Dieudonné et la ferme des animaux, un film pour se débarrasser de l’imposture.

Dieudonné. Qu’est-ce qu’on peut réellement en dire ? Son nom évoque plus une grimace ou un rictus, qu’un rire. Il amuse les siens, d’un rire grinçant, fait de mesquinerie et de mépris.

Depuis bientôt vingt ans, Dieudonné nourrit son public d’une seule et même obsession. On dirait qu’il ne pense qu’à ça, qu’il ne respire que par ça. Il y aurait, quelque part et partout à la fois, une oligarchie imperceptible qui tire toute les ficelles d’un monde décadent. Une oligarchie partageant un même amour pour Israël et une même foi. Le complot judéo-maçonnique : des hommes unis dans l’ombre et assez puissants pour dominer toutes les structures de la société. Les vieux dogmes poussiéreux véhiculés depuis la mort de Jésus, si tant est qu’il ait vraiment vécu.

Dieudonné parle, parle, mais ne dit rien. D’ailleurs il ne sait pas grand-chose. Il répète, il anone ses slogans moisis, évoque tantôt les juifs, tantôt les sionistes, mais n’a jamais été capable en vingt ans de définir le sionisme. Quand il livre une interview, il cherche des mots qui pourraient avoir du sens, mais déblatère des phrases toujours identiques. Il reformule sans cesse les mêmes non-sens, sans aucune référence historique ni aucune expérience personnelle. Et pour cause, Dieudonné n’a jamais rien vécu au-delà de ses déboires judiciaires. La seule chose qu’il sait faire, c’est de l’esbroufe.

Dieudonné n’est pas antisémite, il est judéophobe. En tout cas, tous ses meilleurs amis le sont, et ne se privent pas de le revendiquer : ils n’aiment pas les juifs, ni leur religion. Ils rêvent de pogroms, mais ne le diront jamais. Ils préfèrent nier que des judéophobes comme eux sont parvenus par le passé à exterminer des milliers de juifs. Pour rien, juste comme ça, parce qu’ils croyaient aux mêmes slogans moisis que Dieudonné. Être assimilés à des assassins, ça heurte leurs consciences bourgeoises, alors ils nient. Ils préfèrent dire que la persécution des juifs n’est que propagande, et que les juifs eux-mêmes sont des assassins. Pas « des » juifs, tous les juifs. L’article 1 du Code Noir et les prophéties antisémites de nationalistes noirs américains suffiront à affirmer que les juifs ont déporté et réduit en esclavage des millions d’Africains. Les faux protocoles des sages de sion rédigés par la police secrète russe suffiront quant à eux à affirmer que les juifs ont planifié la domination du monde. Le reste, c’est l’affaire d’un vaste lobby de négationnistes et de révisionnistes, maîtres en falsifications historiques et en raccourcis de toutes sortes. La messe est dite, on peut haïr tranquille.

Mais le créneau de la conspiration ne suffit pas à Dieudonné l’arriviste. Il faut taper plus pour gagner plus. La judéophobie n’est pas assez rentable, il faut ajouter autre chose. Alors Alain Soral tombe à pic. Il incarne depuis 1993 la possibilité de réconcilier socialisme et nationalisme, comme au bon vieux temps. Le rouge et le brun sont des couleurs qui s’associent bien dans la pensée soralienne. Dieudonné s’initie au bruit des bottes, et ça le fait fantasmer. Depuis 2004, lui et Soral font tandem, partagent la même ligne de vie, les mêmes désirs de puissance. Jusqu’à se présenter comme candidats du système fin 2014, sous la bannière de la réconciliation nationale. Beau remake du maréchal Pétain à la sauce fin-de-siècle.

Et comme il faut faire croire qu’il n’est pas un produit du système, Dieudonné s’est accolé l’étiquette « anti impérialiste ». C’est Soral qui le lui a soufflé à l’oreille. Et aussi Frédéric Chatillon, le VRP du Front National. Pour eux l’Empire, c’est les États-Unis et Israël, sans compter tous leurs serviteurs cachés derrière les rideaux du « monde libre ». L’équation est simple : tous les ennemis des États-Unis et des juifs sont mes amis. Le cercle d’amis s’élargit et Dieudonné soutient les puissants les plus infréquentables : Kadhafi, Poutine, Assad, Chavez, Ahmadinejad…

Et ceux-là le lui rendent bien. L’argent propre des tyrans vient financer ses pitreries franco-françaises, et il peut exporter sa renommée sur les plateaux télé iraniens et russes, tantôt comme prophète d’un islam désincarné, tantôt comme pourfendeur de l’axe « américano-sioniste ». Dieudonné, pauvre pantin à la solde d’Iznogoud.

Mais voilà que des milliers de cerveaux disponibles reprennent le fist-fucking de Dieudonné comme ils auraient repris jadis le salut romain de l’oncle Adolf. Avec joie et insouciance, parce que c’est cool, et parce que c’est beaucoup plus facile d’être anti-système comme ça que de prendre des casques et des bâtons pour combattre les États et leurs empires. La révolution facebook dans toute sa splendeur, comme quoi même la Réaction est décadente.

Mais tout ça n’est pas nouveau, d’autres l’ont écrit, dit, crié même. Aucun effet, car écrire aujourd’hui revient souvent à pisser dans un violoncelle. Alors voilà, comme les articles d’analyse ne suffisent plus, il a fallu entrer un peu dans le spectacle, produire du son et de l’image. Il en ressort ce film de 80 minutes, long monologue illustré pour démonter la nébuleuse Dieudonisienne. On pourra le trouver médiocre, voire indigeste. Au final, chacun en fera ce qu’il voudra. On fait ce qu’on peut pour être audible. Et tout le monde n’a pas les média avec soi, alors advienne que pourra. CQFD.

LE FILM :


Dieudonné et la ferme des animaux - PARTIE 1/2 par acrobaticon


Dieudonné et la ferme des animaux - PARTIE 2/2 par acrobaticon

RESUME DU FILM :

Le porc présente son ami. Un film à l’humour douteux en guise d’attaque envers un homme douteux. Juste réponse d’un porc factice à un humain factice, cette vidéo tente d’apporter un regard sans concession sur la déchéance d’un pitre, qui a cru bon a un moment de sa vie de poursuivre les mêmes desseins médiocres que nombre d’autres visages pâles avant lui. Dieudonné, rien de nouveau, juste une nouveau visage de la barbarie, le fascisme avec d’autres contours. Ou comment le système produit des opposants en plastique pour détourner le peuple de luttes et d’alternatives saines d’esprit. Derrière le miroir de fumée, le sourire se transforme en grimace et Dieudonné révèle sa vraie nature : un illusionniste de plus. Et qui fricote avec la haine, parce que ça rend populaire et que ça rapporte gros. A l’écouter, on ne se nourrit pas d’espoir, on se réfugie dans le mépris et la mesquinerie. Comme dans la ferme des animaux, on finit par se dire qu’il faut quand même se fier aux apparences quand elles transpirent le mensonge. Mais à la fin, les porcs prennent le pouvoir. Et c’est loin d’être aussi rose qu’on croyait. L’entreprise Dieudonné mène droit dans le mur, il faut être borgne pour ne pas l’avoir vu avant. Et comme chacun sait, au pays des aveugles, les borgnes sont rois. La video est longue, trop longue, mais pas moins qu’un livre. Prenons le temps de réfléchir, avant qu’il ne soit trop tard. Ce soir, en ouvrant ma fenêtre, je pouvais déjà entendre au loin le bruit des bottes. Je voudrais écouter une autre mélodie que celle des pogroms.

Ce film est dédicacé à la résistance palestinienne, qui se passe bien du soutien des chemises brunes. La lutte contre le sionisme aussi.

Note

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