Après une première qualification des faits de « viol en réunion », le procureur retient les violences volontaires en réunion mais pas le viol. Le Maire d’Aulnay dénonce alors un « détournement de la vérité » et le juge d’instruction retient, lui, la qualification de viol pour l’un des 4 policiers. L’IGPN et les syndicats de police reviennent à la charge, le viol — incontestable selon sa définition en droit — serait « non-intentionnel », « accidentel » en quelque sorte ! Et les policiers absous du crime de viol !
L’avocat de Théo, Maître Dupont Moretti réfute la thèse de l’accident, rappelant la définition juridique du viol.
Le viol est défini par le Code pénal (article 222-23) comme tout acte de pénétration sexuelle, de quelque nature qu’il soit, commis sur la personne d’autrui par violence, contrainte, menace ou surprise. C’est un crime passible de la cour d’assises. On distingue le viol des autres agressions sexuelles à travers l’existence d’un acte de pénétration qui peut être vaginale, anale ou buccale. Cet acte peut être réalisé aussi bien avec une partie du corps (sexe, doigt, ...) qu’avec un objet. La peine encourue par l’auteur d’un viol est de 15 ans de prison.
"Si la requalification arrive, alors pour tous ceux qui ont pénétré des victimes, il leur suffira de dire qu’il n’y avait pas d’intentionnalité sexuelle pour échapper à la cour d’assises", estime Me Éric Dupont-Moretti, l’avocat de Théo.
Que disent documents et témoignages sur l’usage d’une matraque télescopique, sur la position des deux victimes au moment où elles ont été blessées, et sur les auteurs de ces blessures ?
1/ L’utilisation en "piqûre" d’une matraque télescopique, (autre désignation de ce geste : "à l’horizontale")
Ce mode de frappe a été utilisé par la police à Drancy en 2015 et dernièrement à Aulnay-sous-bois.
À Drancy :
Un policier municipal de Drancy, Arnaud P., comparaissait à l’audience pour violences volontaires avec arme. Mais il s’est évertué à dire qu’il « n’y avait pas eu d’incident ». Ce 29 octobre 2015, pourtant, du sang a été retrouvé dans la Peugeot 307 de l’équipage de police, ainsi que sur le caleçon d’Alexandre T.. Vers 4 heures du matin, un médecin a constaté la blessure du jeune homme de 28 ans et lui a délivré dix jours d’interruption totale de travail. Son ADN a même été retrouvé à l’extrémité du bâton télescopique de défense utilisé par le policier.
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C’est ce que plaide son avocat,(du policier) Me Florent Hauchecorne. Son client aurait usé de sa matraque « à l’horizontale » pour parer les coups de pieds d’Alexandre T.
À Aulnay :
La scène, filmée par la vidéosurveillance de la police municipale, montre notamment un policier « porter un coup de matraque horizontal au niveau des fesses » du jeune homme, après que son « pantalon a glissé tout seul », selon cette même source. Le jeune homme a déclaré que l’un des policiers lui aurait introduit sa matraque dans l’anus.
2 / Position des 2 victimes au moment du coup de matraque « en piqûre » :
Pour Théo ; extrait de son témoignage :
« Le policier, là, il me regarde. Moi, j’étais de dos, de trois quarts, donc je voyais ce qu’il faisait derrière moi. Je l’ai vu prendre sa matraque et il me l’a enfoncée dans les fesses, volontairement. Dès qu’il m’a fait ça, je suis tombé sur le ventre et là ils m’ont dit : Assieds-toi maintenant. J’ai dit : J’arrive pas à m’asseoir, je ne sens plus mes fesses. »
Pour Alexandre : Le jeune homme explique qu’afin de le transporter, Arnaud P. et ses deux collègues ont voulu l’allonger à l’arrière d’une voiture dont le dossier avait été rabattu aux deux tiers. Lui se débat. D’après un des policiers auditionnés, il aurait insulté les agents.
« J’ai vu les sièges repliés, je n’ai pas compris, j’ai dit “je rentre pas, je suis pas un animal”. Ça a chahuté », reconnaît Alexandre T.
Tandis qu’il est menotté dans le dos et que, délesté de sa ceinture, son pantalon glisse sur ses hanches, deux policiers le tirent par les épaules pour le faire entrer dans la voiture. Arnaud P., lui, le pousse vers l’intérieur.
« D’un coup, j’ai senti un truc dans mes fesses. J’ai hurlé, relate Alexandre T. lors de son audition, lue à l’audience par la présidente. Je me suis allongé sur la banquette et j’ai pleuré »
Comme par hasard dans le cas des deux victimes, Alexandre et Théo, leur pantalon avait glissé !!
3/ Les auteurs de ces « interpellations musclées »
À Drancy, il s’agit de policiers municipaux, à Aulnay il s’agit de la BST, « la police de proximité qui fait régner l’ordre par la force ».
Les agents de la BST ne sont ni « des policiers d’ambiance ou des éducateurs sociaux » ni des « grands frères inopérants qui font partie du paysage », affirmait Brice Hortefeux en 2010, alors qu’il supprimait les UteQ, symbole d’une certaine police de proximité. Les brigades spécialisées de terrain prenaient alors le relais. Leur objectif : « mettre fin à la délinquance et rétablir la confiance avec la population ». Quitte à faire régner l’ordre par la force, comme l’affirmait un article du Bondy Blog, publié en 2014. « Maintenant quand nos enfants sortent (..) On a peur qu’ils se fassent frapper par la BST » s’indignait ainsi Sophie une mère de famille habitant à Aubervilliers. Article de Libé
Dans le même temps, cinq jeunes majeurs étaient jugés mercredi soir, en comparution immédiate, ( pour certains la justice est rapide ! ) à Bobigny, après les soulèvements liés à l’agression de Théo. La justice ne reprochait pas aux prévenus d’avoir jeté des pierres sur la police, ni d’avoir mis le feu à un véhicule, mais un « délit d’embuscade en réunion ». Autrement dit de s’être rendus dans un lieu, en vue de commettre des violences. Cela ne les a pas empêchés d’être lourdement condamnés pour des fautes prédictives !! alors que les 4 policiers ont été mis en examen, sans mandat de dépôt !
E.L. membre du Collectif Vérité et Justice pour Ali Ziri.