Au-delà du 31 mars : ébauches pour un horizon

En ce printemps 2016, le mouvement social se relève, se révèle et se réveille. Après six ans d’inertie à digérer la défaite du mouvement de l’automne 2010 contre la réforme des retraites, il aura fallu la violence d’une Loi Travail historiquement rétrograde pour susciter grèves, manifestations de masses et émeutes. Nous proposons ici des ébauches de réflexions afin de retrouver collectivement et horizontalement une perspective révolutionnaire à nos luttes.

1 / Les mouvements sont faits pour construire

Le mouvement social ne s’arrête jamais. La lutte contre la Loi El Khomri n’est qu’un symptôme d’une explosion contenant des décennies d’offensives du Capital et de répression étatique. Les mouvements sociaux de cristallisation contre tel projet ou telle loi, caractérisés par des grèves massives reconductibles, des occupations, des manifestations sauvages et offensives, des assemblées générales, permettent l’émergence de nouvelles générations de lutte, de réseaux de solidarité, de réflexes collectifs et d’outils d’auto-organisation. La lutte appartient à celles et ceux qui la font, et non pas aux centrales syndicales vides de toute perspective politique. Ainsi se déploie la force agitatrice particulièrement importante des lycéen.ne.s en ce mois de mars 2016. Une génération lycéenne qui a perdu l’illusion de sauvegarde d’une place à défendre dans une société déjà en ruine. Depuis le 31 mars, les phénomènes « Nuit Debout » se multiplient, de Paris à Lyon, de Rennes à Strasbourg, etc. Ces phénomènes rassemblent principalement la fraction « moyenne » de la classe exploitée, cette « classe moyenne » en perte de repères, tiraillée entre la peur de la prolétarisation forcée, la pacification et la neutralisation politique ainsi que l’illusion citoyenne placée dans les institutions bourgeoises. Parallèlement, les jeunes ouvrier.e.s et jeunes chômeur.se.s, les « déclassé.e.s » et jeunes lycéen.ne.s des « quartiers populaires », sont le fer de lance des forces offensives dans la rue contre la police et ces mêmes institutions bourgeoises. La décomposition de l’extrême-gauche institutionnelle n’aura que peu ou pas permis cette fondamentale « jonction » entre les différentes fractions de la classe dominée et exploitée. Cette « jonction » doit moins être pensée dans un rapport d’extériorité entre des mondes séparés que dans un moment commun de dépassement et de perspective révolutionnaire. C’est là l’enjeu de notre temps. Et le mouvement du printemps 2016 semble en cela plus prometteur qu’il n’y paraît.

Mais si la convergence pratique s’effectue parfois, les repères politiques demeurent flous et épars. « Qu’est-ce que nous avons a proposé, nous ? », « Toujours en opposition à, et après ? » Ces remarques dans les assemblées générales étudiantes, que l’on entend depuis le printemps 2006 lors du mouvement anti-CPE et qui se font toujours plus insistantes, révèlent le manque et le besoin de repères, de grilles d’analyse à même d’être force de proposition et d’initiative, de la nécessaire exigence d’un horizon de société. Par la violence de la répression tout du long du mois de mars 2016, le constat se propage qu’il n’est pas possible d’être force de proposition au sein même du cadre de cette société, c’est-à-dire au sein même de cette organisation sociale. Force de proposition pour qui ? Pour le gouvernement et/ou le patronat ? Pour « nous-mêmes » ? Mais que désigne un tel nous ? Une « classe moyenne » apeurée et indignée plutôt que révoltée ? Cette classe ouvrière qui prend déjà dans la gueule et depuis des décennies la violence patronale que la petite-bourgeoisie étudiante peine à découvrir ? La « plèbe » des quartiers populaires qu’il s’agirait « d’éduquer » et de « rejoindre » de manière extérieure et paternaliste ?

Cette insistance sur la nécessité d’une force collective, à la fois affirmative et offensive, révèle le besoin d’un horizon. Cet horizon fait partie de notre ici et de notre maintenant. De là se déterminent des objectifs politiques à même de renforcer et de développer les formes de lutte actuelles pouvant y amener. Ce qui bouleverse considérablement les schémas traditionnels des mouvements sociaux en France et ce qui est déjà le cas en ce printemps 2016.

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Lire l’article dans son intégralité sur le site du Mouvement Anarchiste Révolutionnaire mouvanarev.wordpress.com

Mots-clefs : luttes des classes

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