Green Bloc contre la réforme : les écologistes demandent la retraite du gouvernement

Grève, retraites et écologie… tout est lié ! Des militant·e·s de différentes organisations expliquent pourquoi ils et elles participent du mouvement en tant qu’écologistes et appellent à la multiplication des actions contre un système qui exploite tous les milieux et détruit tous les organismes.

Depuis le début de la grève, les écologistes participent aux blocages, aux manifestations, aux piquets de grève. Ils et elles ne sont pas seulement présent·e·s en tant que travailleurs individuels touchés par la réforme des retraites, mais parce que cette réforme accentue les tendances à la capitalisation et à la financiarisation de l’économie dont on connait les conséquences pour la santé et les territoires. Des militant·e·s de différentes organisations expliquent pourquoi ils et elles participent du mouvement en tant qu’écologistes et appellent à la multiplication des actions contre un système qui exploite tous les milieux et détruit tous les organismes.

Autour de ce texte, une récolte pour les caisses de grève a été organisée jeudi 19 décembre à la gare Saint-Lazare. Une cagnotte en ligne est également disponible ici. Ces premières initiatives en appellent d’autres… restez attentifs !

Paru sur Plateforme d’enquêtes militantes

La grève contre la réforme des retraites ne correspond pas à ce qu’on appelle généralement une lutte écologiste. Pourtant, nous, écologistes, sommes sur les piquets de grève, nous soutenons les mobilisations des cheminot·e·s, des Gilets jaunes, des enseignant·e·s, des personnels soignant·e·s et de toutes celles et tous ceux qui luttent contre la réforme. Pourquoi les écologistes soutiennent-ils la grève ?

La première raison concerne l’allongement de l’âge de départ en retraite. Un tel allongement, prévu notamment par le dispositif du bonus-malus qui incite à un départ à « l’âge-pivot » de 64 ans, conduira à une augmentation du temps de travail. Travailler deux ans de plus (au minimum) c’est produire davantage de marchandises, qu’elles soient matérielles ou « immatérielles ». L’allongement de l’âge de départ à la retraite conduit donc nécessairement à une augmentation massive de la durée globale du travail. Or, tout travail salarié suppose une extraction de matières premières nécessaires à la production des marchandises et une certaine quantité d’énergies, principalement fossiles, nécessaire à la réalisation du travail (de l’essence pour se déplacer, de l’électricité pour faire fonctionner des systèmes informatiques, etc.). L’équation est donc simple : toute augmentation du temps de travail global aboutit nécessairement à une augmentation de la quantité de ressources biophysiques extraites et à une augmentation de la quantité de CO2 émise. À l’heure de la catastrophe écologique, provoquée à la fois par la déprédation des ressources et la pollution industrielle des milieux, toute politique de transition énergétique doit viser une réduction du temps de travail. Nous, écologistes, exigeons donc le retrait de la réforme et la diminution de l’âge de départ à la retraite.

La deuxième raison est d’ordre sanitaire. L’écologie pense les relations entre les organismes et leurs milieux. Or, nul·le n’ignore que les conditions du travail contemporain sont pathogènes. Elles ruinent la santé des travailleur·euse·s en provoquant des maladies professionnelles, elles affaiblissent les organismes, elles usent les corps. La pénibilité est un doux euphémisme pour la souffrance au travail dans le capitalisme tardif. La santé n’est garantie qu’à condition que les corps évoluent dans des milieux sains et dans des conditions environnementales décentes. Or, ces conditions ne sont pas réunies. La réforme en augmentant le temps de travail va conduire à exposer plus longuement encore les individus aux facteurs pathogènes qui les menacent. Nous, écologistes, exigeons donc le retrait de la réforme et l’abolition de toutes les formes de travail qui ne garantissent pas la santé des producteur·e·s dans des environnements salubres.

La troisième raison est liée à la structure du nouveau système de retraite. En apparence, le passage à un système par point ne vise pas à introduire de la capitalisation, mais seulement à équilibrer les dépenses (les pensions) avec les recettes (les cotisations). Cela implique de calculer la pension en divisant la somme des cotisations de carrières par l’espérance de vie à la retraite. La cotisation est convertie en point, elle-même reconvertie en rente viagère au moment du départ en retraite. Selon ce modèle, plus l’espérance de vie s’accroit, plus la rente est modeste. Plus l’espérance de vie diminue, plus la rente augmente. Ou encore, plus on reporte son départ en retraite, plus sa retraite augmente ; plus on anticipe son départ, plus la rente diminue. Pour pouvoir équilibrer les dépenses et les recettes du système, il faudrait donc choisir entre le montant de sa retraite et l’âge de départ. Aussi il est évident que si la réforme maintient le système par répartition, elle l’affaiblit de telle sorte que celles et ceux qui en auront les moyens épargneront un capital retraite auprès de « fonds de pension à la française », selon les termes du gouvernement. Ceci a deux conséquences auxquels nous, écologistes, nous nous opposons.

La première est de confier à des marchés financiers responsables des crises économiques et incapables d’assurer une quelconque forme de transition énergétique (les marchés à polluer en sont un parfait exemple), la responsabilité de la protection sociale et le maintien d’un niveau de vie décent à l’âge de la retraite. On sait que les marchés financiers cherchent à obtenir des retours sur investissement rapides et qu’ils se moquent de leurs conséquences sociales et environnementales. Augmenter la capitalisation c’est augmenter l’emprise de marchés financiers déprédateurs pour l’environnement.

La seconde conséquence est d’amorcer un mouvement de grande ampleur de retraite par capitalisation qui limite l’étendue de la répartition. Or quel est le principe de la répartition ? C’est un système de financement des pensions des retraité·e·s actuel·le·s par les cotisations des travailleurs actifs qui acquièrent grâce aux cotisations qu’ils versent des droits qui leur permettront de bénéficier de pensions retraites financés par les travailleurs du futur. C’est donc un système fondé sur la solidarité intergénérationnelle, là où la capitalisation est fondée sur l’épargne individuelle et le placement du capital retraite sur des marchés financiers. Au-delà des risques sociaux et environnementaux inhérents à la financiarisation, la répartition correspond au type de relation que les écologistes entendent développer : une solidarité fondée sur la responsabilité envers les générations futures. Les écologistes refusent de déléguer l’avenir à ceux qui sont responsables de la destruction du monde. Pour cette raison, nous, écologistes, exigeons le retrait de la réforme et nous appelons à développer les solidarités collectives entre générations et entre espèces. Nous soutenons la grève et nous multiplierons les actions de blocage contre une économie qui exploite tous les organismes et détruit tous les écosystèmes.

Premiers signataires :
Action climat Paris
CLAQ
Des membres de Youth For Climate Paris
Des membres de XR Paris
Désobéissance écolo Paris
Plateforme d’enquêtes militantes
RadiAction Paris

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