« Pose ton blaze sur le palais de justice. »

Apposer son nom sur un fond coloré, sur 705 m2, et le tout, quai des Orfèvres, aucun graffeur, aucun artiste mégalomane n’y aurait pensé. C’est une multinationale qui se paie ce plaisir.

Apposer son nom sur un fond coloré, sur 705 m2, et le tout, quai des Orfèvres, aucun graffeur, aucun artiste mégalomane n’y aurait pensé. C’est une multinationale qui se paye ce plaisir : son nom en grand sur le Palais de justice de Paris. C’est facile, elle a fait appel à l’afficheur JCDecaux qui propose cet emplacement à forte valeur ajoutée dans son catalogue.

Depuis des mois, cette façade du Palais de justice est recouverte d’une immense toile publicitaire, qui accueille les unes après les autres ces cataractes. Pourquoi les travaux sont-ils aussi longs ? Pour pouvoir continuer de louer l’emplacement publicitaire ?
Vous imaginez bien qu’il n’est pas autorisé de faire une publicité de 705 m2 sur un bâtiment historique visible depuis les berges classées de la Seine qui coule à ses pieds. Du moins dans ces termes.

Le jeu est amusant : la loi autorise qu’une partie de la bâche qui vient couvrir le bâtiment pour ses travaux puisse accueillir une publicité pour financer sa restauration. Mais cette surface est limitée à 40 % de la surface totale. Comment faire donc pour avoir une plus grande surface de publicité ? C’est simple : faites une bâche surdimensionnée qui monte jusqu’au toit, qui déborde sur les côtés, qui soit suffisamment grande finalement pour que 40 % de sa surface devienne suffisamment significative : 705 m2.

Parlons argent : c’est JCDecaux qui loue l’emplacement aux marques, le Palais de justice est le bailleur. Les chiffres ne sont pas publics mais on peut supposer que la plus grosse part du gâteau revient à l’entreprise dont c’est le métier, à savoir le publicitaire JCDecaux. La justice française a-t-elle besoin de recourir à une multinationale pour financer les travaux de réfection du tribunal de grande instance de Paris ?

Si la réponse est oui, il semble que la situation soit grave. Si la réponse est non, alors comment se fait-il que la bâche y soit encore ? Autant de questions que les habitants sont en droit de se poser.

La campagne en elle-même maintenant : suivant le procédé maintenant bien connu de l’écoblanchiment, la multinationale, à l’instar de beaucoup d’autres, cherche à modifier son image, surfant sur la vague de la bonne conscience écologique, la couleur verte venant se substituer aux couleurs vives et agressives habituelles.

L’espace public est-il fait pour accueillir sur ces façades historiques des campagnes publicitaires de manipulation de masse ? Quel moyen l’habitant de Paris a-t-il, si ce n’est d’aller écrire au pied de ce monument d’un nouveau type ses inquiétudes en guise d’ultime supplication à cette société malade ?

PALAIS DE PUB pouvait-on lire le 11 février 2015 sur cette palissade.

Henri Alexandre

Mots-clefs : anti-pub
Localisation : Paris 1er

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