L’autonomie, ou rien

Une critique radicale de la politique en lien avec Nuit Debout, paru sur Lundi Matin, suite (indépendante) de Vivre, ou rien.

Notre révolte déferle, désormais. Notre désir de vivre, notre passion de vivre, notre énergie érotique, celle d’Eros comme pulsion de vie, réprimée durant des années, contenue dans une impuissance politique et une politique de l’impuissance, ne peut désormais plus être endiguée. On nous croyait mort, on nous voulait mort, nous voici debout. On voulait restreindre notre puissance d’agir aux mornes journées électorales de la République, voilà que nous l’occupons chaque nuit, comme place de la Commune, comme point de départ vers de multiples insurrections. Ce sont des milliers de vies qui se lèvent, chaque nuit, jusqu’au bout de la nuit, jusqu’au bout de toutes les nuits.

Nous sommes en train de vivre autre chose que nos survies misérables, de vivre, tout simplement. Nous sommes en train de construire, de nous construire, de nous auto-organiser, de nous insurger. Mais alors qu’un processus d’auto-organisation du quotidien des places semble pouvoir émerger, voilà qu’on nous propose encore de canaliser et de manipuler notre révolte de vivre au profit d’une politique « alternative » de l’impuissance, de transformer un torrent de vie en un canal administré « alternatif », de transformer une autonomie quotidienne des vivants en une machine électorale de conquête de l’administration des choses mortes, de l’économie. Notre pouvoir de vivre, de nous révolter et de nous auto-organiser quotidiennement, confisqué au profit d’une autre machine électorale qui, comme Syriza, ne pourra qu’administrer « alternativement » l’austérité capitaliste après confiscation des puissances d’agir d’un mouvement d’occupation de places. Et ce, au profit d’une « 6e République » soi-disant sociale, République qui n’a rien donné 5 fois sinon être érigée sur des cadavres, avec des Constitutions aux grands principes mystifiants, organisant une réalité étatico-capitaliste ; une politique « alternative » offrant au choix une sous-vie de 800 euros, un autre Syriza ou une URSS social-démocrate. Nous n’irons pas marcher sur des clous électoraux comme le fakir nous y invite.

Nos puissances de vivre et d’agir, veulent créer autre chose qu’une machine électorale, qu’un autre Syriza, qu’une autre République, qu’un autre RSA, qu’une autre URSS. Notre auto-organisation quotidienne, ses libérations de parole, ses joies, son effervescence, tout cela n’est pas destiné à une récupération politicienne n’ayant d’autre optique qu’une « autre » politique économique, qu’une autre misère, qu’une autre austérité, ou – au mieux – qu’un autre capitalisme. Les machines électorales s’emplissent toujours au fur et à mesure que nos places se désemplissent, en Espagne comme ailleurs. Notre autonomie est un début de quelque chose de grand, celui d’une vie collective libérée des misères et des servitudes économiques, libérée des soumissions politiques, libérée d’une organisation de nos vies par des puissances étrangères – l’économie et la politique.

Notre passion de vivre ne tient pas dans vos urnes ! Qu’est-ce que vous voulez que cela nous fasse votre politique, votre nécessité, vos pauvres histoires électorales et économiques ?

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