Le mythe de la libération de la parole

Que brûle le cinéma Français,
Que brûlent les comicos,
Que brûle le soutien que tu apportes à tes potes les violeurs,
Que brûlent l’État et la justice française,
Que brûle l’indécence de vos indifférences.

Ils sont nombreux à nous avoir craché dessus de manière claire.

Ils sont aussi nombreux à avoir salué « la libération de la parole » dans les milieux artistiques, mais pas seulement, suite au « Mouvement Metoo ».

L’absurdité de ce discours nous laisse sans voix.
La vérité c’est que depuis toujours, les femmes ont hurlé de toutes leurs forces que les hommes les violaient.

Dans leurs cercles proches, d’abord. Les femmes ont souvent dénoncé les viols et leurs auteurs. Mais dans une grande majorité des cas et dans tous les milieux, on refuse d’accueillir vraiment leurs paroles, et les victimes sont exclues de ces cercles, au profit de leurs agresseurs.

Devant la justice, ensuite. Les femmes sont nombreuses à avoir poursuivi ou tenté de poursuivre leurs agresseurs. Mais une femme violée n’est rien pour le système judiciaire.
La victime, dans le procès pénal, n’a voix au chapitre que pour se défendre d’infamies prononcées à leur encontre souvent par l’avocat de la défense, parfois par les juges, jurés, ou par le ministère public (qui, dans le procès pénal, se place en « sauveur », seul autorisé à poursuivre les auteurs d’infractions pénales).

Et encore, pour qu’elles aient voix à cet atroce chapitre, il faut que la police ait pris leurs plaintes. On sait que les flics sont de vrais chiens face aux violences faites aux femmes.
J’ajouterais ici le témoignage de M, celui des policiers du commissariat de Saint-Denis qui lui expliquent que ce qu’elle a subi n’est pas un viol, parce que c’est arrivé il y a plus de 4 mois (???), et que si elle veut porter plainte, elle va attendre plus de 3 heures, car si des personnes arrivent après elle, elles seront prioritaires. Ce témoignage est tout, sauf isolé. On ne parle pas ici de « mauvais flics », mais d’un système judiciaire opposé aux victimes de violences sexuelles.

Face à l’indécence de leurs proches et de la justice, les femmes ont aussi dénoncé publiquement leurs agressions.
« Metoo » en est un exemple, qui s’est proposé de permettre aux femmes de libérer la parole publiquement, sur les réseaux sociaux.
De nombreuses femmes ont alors pris la parole, parfois pour la première fois, parfois pas. Elles ont dénoncé les violences sexuelles qu’elles ont vécues, et leurs agresseurs.
Pour autant, nombreux sont ceux qui ont salué cette « libération de la parole » sans bouger le petit doigt. Ils ont reproduit les absurdités de la justice et des milieux interpersonnels. Ils ont entendu toutes ces femmes sans chercher à les écouter.
On a accueilli leurs témoignages parce qu’elles ne nous en ont pas laissé le choix. Mais on n’a strictement rien fait au-delà. Comme si témoigner était l’alpha et l’oméga de la reconstruction.

C’est donc le traitement politique et médiatique des témoignages de viols et d’agressions sexuelles qui est dramatique.
Absolument rien n’a changé depuis Metoo. Les femmes ne sont toujours pas crues ni accompagnées.

La reconnaissance des traumatismes liés aux viols n’a pas évolué.
On entend encore très souvent qu’une telle est folle ou hystérique, qu’une autre ment ou cherche de l’attention.
Les représailles, les menaces à l’encontre des victimes se sont faites nombreuses.
Ce sont les mêmes discours, les mêmes violences que l’on fait subir aux victimes qui ont osé parler que depuis toujours.

Le cinéma français nous en a donné la preuve s’il en fallait.
La preuve que personne n’en veut aux violeurs.
La preuve que les victimes n’ont qu’à vivre seules leur condition, que le monde veut les voir s’effacer au profit de leurs agresseurs.
La preuve que les hommes combattent avec ardeur les tentatives de faire du viol et des traumatismes une question sérieuse.

Parler d’agressions que l’on a subies peut être une étape importante à la reconstruction.
Mais les conséquences que cela peut avoir, la manière dont sont reçus les témoignages ainsi que l’action — ou plutôt l’inaction — qui suit ces témoignages, constituent des traumatismes supplémentaires, un énième coup de massue, pour les victimes.

Ce n’est pas tant de le dire, mais d’être écoutées, crues, aidées si besoin et soutenues dans nos choix et notre manière d’appréhender nos désirs et besoins de justice.

Que brûle le cinéma français,
Que brûlent les comicos,
Que brûlent l’État et la justice française,
Que brûle le soutien que tu apportes à tes potes les violeurs,
Que brûle l’indécence de vos indifférences.

Mots-clefs : anti-sexisme

Envoyer une information complémentaire

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
Se connecter
Votre message

Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.

À lire également...