Lallement, le racisme et l’histoire de la police

Dans un article de Médiapart daté du 02/06/2020, on découvre la retranscription d’un message du préfet de police Lallement diffusé à ses troupes via l’intranet et par mail le matin même du rassemblement qu’il interdirait quelques heures plus tard devant le TGI de Paris appelé par le comité Adama.

Dans ce communiqué, à première vue rien que du banal pour une communication du 1er flic parisien : la police n’est ni violente ni raciste, il n’y a pas de bavures ou alors elles sont déjà sanctionnées et ces faits ne sont que le reflet des agissements de quelques brebis égarées qui sont dûment sanctionnées par la police (on aimerait mieux connaître et que soit publicisées ces sanctions et rapportées au nombre de plaintes déposées à l’IGPN qui ne constituent elle-même que le sommet de l’iceberg).

Mais au milieu une petite phrase choquante :

Je ne laisserai pas salir une institution [comprendre la police, en particulier parisienne] dont le rôle dans les grands moments de l’histoire de ce pays a été essentiel.

On peut s’interroger sur les périodes auxquelles il est fait référence ici : la Seconde Guerre mondiale durant laquelle la police française et parisienne en particulier a collaboré très activement avec les nazis pour organiser et perpétrer rafles, arrestation et déportations de juifs, de résistants (qualifiés alors de terroristes rappelons-le), de tziganes, d’homosexuels, etc. ? Rappelons encore que la police nationale est créée en 1941 par le gouvernement de Vichy, auparavant ce sont les gendarmes et des polices spécialisées ou municipales répondant aux ordres d’un préfet de ville qui se partagent ses prérogatives.
Fait-il plutôt allusion à la guerre d’Algérie durant laquelle la police parisienne a réprimé si violemment les manifestations d’Algériens en France que certains ont fini noyés dans la Seine (ils ne se sont d’ailleurs pas jetés à l’eau eux-mêmes) en octobre 1961 ?
Ou à la répression du mouvement étudiant 1968 et des mouvements de grève de 1967 et 1968, ou d’autres mouvements étudiants comme celui qui a conduit à la mort de Malik Oussekine en 1986 ?
Faut-il y voir une manière de se placer dans la tradition des préfets : Marchands, Bard, Bussière et autres Papon ? C’est vrai qu’il fut essentiel, le rôle de la police…

Il est étonnant que cette petite phrase n’ait suscité aucune réaction ou presque ni dans les médias ni chez les descendants de déportés ou des disparus d’octobre 1961 pour qui de tels propos sont insupportables, et surtout pas de la hiérarchie de ce préfet.
Serait-ce donc qu’en 2020, si l’on est préfet de Paris on peut réécrire l’histoire et en ignorer, voire en nier une partie en toute impunité ?

Vous aviez raison, monsieur Lallement, nous ne sommes vraiment pas dans le même camp et c’est tout à notre honneur !

Localisation : région parisienne

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