Nous, militantes féministes et anticarcérales, faisons le choix de dissoudre l’association Genepi. Nous refusons de continuer à faire perdurer une association qui n’a pas été pensée comme un outil de lutte contre l’enfermement et n’a jamais servi l’intérêt des prisonnier-es.
Le Genepi a été créé par l’État français à la suite des mutineries dans les prisons dans les années 70, notamment pour calmer les contestations et acheter la paix sociale. Puis, durant 43 ans, il a organisé, en collaboration avec l’administration pénitentiaire, des activités en prison, qui ont participé à l’illusion de conditions d’incarcérations plus humaines. Il a aussi permis à des étudiant-es bourgeois-es de grandes écoles de s’acheter une bonne conscience et de servir leur voyeurisme sous couvert de charité, tout en les formant à devenir des futurs membres du système police-justice-prison. Le Genepi a donc été un des partenaires de l’administration pénitentiaire et il a contribué au maintien de son pouvoir et par ce biais, a joué le jeu de l’État.
Nous refusons de continuer à être associées à l’histoire du Genepi et au fait qu’en posant un vernis humanitaire sur la taule, il a servi à la légitimer et la renforcer, justifiant ainsi toujours plus d’enfermement. Nous refusons de nous contenter d’une critique réformiste de la taule et de la justice, seule possibilité entendue par l’État et discours dominant formulé par le Genepi pendant plus de 40 ans. Le système police-justice-prison ne peut pas être réformé. Outil du racisme, du capitalisme et du patriarcat, il doit être aboli.
Au cours de son histoire, des militant-es du Genepi ont tenté de porter une parole de plus en plus critique sur les prisons. Mais les discours anticarcéraux sont profondément incompatibles avec une structure associative liée à l’État qui contrôle et musèle les actions. La mainmise de l’État sur les associations est constante, à travers notamment les subventions, utilisées pour les rendre dépendantes et dociles. L’État choisit à qui et pour quoi il donne de l’argent : ainsi aucune remise en cause du pouvoir étatique et des systèmes de domination maintenus par ce même pouvoir n’est possible sans risquer de se voir retirer les ressources financières.
De plus, la mise en concurrence des associations entre elles pour obtenir des subventions les oblige à se conformer à des codes classistes et racistes pour répondre aux normes attendues, et à gérer une charge de travail administratif conséquente. Ce travail est réalisé principalement par des meufs, via des contrats de travail précaires, comme les services civiques, ou du travail non-rémunéré. Le Genepi n’a pas fait exception.
Nous refusons, en tant que meufs, que cette structure continue à reposer sur notre exploitation. Nous refusons de continuer à nous plier au système associatif qui entrave les moyens de lutte et qui est utilisé afin de camoufler les violences que l’État produit et veut maintenir en créant un semblant de démocratie. Nous refusons de continuer à rendre des comptes et à nous justifier auprès d’un État qui ne cesse de construire de nouvelles prisons et qui enferme toujours plus. Nous refusons de continuer à lisser notre discours et à faire des concessions pour répondre aux attentes d’institutions racistes, classistes et patriarcales.
Notre perspective de lutte ne peut être que révolutionnaire, son but est l’abolition de la taule et de toutes les formes d’enfermement. En faisant le choix de dissoudre le Genepi, il s’agit pour nous de refuser de faire des compromis sur nos convictions et de pouvoir penser par la suite d’autres moyens de luttes réellement féministes et anticarcéraux.
Féministes anticarcérales tant qu’il le faudra.
Solidarité avec tout-es les prisonnier-es et crame la taule !