Pourquoi la police a-t-elle employé ces méthodes en pleine manifestations pourtant autorisées ?
Mathieu Rigouste : Il ne faut pas oublier que la Police est complétement encadrée, régulée par des systèmes juridiques, par une administration et une bureaucratie aussi. Les choix faits les 28 avril et 1er mai sont délibérés et participent d’une tactique et d’une stratégie élaborées puis mise en œuvres depuis les États-majors policiers et politiques. Comme je l’ai dit, il s’agit de faire place nette mais également d’utiliser une tactique qui pourrait être qualifiée de « protocole tunisien ». Durant la révolution en Tunisie, la contre-révolution a employé des tireurs d’élite postés sur les toits et qui avaient pour ordre non pas de viser des meneurs mais les anonymes au milieu de la foule. Le message ainsi envoyé était qu’on n’était pas menacé parce qu’on menait le mouvement mais simplement parce qu’on y participait, qu’on prenait la rue à travers la manifestation. En France, à un degré évidemment différent, le message envoyé est le même : on a pu ainsi voir des CRS pointer des flash balls dans une station de métro [Métro Bonsergent]. Je ne pense pas qu’une unité ait pu s’autoriser cela sans en avoir reçu l’ordre. Il s’agit là aussi de montrer que quiconque prend la rue, participe à ces mouvements, sera potentiellement pris pour cible.
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