Mineurs isolés étrangers : compte rendu du rassemblement devant la Paomie

Retour sur un rassemblement prometteur, le 26 décembre 2014, devant la permanence d’accueil et d’orientation des mineurs isolés étrangers (PAOMIE).
La Mairie de Paris s’est décidée à ouvrir temporairement un gymnase dans le 14ème. Rassemblement tous les jours (du lundi au vendredi) à 19 h devant la PAOMIE (127, boulevard de la Villette, M° Jaurès) pour se tenir au courant, et prendre contact les un-e-s, les autres.

Commençons par le début, l’anecdotique forcément, mais qui reste significatif. À l’arrivée, on constate que le bus des charognards du Recueil social de la RATP stationne curieusement à un autre emplacement qu’à l’accoutumée, c’est-à-dire en général, pas loin de la PAOMIE. Là, ils se font plus discrets. Il faut tout de même rappeler que certains chauffeurs de ces bus n’hésitent pas à rançonner les SDF au chantage de les refuser dans ce bus qui les conduira à un centre d’hébergement d’urgence. Si vous avez l’occasion d’initier un échange, vous verrez qu’il n’est pas aisé de parler avec ces gros bras, gardiens du bus...

Trois camions de CRS sont garés devant la station Jaurès (ce qui n’est pas tant que ça).
Des flics sur le qui-vive patrouillent aux différents accès et couloirs du bâtiment de la PAOMIE.

Au passage, on constate qu’une vitre du bâtiment a cédé, laissant place à une bonne brêche. Quoi ? Quelqu’un en voudrait à la PAOMIE ? Ce serait curieux puisqu’ils ont su démontrer qu’ils étaient de parfaits philanthropes…

Rassemblement festif sur le terre-plein

Le rassemblement en lui-même est plutôt une bonne surprise en cette période de fêtes où les mobilisations et manifestations ont tendance à être désertées.
Plus de cent personnes se massent sur le terre-plein, sous les voies du métro, devant la PAOMIE, à proximité de là où dorment habituellement certains mineurs. De la musique sort d’une sono. Le 115 du particulier a assuré la logistique et fait des distribs.

À la diffusion d’un titre d’Alpha Blondy, c’est l’euphorie. Les mineurs dansent et scandent les paroles qu’ils connaissent. L’ambiance est bonne.

Le DAL, associé du 115 du particulier, monopolise la parole au micro, ce qui ne le valorise pas et le décrédibilise même, puisque manifestement, ses membres ne maîtrisent pas le sujet… Pour autant, sur un sujet aussi sensible et qui s’éternise, ce type de renfort n’est pas mal venu. Il doit cependant s’inscrire dans la durée : clairement, ça ne doit pas être qu’un coup comm’ pour des éléphants qui ont déjà assez de pub… Heureusement, une bénévole de l’ADJIE arrive à placer deux phrases, ensuite.

Petit retour sur ces derniers jours

Ce mouvement reste très prometteur, car lancé par des lycéens, il a touché des gens du quartier, des syndicalistes, et commence à ramener de nouvelles personnes avec ou sans orga. C’est une bouffée d’air frais, par exemple, pour les maraudeureuses et les bénévoles d’assos de soutien aux MIE (ADJIE, RESF), qui se sentent souvent désarmé-e-s devant la situation des MIE.

On profite des discussions informelles pour faire un retour critique sur l’occupation de dimanche dernier… Ce qui ressort, c’est le manque évident de coordination sur cette action, qui en elle-même reste salutaire.

Se coordonner : la nécessité d’une AG

Il ressort de tout ça en effet un manque de coordination. Le rassemblement pourtant lancé par des individu-e-s à notre connaissance sans orga donne l’impression d’être une émanation d’orgas. Ce qui peut poser problème, car cette mobilisation est manifestement populaire et plurielle. Par ailleurs, les actions ne sont pas visibles, et les infos circulent mal. On ne peut se contenter de rendez-vous lancés à la va-vite sur un compte Facebook auquel la majorité des gens n’ont pas accès (le minimum, c’est de communiquer par Démosphère un peu à l’avance…).

C’est là qu’apparaît clairement l’intérêt de se rassembler en AG autour de la cause des MIE, du logement, contre les injustices et les discriminations, etc. Or, si l’AG est le plus court chemin vers la crise de nerf, elle permet aussi de connaître les attentes des un-e-s et des autres, de se coordonner pour les actions, de permettre à la rue, à nous, à toutes les gens de se réapproprier les décisions et la lutte. D’amplifier la lutte, quand c’est possible.

Une petite victoire

Nous devons sortir de cet isolement politique, car le rassemblement du 26 le démontre, nous pouvons « gagner ».

En effet, la Ville et FTDA ont lâché 16 places d’hôtel supplémentaires (en plus des 25 habituelles). Ça veut dire qu’ils les ont, qu’ils ont ces moyens, et que si quelques bris de verre et un rassemblement peut les amener à les prendre, une vraie mobilisation pourra les amener à régler pour de vrai la question des mineurs isolés à la rue. Car les mineurs n’ont pas à dormir une nuit de temps en temps à l’hôtel. Ils ont besoin d’un hébergement pérenne et stable. D’un suivi social et moral après avoir connu la rue et les vexations, la souffrance et des traversées de pays harassantes, souvent à pied.
Ils ont besoin qu’on laisse en paix leur cartilage, ils ont besoin de ne plus subir la méfiance et les tests osseux.
Parce que…

Les tests osseux c’est d’un autre âge !
Il te dit merde mon cartilage ! (slogan)

La lutte continue.

Note

PAOMIE : Permanence d’Accueil et d’Orientation des MIE
MIE : Mineur Isolé Étranger
ADJIE : Accompagnement et Défense des Jeunes Isolés Étrangers
RESF : Réseau Éducation Sans Frontières
FTDA : France Terre d’Asile

Localisation : Paris

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