Après les « zones de sécurité prioritaires », l’enfumage participatif - Jean-Pierre Garnier

Qu’on se le dise : la « politique de la ville » va connaître un tournant.
Ce n’est pas le premier. Depuis les fin des années 1970, elle en a connu d’autres, sous cette appellation ou non, avec les résultats que l’on sait. Mais celui-ci serait une fois de plus décisif si l’on en croit l’orchestration médiatique dont il bénéficie.

Pour saluer ce tournant, l’un des deux quotidiens du social-libéralisme en a fait sa une avec ce titre triomphaliste : « La banlieue passe à l’acte  » (Libération, 9 janvier 2013). Certainement pas à l’attaque, effectivement, puisque c’est dans une nouvelle forme de pacification « soft » que les jeunes habitants des « cités » sont appelées à s’engager.

La date choisie par le journal d’Edmond Rothschild pour faire part à ses lecteurs de l’importance de l’événement n’était pas due au hasard. Le même jour, le ministre délégué à la Ville, François Lamy, se rendait à Bobigny pour une première « rencontre de concertation » avec les habitants des quartiers. Avec la « participation », la « concertation » est en effet l’un des maîtres mots résumant le nouveau cours de la « politique de la ville ». Ce qui, à première vue, pourrait surprendre tant ces slogans creux sont usés à force d’avoir accompagné le lancement des plans calamiteux qui se sont succédé depuis les années 1980 pour résoudre la « crise des banlieues ».

Qu’à cela ne tienne ! Il suffira de changer le sens des mots pour donner un tour novateur à ce qu’ils désignent. Pour ce faire, un « concept » importé d’outre-Atlantique est mis en avant, l’«  empowerment ». Si l’on s’en tient à sa définition officielle – que les adeptes hexagonaux de la politique qu’il recouvre se sont contentés de traduire mais gardant le terme dans sa langue originelle (pour faire savant en même temps que paraître faire du neuf) –, il s’agirait de « donner du pouvoir » aux gens qui en sont dépourvus, à ces citadins de deuxième zone parqués dans les zones de relégation, pour en faire des acteurs à part entière, et non plus de simples figurants, dans la « réhabilitation » de leurs quartiers. Car, comme le soulignait finement l’un des plumitifs de "Libération" dans le même dossier, si le « bilan urbain de la rénovation urbaine est positif  » – sans préciser pour qui –, le « bilan humain » laisserait beaucoup à désirer. «  Les gens ont l’impression que ces politiques se menaient hors d’eux. Et parfois contre eux, déplorait ainsi un leader associatif assermenté. C’est terrible, parce que cela les a éloignés encore davantage de la politique.  »

Note

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Localisation : Paris

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