Réponse des collectifs de l’Arche à propos des menaces de l’extrême-droite

Les collectifs de l’Arche ont communiqué sur les réseaux sociaux à propos des menaces qu’ils ont reçues par l’extrême-droite le lundi 28 décembre. L’occasion pour eux de réaffirmer leur position mêlant écologie sans transition, réquisition des logements vides, lutte contre la gentrification et solidarité populaire de quartier.

Le Communiqué paru initialement sur le compte twitter de YouthForClimate 1 et 2 est reproduit ci-dessous :

Le collectif de l’Arche a reçu des centaines de messages de haine, menaces de mort et autres injures depuis que le Petit Cambodge s’est exprimé sur les réseaux sociaux.

Ce lundi 28 décembre, nous avons été attaqués par des militants d’extrême-droite apposant leurs slogans sur la façade de l’Arche, gazant l’intérieur des locaux et menaçant avec des battes de base-ball.

La fachosphère se défoule depuis hier sur Instagram, Twitter ou encore Facebook en messagerie privée ou en commentaires. Ce buzz national est l’occasion pour nous de reposer les bases malgré les discordes.

1. Le local squatté n’est pas le restaurant attaqué par les attentats. Ce local n’a d’ailleurs jamais accueilli d’activités depuis sa construction en 2015 par le SIEMP, bailleur social de la ville de Paris. Le Petit Cambodge est locataire du local mais il est resté fermé depuis son attribution en décembre 2015. Malgré les relances du conseil de quartier, les habitant.e.s ont toujours été sans réponse. Un bail commercial est censé maintenir les lieux loués toujours ouverts et achalandés, ce qui n’est pas le cas depuis 5 ans... Étonnant de la part d’un bailleur qui relève de l’utilité publique mais qui laisse s’éteindre ce quartier. Cela a provoqué l’indignation des habitant.e.s. La situation est d’autant plus regrettable que le quartier de Sainte-Marthe/Moinon, souffre depuis sa réhabilitation dans les années 2000, d’un problème de vacances des locaux d’activité en rez-de-chaussée, malgré une forte demande de la part d’artisans. Ce quartier est aux mains de promoteurs comme le SIN ou encore Nexity qui ont racheté une grande partie de ces derniers, ne renouvelant pas les baux, et les laissant à l’abandon.

2. Cette lutte est ancrée localement.

Nous sommes majoritairement soutenu.e.s par les habitant.e.s, artistes et artisans du quartier. C’est d’ailleurs d’eux et d’elles que cette initiative solidaire et radicale a émergé. Dans l’euphorie médiatique tout semble déconnecté des réalités que vivent les personnes locales.

3. Nous assumons le fait de squatter, et de réquisitionner un local vide. 3 millions de logements sont vacants en France dont 230 000 à Paris soit environ 17% du parc immobilier parisien. Pourtant, le nombre de personnes à la rue et exilé.e.s ne cessent d’augmenter, et le droit au logement devrait prévaloir sur la propriété privée.

4. Nous dénonçons la malhonnêteté du Petit Cambodge dans cette affaire, n’évoquant ni la réalité du quartier, ni nos activités solidaires essentielles à l’égard de personnes en difficultés. Ce local squatté héberge des personnes sans domicile fixe, nourrit des centaines de personnes en difficulté chaque semaine, constitue un lieu de stockage de vêtements, d’objets à donner et permet l’organisation de plusieurs collectifs. Nous sommes reconnaissant.e.s de la solidarité et de la contribution de nombreux commerçants du quartier, nous offrant leurs invendus, cuisinés par la suite.

La lutte dans ce quartier est implantée depuis des dizaines d’années, les habitant.e.s se sont mobilisé.e.s contre des dizaines d’expulsions, nous sommes seulement dans le sillage de ces luttes. Le phénomène de gentrification dans le quartier est marqué par plusieurs acteurs : sociétés immobilières, spéculateurs, Airbnb, restauration de luxe et bobo, boutiques tendance...

C’est une réalité que dénonce d’ailleurs la mairie sans pour autant agir concrètement. Nous avons été ébahi.e.s par le tweet de madame Alexandra Cordebard, Maire du 10e, se positionnant contre notre occupation et pourtant pour les revendications locales. Son positionnement tardif est d’autant plus troublant qu’elle avait été prévenue de l’occupation lors d’un appel pour un relogement urgent d’une personne sans papier auquel elle n’a pas pu apporter de solution.

5. La loi est contestable comme l’est la propriété privée. Notre position est politique : nous refusons ce monde dicté par l’argent et des lois en faveur d’un système capitaliste qui expulse violemment, spécule, ségrègue et tue. Oui lutter contre la gentrification est une lutte écologiste et antiraciste car il en résulte une ségrégation spatiale qui découle des réalités de classes, de genre et encourage au racisme environnemental déplaçant toujours plus loin les personnes précaires et racisées dans des espaces pollués, des logements insalubres, à proximité du trafic autoroutier ou mal desservis... La gentrification est un nouveau colonialisme dans la continuité des politiques racistes et des mécanismes de répression.

La quête de justice environnementale est une lutte pour éviter que les mêmes populations, racisées et précaires, soient encore disproportionnellement exposées aux discriminations environnementales.

6. Le Petit Cambodge n’est pas un « petit restaurateur », c’est une chaîne de plusieurs restaurants. Un restaurant est un lieu marchand, et acteur des dynamiques économiques locales ce qui fait du petit Cambodge un gentrificateur avec ses plats hors de prix pour les personnes vivant dans le quartier.

Notre volonté n’a jamais été de nous attaquer au Petit Cambodge, mais tout simplement d’occuper un local abandonné pendant 5 ans et de répondre aux besoins du quartier. Nous ne sommes pas étonné.e.s et faisons remarquer l’essor médiatique porté par la droite (LREM, PS) et l’extrême-droite contre notre occupation. Leur spectacle médiatique contraste avec la réalité du terrain qui est faite de solidarité, d’entraide et de lutte de quartier.

L’Arche.

Un autre communiqué a été diffusé suite à la situation de ces derniers jours :

Les derniers jours au local autogéré de l’arche au 1 rue Jean et Marie Moinon ont été bien mouvementés !

Suite à un post facebook du petit cambodge dénonçant notre occupation sans jamais parler de la situation locale du quartier, nous avons subi une vague de commentaires haineux sur nos différents réseaux. La fachosphère c’est déchaînée et les menaces sont devenues bien réelles. Lundi après midi deux individus sont venus tagués la façade de l’arche et ont ensuite utilisé leur gazeuse à main à l’intérieur du local.
La journée de lundi a aussi été rythmée par la venue incessante de journalistes à la recherche de leur buzz médiatique. Toute la journée nous avons du nous cacher dans le local pour éviter d’être filmé.es.
Mardi à 10 h nous nous sommes rendu.es au Tribunal de grande instance pour assister à notre procès. La encore les médias, CNEWS, BFM et autres étaient bien présents sans avoir pour autant été conviés à ce procès. Le juge rendra sa décision le 4 janvier 2020, en attendant le local est toujours à nous !
À partir de 17h, nous avons voulu organiser un concert de rue contre les expulsions. La police en a décidé autrement. Dès 16h, les flics sont arrivés devant le local pour arracher la bâche tout juste installée pour se protéger de la pluie alors que des dizaines de personnes attendaient pour un repas chaud. Les flics nous ont forcé à rentrer toutes les tables et les cageots de légumes installés comme tous les mardis pour notre marché solidaire malgré nos attestations d’aide aux personnes vulnérables. Alors que plusieurs véhicules de police étaient déjà présents sur place, des renforts sont arrivés à 17h, heure prévu du début du concert. Les flics empêchaient tout rassemblement de plus de 6 personnes dans la rue . Malgré la forte présence policière devant le local, une trentaine de personnes ont tout de même réussi à se retrouver à 10 min du local sur le canal. Un petit concert ainsi qu’une déambulation festive s’est alors improvisée. Plusieurs fourgons de flics sont arrivés très rapidement et ont interpellé des dizaines de personnes et de nombreuses amendes ont été distribuées.
Une équipe de 10 keufs est restée sans interruption de 16h à 19h30 devant le local. Ils ont contrôlé toute personne qui restait un peu trop longtemps à leur goût dans la rue. À partir de 18h, ils se sont positionnés devant la porte du local empêchant toute personne d’y entrer ou d’y sortir .

Cette opération policière est loin de nous décourager. Même si la présence policière a fortement mis à mal notre capacité de nous mobiliser, nous ne comptons pas pour autant nous laisser faire . A nous de réfléchir à de nouveaux moyens de contrecarrer les plans des juges et des keufs.
De nouvelles mobilisations contre les expulsions seront organisées dans les jours suivants !

Si vous avez reçu une amende n’hésitez pas à nous envoyer un mail à jmm18@protonmail.com pour qu’on puisse vous aider à les contester.

Comme chaque mercredi à 18h rejoignez nous pour l’assemblée de quartier !

Squat partout ! Expulsions nulle part !

Localisation : Paris 10e

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