements sociaux uniquement accessibles aux classes moyennes sup, pour respecter le pourcentage de logements sociaux à construire mais en les rendant inaccessibles pour les plus pauvres.
- Non-concertation des habitant.es quant à la rénovation ou la destruction de leurs espaces de vie, souvent dans une logique de gentrification. Ainsi, la mairie de Vitry menace de détruire un bâtiment situé sur la dalle Robespierre au pied du futur métro, malgré l’opposition et la résistance des habitant.es, associations et commerces.
Des outils sont pourtant à la disposition des collectivités territoriales qui plaident souvent leur impuissance pour justifier leur inaction. En vertu de leurs pouvoirs de police, elles peuvent :
- Publier un arrêté anti-expulsion, exigeant qu’il ne sera procédé aucune expulsion sur le territoire de la commune tant qu’il n’aura pas été fourni au Maire ou à son représentant qualifié, la preuve du relogement de la personne expulsée et de sa famille.
- Prendre un arrêté de réquisition pour mettre à disposition des bâtiments vides pour des personnes qui en ont besoin.
Si ces arrêtés sont souvent attaqués par l’état et suspendus par la justice après plusieurs mois de procédure, ils permettent malgré tout de gagner un temps précieux pour les occupant.es.
➡️Nous appelons à des actions concrètes pour défendre le droit d’habiter dignement nos villes.
Non contents d’appeler à "faire barrage contre l’extrême droite" aux dernières élections législatives, les partis de l’union des gauches voudraient que l’on se contente d’avoir voté pour eux, et qu’on leur laisse l’organisation de nos vies quotidiennes.
Nous refusons cette vision uniquement électoraliste de la politique et revendiquons le droit de décider nous-mêmes la façon dont nous voulons vivre et organiser nos quartiers, comme nous le faisons déjà au quotidien à travers la création d’espaces d’organisation autogérés, la valorisation des activités d’entraide et de solidarité, la mise en pratique de l’accueil... Or, c’est précisément grâce à l’existence des squats, des foyers de travailleurs migrants, des associations de redistributions alimentaires... que ces pratiques perdurent. Ce sont toutes celles et ceux qui font vivre ces solidarités qui font réellement barrage à l’extrême droite et devant qui les politiques devraient rendre des comptes aujourd’hui avant de prétendre au qualificatif de "Mairie de gauche".
Le mouvement squat et les luttes des locataires ont montré qu’une alternative était possible pour nos villes :
. Nous rappelons la nécessité du droit d’habiter et du droit d’usage sur des bâtiments et des friches vides souvent laissé.e.s à l’abandon à des fins spéculatives. Les occuper nous permet de renforcer la solidarité et l’entraide dans notre ville et au-delà.
. Nous exigeons que les mairies et les Établissement Publics de Coopération Intercommunale procèdent à des réquisitions légales et de longue durée à disposition des personnes en précarité de logement.
. Nous dénonçons les nombreuses expulsions illégales et violentes menées par la police avec la complicité des mairies et des préfectures. Celles-ci sont révélatrices de la violence des institutions et de l’État face aux plus précaires.
. Nous appelons la mairie de Vitry à se positionner contre l’expulsion de la Kunda et du Nectar, en faisant son possible auprès de la Préfecture pour refuser toute intervention en l’absence de solutions de relogement pour toust.es les habitant.es.
Nous revendiquons la possibilité de vivre et de s’organiser en collectif, à contrecourant de l’individualisme imposé par le capitalisme afin de continuer à créer des liens de solidarité et lutter ensemble pour un monde plus juste.
UN LOGEMENT POUR TOUS ET TOUTES !!
Contact : aglogement94@proton.me
PROCHAINE AG : dimanche 16/02 à 17h à la Pagaille (Ivry sur Seine)