Rythmes scolaires : dans les écoles, la colère des travailleurs

Malgré les gesticulations du ministre Peillon, la journée nationale de grève, jeudi, dans les écoles s’annonce mouvementée. Et la colère secoue l’ensemble des personnels. Réactions et compte-rendu de la journée de mardi par une institutrice du 20e arrondissement.

Demain [mercredi 13 novembre] notre cher ministre devrait nous annoncer ses « recommandations » pour l’école maternelle, soit une charte de bonne conduite, pleine de "bon sens" nous annonce-t-il à l’avance pour nous allécher. Du « bon sens » je ne sais pas à quel moment ce gouvernement en a eu concernant les rythmes (je ne parle pas du reste de la politique gouvernementale qui est de la même eau)...

Donc comme Peillon a fait semblant d’entendre que vraiment cela ne passait pas en maternelle, il annonce un peu partout qu’il va modifier ça, tant et si bien qu’une collègue me dit la semaine dernière « Peillon a reculé sur la maternelle ! ». En réalité ce qu’il se prépare à envoyer dans les écoles est juste l’équivalent national de la circulaire parisienne de Leleu-Galand que nous avons reçu en octobre.

Vous vous souvenez, cette farce qui nous expliquait que si ça se passait mal pour les plus jeunes de nos élèves, c’était sans doute parce que nous ne prêtions pas assez attention à leur rythme et qu’un peu de pédagogie dans tout ça permettrait à ces élèves de s’habituer au gros merdier qu’ils vivent. Bon elle disait pas ça comme ça, la Leleu-Galand, mais lorsque dans une réunion de directrices/directeurs, celles/ceux-ci lui ont expliqué la réalité du terrain, elle a, paraît-il, ouvert des grands yeux, presque choquée de savoir ce qu’il se passait pour de vrai dans les écoles. Et oui, la réalité ressemble rarement à une circulaire, vous l’avez remarqué ?

Bref, demain le ministère va continuer sa propagande et continuer à nier ce qu’il se passe pour de vrai sur le terrain car les 93% d’écoles « heureuses » (parmi les 20% du pays qui ont eu la grande chance de faire vivre ça aux élèves en avant-première) doivent l’être, heureuses, d’après des critères qui échappent à tous, ou bien le même genre de critères qui permettent aux autorités japonaises de dire aux habitants qu’ils peuvent retourner vivre et cultiver à Fukushima... Même à Toulouse, qui a longtemps été utilisé par le ministère comme modèle, ça ne se passe pas bien : pour preuve, le Snuipp local appelle à la grève le 13 et même à la reconduction le 14 !

Quant à Paris, sa meilleure arme continue à être la division des personnels. Car voilà la recette de la mairie : maintenez pendant des lustres le périscolaire dans un état de précarité avancée, faites miroiter aux syndicats majoritaires que s’ils acceptent le machin mal ficelé ils obtiendront des miettes, donnez au compte-goutte des primes ridicules – pas payées en réalité ou pas tout de suite ou pas en totalité mais qu’à cela ne tienne, ce qui compte c’est la promesse – et vous aurez des syndicalistes tentant de faire passer à tous les précaires qui bossent dans les écoles des vessies pour des lanternes.

Ce qu’il s’est passé aujourd’hui est super important, plus de 500 écoles n’ont eu ni anim, ni cantinière, ni ATSEM [personnel d’accompagnement et d’encadrement en maternel]. En AG des personnels de la ville, on a pu entendre des personnels super combattant-e-s qui disaient, pêle-mêle que la contractualisation des vacataires c’est de la « merde » (ils/elles sont encore moins bien payé-e-s qu’avant), que « cette réforme a été mise en place en dépit du bon sens » ( tiens, on y revient au « bon sens »), « que les enfants n’ont aucun repère », qu’on « vit un rythme de dingue » ( non ça s’appelle les rythmes éducatifs), qu’il y a de gros retard de salaire, que les anims ne peuvent plus rien faire entre 13h30 et 15h, que les REV [personnels responsables des activités périscolaires] ont peur que l’année prochaine tous les vacataires partent bosser en banlieue lorsque les rythmes y seront appliqués, que les anims des assocs sont payés le double que ceux de la ville mais que par contre ils sont encore moins formés et que du coup c’est la cata, etc. ...

Bref, au bout d’une bonne heure et demi de prises de parole, les syndicats majos ont dit à la tribune qu’ils allaient continuer à négocier parce qu’ils veulent « encore jouer le jeu de la construction avec la mairie » contre les sifflements qui montaient de la salle et la volonté d’une majorité d’être à nouveau en grève rapidement.

Bon, je ne sais pas si nous sommes mieux lotis que les personels de la ville. Jeudi nous n’avons même pas d’AG centrale pour prendre des décisions toutes et tous ensemble, néanmoins il est important que nous allions aux AG d’arrondissement, puis à l’Hôtel de ville massivement ; il est important que nous n’en restions pas la parce que la mairie comme le ministère flippent grave, qu’ils savent que la fronde des maires ne peut que s’amplifier à l’approche des municipales et qu’une grève massive des enseignant-e-s et des autres personnels seraient très très mauvais pour eux dans le contexte méga tendu de cette période.

Bref ça suffit, ça suffit et ça suffit !
À jeudi matin et après-midi.

Une instit du 20e

Mots-clefs : luttes de l’école
Localisation : Paris

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