Déjà les éternels chiffres : on était 45 000 selon la CGT, 7 500 selon les flics (toujours le mot pour rire, ceux-là).
Aujourd’hui encore, tout est fait pour nous dissuader de manifester : des flics partout, des contrôles partout, à la sortie des métros et à tous les accès de la place d’Italie. Des grilles bloquent les rues, des anti-émeutes sont disposés partout, toutes les stations de métro entre Place d’Italie et Bastille sont fermées, bref, c’est le même décor d’état de siège que la semaine dernière et que le 23 juin...
Au départ sur le boulevard de l’Hôpital, on était environ 200 dans le cortège de tête, et c’était bien mou... Au même moment, une centaine de personnes étaient bloquées de l’autre côté de la place d’Italie, boulevard Blanqui (venues en groupe depuis Denfert). Les flics voulaient contrôler tout le monde, et tout le monde refusait, avec le soutien côté place d’Italie de pas mal de manifestant-e-s. Une fois tout le monde passé sans encombres et sans contrôle, on a donc été rejoint par beaucoup de monde (au fur et à mesure que la manif avançait, un peu comme d’habitude, le cortège de tête grossissait à vue d’oeil). Au bout du boulevard de l’Hopital, on était plusieurs centaines (et à la fin à Bastille plus d’un millier, rien que dans le cortège de tête - je ne saurais chiffrer plus précisément, peut-être que vers la fin on était 2 000 ou plus, on était bien serré-e-s...).
Côté XIIIe, boulevard de l’Hôpital, les flics se font assez discrets (même s’ils sont en grand nombre, devant la manif, et à chaque intersection, ainsi que sur les flancs de la manif en certains endroits, avec des canons à eau prêts à intervenir au cas où...). L’ambiance chauffe un peu, on passe de slogans assez chiants (« Manuel Valls est dégueulasse, lalalalala... », « C’est qui les casseurs ? C’est eux les casseurs ! C’est qui la racaille ? C’est eux la racaille », alors que les casseurs et la racaille, tout le monde sait que c’est nous... y’a pas de honte !) à d’autres un peu plus énervés (« Tout le monde déteste la police », « À bas l’État, les flics et les patrons », « Grève, blocage, manif sauvage ») ou aux habituels « Paris, debout, soulève-toi » et « Haaa, anti, anticapitaliste ». Ça gueule aussi pas mal « Tous à l’Assemblée, faut les dégager », et le RDV tourne pour s’y retrouver vers 19h.
Au cours de la manif, ça commence à se masquer, mais beaucoup moins massivement que lors des manifs de mars à mi-juin...
Quelques tags sont quand même inscrits sur des planches de bois qui protègent des panneaux de pub et sur des toilettes publiques :
« On annule les vacances et on continue », « Aux chiottes l’État (et les vacances) », « Nous chions sur vos lois », etc.
Les flics sont en force côté XIIe, quai de la Rapée et boulevard de la Bastille. Toutes les rues sont bloquées par des grilles de police et des flics anti-émeute, et des dizaines de flics anti-émeute « accompagnent » la tête de manif sur les côtés... Quelques frictions ont lieu sur la droite au croisement quai de la Rapée / boulevard de la Bastille, les flics sont hués et se prennent quelques rares projectiles. Ils font une mini-charge pour éloigner les manifestant-e-s, mais ça ne chauffe pas plus que ça. La manif stagne ici un long moment, puis reprend assez tranquillement jusqu’à la place de la Bastille, où une voiture de RTL se prend des tags anarchistes et anti-médias, du pipi, des stickers et quelques coups... Plus loin, c’est des caméramen d’iTélé qui se font téj’ sous les cris de « Tout le monde déteste iTélé » et « Cassez-vous ». Il est à peine 16h et le cortège de tête envahit la place de la Bastille, complètement cadenassée par la flicaille.
Pendant ce temps-là, Valls annonce à l’Assemblée nationale que la loi Travail passe en force avec un deuxième coup de 49-3. Ou comment la gauche fait plus fort et autoritaire que la droite, qui pour le même genre de projet de loi de merde avait reculé face à des mouvements moins longs en annulant leurs projets de loi (gouvernement Balladur en 1994 avec le CIP, gouvernement de Villepin en 2006 avec le CPE).
Clairement, « Tout le monde déteste le PS ». Mais ne vous faites pas d’illusions, on n’ira pas voter pour Mélanchon, Poutou ou je sais pas qui. On n’ira pas voter. Nos idées de société sont révolutionnaires et ne passent pas par la démocratie réprésentative. On veut la fin de l’État et du capitalisme, on veut l’entraide, l’autogestion et l’autodétermination.
Si l’on peut réfléchir à la suite et imaginer que la lutte ne s’arrête pas avec les vacances, se pose la question des manifs. Depuis le 23 juin, une partie des manifestant-e-s du cortège de tête préfèrent éviter les manifs emprisonnées et initier des manifestations sauvages ailleurs. Certain-e-s s’en plaignent, mais à moins de venir manifester les mains dans les poches, quoi de plus compréhensible ? Bien sûr, ça éparpille le nombre de manifestant-e-s, mais ça complique aussi les choses pour les flics, qui doivent alors être partout et pas juste sur deux arrondissements avec un parcours spécifique et prévu par la préf’... On pourrait se dire « on manifeste ensemble et on voit après, ou avant, pour les manifs sauvages », mais bon, vu le mois de juillet, les vacances, la baisse de motivation et de présence, ça va être compliqué de multiplier les rendez-vous. Dans tous les cas, pour les prochaines journées d’action (voire pour les prochains mouvements, les prochaines luttes), ça serait pas mal de prévoir des rendez-vous simultanés pour plusieurs petites manifs sauvages, spontanées et déterminées, plutôt qu’une seule grosse manif cadenassée, sous contrôle. Les flics sont rôdés, là, et nous imposent leurs parcours tout en nous dissuadant de venir manifester comme nous le voulons. À nous de faire preuve d’imagination, de créativité, de détermination et de finesse pour les prendre de vitesse. On l’a fait des dizaines de fois pendant ce mouvement. On le fera encore.